Les mille et une affaires de Vincent Bolloré l’Africain

(Ecofin Hebdo) - « En France, on est content quand un Canadien ou un Japonais vient créer une usine. En Afrique, il y a encore cet ancien relent colonialiste à l’égard de l’entrepreneur français qui va sur le continent. Après, il y a toujours quelques concurrents et un ou deux ministres qui crient qu’il y a trop de Bolloré à Abidjan… », déclarait aux micros du Monde, Vincent Bolloré. Mais aujourd’hui, les affaires africaines de l’industriel breton font parler bien au delà du continent.

 

La nouvelle a semblé surréaliste tant l’intéressé paraissait intouchable. Vincent Bolloré a été placé en garde à vue, le 24 avril dernier, et mis en examen le lendemain, dans le cadre d’une information judiciaire pour « corruption d’agents publics étrangers » dans les processus d’obtention des concessions des ports africains. La justice française reproche au président du groupe Bolloré d’avoir facilité, grâce à sa filiale de communication Havas, l’élection du président guinéen Alpha Condé et la réélection du chef de l’État togolais Faure Gnassingbé, en 2010.

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La nouvelle a semblé surréaliste tant l’intéressé paraissait intouchable.

La justice française veut savoir si, en contrepartie, les deux dirigeants auraient concédé au groupe la gestion des terminaux à conteneurs des ports de Lomé et de Conakry. Les affaires africaines de Bolloré seront passées au peigne fin. De quoi réjouir la multitude d’ennemis que s’est fait Vincent Bolloré au fil des années, en France, comme en Afrique.

 

Contrôler pour survivre

« Pour avoir le long terme, il faut garder un capital familial. Dans une entreprise normale, j’aurais été foutu dehors depuis longtemps. Pour les histoires en Afrique, on m’a dit n’y va pas, ça ne marchera jamais. Quand vous avez le contrôle de votre futur, vous pouvez faire les choses sur la durée et mieux réussir que lorsque vous êtes sous le contrôle des marchés financiers ». Cette déclaration faite à la presse, en janvier 2016, par Vincent Bolloré donne de précieuses informations sur le chef d’entreprise.

D’abord, l’une des choses les plus importantes dans la vie du breton né le 1er avril 1952 à Boulogne-Billancourt, c’est le capital familial. En 1975, alors qu’il travaille à la Compagnie financière Edmond de Rothschild, l’affaire familiale, la papeterie Odet-Cascadec-Bolloré (OCB) est proche de la faillite. Pour 2 francs symboliques, il la rachète et avec son frère réussit à redresser les comptes, notamment en diversifiant ses activités. Du papier de Bible et du papier de cigarette, l’OCB passe aux sachets de thé, puis aux films plastiques ultrafins. A cette époque, les employés de Bolloré découvrent une autre chose chère à leur nouveau patron : le contrôle. Vincent Bolloré est partout, à tous les niveaux de la conception des produits. Mais bientôt, c’est tout l’environnement français des affaires qui découvre le côté sombre de cette manie du contrôle. Au fil des années et d’investissements réussis, il devient puissant.

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« Têtu, j’applique les choses coûte que coûte, même si j’ai tort » confiait-il en 1987 au
micro de l’animateur Thierry Ardisson.

Toujours intéressé par la diversification de ses activités, il entre au capital de plusieurs sociétés. Mais les rôles subalternes ne l’intéressent pas. Pour se faire une place au sommet des entreprises, il va développer une méthode qui en fera le patron le plus craint de France. Certains lui donnent, dans le milieu des affaires français, le nom de « poulie bretonne ».

Pour se faire une place au sommet des entreprises, il va développer une méthode qui en fera le patron le plus craint de France. Certains, dans le milieu des affaires français, lui donnent le nom de « poulie bretonne ».

Le but est simple : prendre le contrôle en passant sous les radars. Au début, il acquiert une partie modeste du capital, puis il essaie d’acquérir plus d’actions, lui-même ou par le biais de ses proches. Avant même de s’en rendre compte, la direction en place est menacée et parfois déjà battue. Si, par cette approche camouflée, il a échoué à arracher la chaîne TF1 à son ami Bouygues qui ne lui pardonnera jamais cette indélicatesse, il réussira tout de même à prendre la tête de l’agence de communication Havas, entre autres.

Une autre méthode retorse est associée à l’homme d’affaires : pour s’assurer l’obédience de ses collaborateurs et la retenue de ses ennemis, son arme favorite est le procès. Après la prise de contrôle d’Havas, il va accuser les anciens patrons de détournement et les trainer en justice. 7 ans d’enquête et 12 procédures plus tard, les anciens dirigeants d’Havas sont innocentés par la justice et remportent tous les procès. « C’était bidon. Ça n’avait pas d’autres intérêts que de créer une exemplarité. Il semblait vouloir dire : ceux qui résistent, voilà comment je les traite. Donc si vous voulez vous subir 9 heures de perquisition, 42 heures de garde à vue et être pollués pendant 7 ans dans les médias par mes avocats, résistez-moi », explique Jacques Herail, ancien directeur financier d’Havas. La méthode Bolloré et le vent de crainte qui l’accompagne fait ses preuves.

« Il semblait vouloir dire : ceux qui résistent, voilà comment je les traite. Donc si vous voulez vous subir 9 heures de perquisition, 42 heures de garde à vue et être pollués pendant 7 ans dans les médias par mes avocats, résistez-moi »

Il faut dire qu’il a les moyens de la répéter à l’envi. Personne, ou seulement très peu de téméraires, essaient de résister à celui dont la fortune ne cesse de grossir. Estimée à 7,7 milliards, en fin d’année 2017, elle en fait la 12e fortune de France. Les résistants auront beau s’escrimer pour tenter de faire vaciller Vincent Bolloré…

 

Ce que Vincent Bolloré doit à l’Afrique

L’Afrique est un continent vital pour l’empire Bolloré. « Ma conviction, c’est que l’Afrique est au début de son développement, et que cela va aller bien plus vite que les experts ne le pensent. Nous y sommes donc d’abord allés pour faire ce que nous étions capables de faire à l’époque : du transport. Nous avons ensuite orienté notre activité vers les ports africains qui étaient alors privatisés », expliquait, il y a quelques mois, Vincent Bolloré. Son groupe a posé ses premiers pas sur le continent un peu avant le début des années 90. Aujourd’hui, l’Afrique pèse beaucoup dans les activités du groupe. Selon son rapport d’activité pour l’année 2016, l’Afrique compte, avec 2,229 milliards d’euros, pour 22% du chiffre d’affaires total du groupe, qui est de 10,076 milliards d’euros pour cette année-là. Le continent a compté plus que toutes ses autres régions d’activités hors du territoire français. A titre de comparaison, l’Europe hors France a compté pour 17%, les Amériques 13% et l’Asie-Pacifique 9%. Seules les activités françaises (39%), ont fait mieux que l’Afrique. Sur le contient, l’empire Bolloré tient un trident agriculture-communication-logistique.

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« Ma conviction, c’est que l’Afrique est au début de son développement, et que cela va
aller bien plus vite que les experts ne le pensent.

Vincent Bolloré et l’agriculture en Afrique

En 1997, il prend le contrôle du groupe Rivaud, vestige du capitalisme colonial, qui possède près de 100 000 hectares de plantations en Asie et en Afrique. Ainsi, Bolloré exploite, grâce à ses filiales et des parts dans la très décriée entreprise Socfin, dont l’actionnaire majoritaire est le belge Hubert Fabri, des plantations d’hévéas et de palmiers à huile. D’ailleurs lorsque les conditions de travail controversées des employés de ces plantations sont évoquées, la ligne de défense du groupe Bolloré est simple. « Nous ne détenons que 38% d’actions dans ce groupe dirigé par la famille Fabri. Notre pouvoir de décision ne nous permet pas de changer cette situation », déclare en 2016 le service de communication du groupe à l’Agence Ecofin. Pourtant, c’est bien son groupe que de nombreuses ONG fustigent pour cette part de l’activité Bolloré. Elle est notamment critiquée par Greenpeace qui lui reproche son rôle dans la déforestation de zones rurales camerounaises. D’autres part, les organisations de lutte pour les droits de l’homme dénoncent l’expulsion de populations résidentes de leurs milieux d’habitations dans certaines communes.

 

La communication, une autre activité phare de Vincent Bolloré sur le continent

Bolloré est également présent en Afrique dans le domaine de la communication. Des filiales de Vivendi comme Dailymotion et Universal Music Group y raffermissent constamment leurs positions. Mais, il y a surtout Canal +.

En Afrique, la filiale de Vivendi affichait, début 2018, 3,5 millions d’abonnés et y exploite, actuellement 8 salles de cinéma dans le cadre du projet Canal Olympia. L’Afrique rapporte à elle seule 22,5% d’abonnés à Canal +.

Et puis il y a les activités d’Havas, présent, entre autres, en Afrique du Sud, en Algérie et en Afrique de l’Ouest. Ce sont les activités de cette agence de communication qui finiront d’ailleurs par poser des problèmes.

 

L’activité logistique et portuaire, vache à lait africaine de Vincent Bolloré

Dès les premiers mois de son aventure africaine, l’industriel breton rachète plusieurs sociétés françaises de transit ou de manutention des produits d’import-export, dont la célèbre Société commerciale d’affrètement et de combustibles (SCAC), acquise par Bolloré, en 1986. Suivent la Société Navale Caennaise, permettant à Vincent Bolloré de sécuriser une quote-part de manutentions en Afrique, puis Delmas-Vieljeux qui permet à Bolloré de se constituer une position solide sur le continent. Aujourd’hui, Bolloré Africa Logistics, la filiale du groupe créée en 2008, gère les terminaux à conteneurs de 16 ports, emploie 24 000 personnes à travers le continent. Pourtant, le magnat vise toujours la diversification. « Le prix des ports a augmenté de manière considérable et ce secteur est devenu très concurrentiel. Il a donc fallu trouver à nouveau des projets de croissance. Le chemin de fer m’est apparu intéressant tant pour des raisons économiques qu’écologiques et sociales », raconte Vincent Bolloré.

« Le prix des ports a augmenté de manière considérable et ce secteur est devenu très concurrentiel. Il a donc fallu trouver à nouveau des projets de croissance.»

Le groupe acquiert alors la majorité dans trois concessions ferroviaires en Afrique. « Nous avions commencé en 1995 avec l’exploitation de Sitarail (Côte d’Ivoire, Burkina Faso) sur le chemin de fer Abidjan-Ouagadougou, puis avec Camrail, au Cameroun. Nous savions comment exploiter un chemin de fer », explique le milliardaire français. Le groupe détient également la concession de Benirail (Bénin). Ce sont les activités logistiques, ports et chemins de fer qui vont cristalliser l’attention des détracteurs.

 

Des pratiques quasi monopolistiques décriées en Afrique

« On ne crache pas sur ce que Bolloré apporte à l’économie camerounaise, mais à un moment donné, il faut faire participer d’autres acteurs. Qu’une seule personne contrôle tous ces ports, au Cameroun, en Côte d’Ivoire, c’est normal que ça fasse peur », explique Leila Nganzeu, journaliste à la télévision camerounaise STV, au micro de Tristan Waleckx, pour son documentaire « Vincent Bolloré un ami qui vous veut du bien ». La journaliste n’est pas la première à dénoncer les quasi monopoles de l’industriel breton sur certains marchés en Afrique.

En 2013, Jean-Louis Billon, ministre du commerce ivoirien, viendra nourrir la polémique sur « les pratiques anti-concurrentielles » du groupe Bolloré en Afrique. Ce dernier conteste, au micro du Nouvel Observateur, l’attribution du deuxième terminal à conteneurs d’Abidjan au groupement APM Terminals-Bolloré-Bouygues Travaux Publics. « Je me demande pourquoi, chaque fois qu’on arrive sous les tropiques, on se permet ce qu’on ne ferait jamais chez soi. Si l’on avait voulu brider l’économie ivoirienne, on ne s’y serait pas pris autrement », commence le ministre du commerce de l’époque, visiblement agacé. Il évoque même des tentatives de corruption. Jean-Louis Billon laisse, en effet entendre, concernant l’attribution, en 2004 du premier terminal à conteneurs à Bolloré, qu’à l’époque, une personne du groupe lui aurait fait des « propositions pour réviser sa position », défavorable au breton. Il faut dire que faire la concurrence à Bolloré en Afrique, s’est révélé bien compliqué pour plusieurs entreprises.

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« Je me demande pourquoi, chaque fois qu’on arrive sous les tropiques, on se permet
ce qu’on ne ferait jamais chez soi.» déplorait Jean-Louis Billon, ministre du
commerce ivoirien (2013)

L’un des exemples les plus marquants reste Necotrans. En 2011, Getma, une filiale de la société Necotrans gère le port de Conakry. L’accord avec le gouvernement guinéen, datant de 2008, sera soudainement résilié, en 2011, par le gouvernement et le personnel de Necotrans, expulsé du port manu militari. Quelques jours plus tard, le groupe Bolloré obtiendra la gestion du port. Necotrans déclenchera alors une bataille juridique où la société remportera quelques victoires, notamment grâce à un jugement qui obligeait son adversaire à lui verser 2,1 millions d’euros. A cause de la procédure en appel ayant suivi cette décision, la somme ne sera jamais reçue par Necotrans. En 2016, la société « enterre la hache de guerre avec le groupe Bolloré » et y renonce.

Pendant ce temps, les activités de Necotrans sur les autres marchés périclitent. Le 29 juin 2017, l’entreprise est placée sous mandat de cession, piloté par la Banque Rothschild et mise en liquidation judiciaire partielle. Quelques semaines plus tard, après un appel à candidature du tribunal de commerce de Paris, le groupe Bolloré rachète les principaux actifs de son ancien rival.

Sous d’autres cieux africains, comme au Bénin, la presque hégémonie de Canal Olympia sur le marché du cinéma local commence à faire jaser. Pourtant depuis plus de 30 ans Vincent Bolloré continue de prospérer en Afrique. En raison d’un réseau très efficace sur le continent ?

 

Un succès lié à des amitiés puissantes en Afrique

En Afrique, le succès des affaires de Vincent Bolloré doit beaucoup à sa gestion du relationnel. « Les ministres, on les connaît tous là-bas. Ce sont des amis. Alors de temps en temps, je vais être clair, on leur donne, quand ils ne sont plus ministres, la possibilité de devenir administrateur d’une de nos filiales. C’est pour leur sauver la face. Et puis, on sait qu’un jour ils peuvent redevenir ministres », avait déclaré, en 2008, Gilles Alix, directeur général du groupe Bolloré, au journal Libération.

« Les ministres, on les connaît tous là-bas. Ce sont des amis. Alors de temps en temps, je vais être clair, on leur donne, quand ils ne sont plus ministres, la possibilité de devenir administrateur d’une de nos filiales. C’est pour leur sauver la face.»

En Afrique, Vincent Bolloré est très apprécié de quelques hommes de pouvoir avec qui il soigne ses relations. La justice française enquête d’ailleurs actuellement pour savoir si son groupe a obtenu les ports de Conakry et de Lomé grâce à ses « amitiés ». En effet, Jean-Philippe Dorent, un des cadres dirigeants de Havas, s’est occupé en 2010, de la campagne présidentielle du candidat guinéen Alpha Condé, qui, durant un long exil parisien est devenu très proche de Vincent Bolloré. Alpha Condé a-t-il éjecté Necotrans pour installer son ami au port de Conakry ? Havas s’est également chargé des campagnes présidentielles de Faure Gnassingbé, fils de Gnassingbé Eyadema, en 2005, 2010 et 2015. La gestion du port de Lomé serait-elle une contrepartie de ce service ? D’ailleurs la relation entre Vincent Bolloré et Faure Gnassingbé a déjà suscité une polémique, en France. En fin d’année 2017, un reportage sur les manifestations de l’opposition, défavorable au président togolais, a été censuré, après diffusion, « sur instruction interne », par Canal +. Quelques jours plus tard, la chaîne aurait diffusé, selon plusieurs médias français qui reprenaient le site Les Jours, une vidéo promotionnelle en faveur de Faure Gnassingbé. Malgré tout, les politiques, amis de Vincent Bolloré, ne résident pas uniquement en Afrique…

« Bolloré n’était même pas classé parmi les projets retenus puisque, in fine, son offre était devenue économiquement peu viable et nous l’avons disqualifié sur cette base ».

En 2015, lors du premier tour de l’appel du processus d’attribution pour la concession du port en eau profonde de Kribi au Cameroun, « le futur plus grand port de toute la région » le groupe Bolloré n’est pas retenu, dans un premier temps du moins. La commission d’appel d’offres aurait rejeté le dossier du groupe de l’homme d’affaires français. « Bolloré n’était même pas classé parmi les projets retenus puisque, in fine, son offre était devenue économiquement peu viable et nous l’avons disqualifié sur cette base », révèle, caméra cachée, un représentant de l’administration. Pourtant, quelques semaines plus tard, après une visite-éclair au Cameroun du président français de l’époque, François Hollande, le dossier du milliardaire français est repêché. Vincent Bolloré remportera l’appel d’offres. Étonnant.

 Patrice Talon

Patrice Talon fustige le projet de Bolloré pour la boucle ferroviaire, qu’il trouve
« bas de gamme ».

Toutefois, en Afrique, tous les hommes de pouvoirs ne sont pas les « amis » de Vincent Bolloré. Récemment, Patrice Talon, le président béninois, s’est montré très ferme envers le breton, qui souhaite, depuis plusieurs années, réaliser la boucle ferroviaire Abidjan-Ouagadougou-Niamey-Cotonou-Lomé, reliant par voie de fer, la Côte d’Ivoire, le Burkina Faso, le Niger, le Bénin et le Togo. « L’ancien premier ministre Michel Rocard me le répétait avec insistance : tu devrais faire la boucle. Il a dû me le rappeler 42 fois. Puis un jour, j’ai pensé que nous étions capables de la faire, cette boucle, car nous avions suffisamment de fonds propres et de crédibilité pour nous lancer dans une aventure à 2,5 milliards d’euros », explique Vincent Bolloré.

Le projet avait été relancé en 2014, après un appel d’offres conjoint du Bénin et du Niger, datant de 2008. Ce premier appel d’offres avait été remporté par le groupe privé Pétrolin. Pourtant, en 2013, le gouvernement béninois dessaisit Pétrolin de ce projet et le confie à Benirail, filiale du groupe Bolloré. Pétrolin portera plainte et obtiendra gain de cause en 2015. Le groupe Bolloré avait pourtant déjà démarré la réalisation de la liaison Cotonou-Niamey, construit un tronçon de 140 km de rail et une gare ferroviaire au Niger. Alors que le projet prend du retard, Patrice Talon, le nouveau président béninois, élu en 2016, manifeste son désir de voir les deux groupes protagonistes se retirer du projet pour qu’il avance. Le chef d’État fustige notamment le projet de Bolloré pour la boucle ferroviaire, qu’il trouve « bas de gamme ». Il déplore particulièrement le matériel « d'occasion » du groupe français. En fait le président béninois a des raisons bien précises d’éjecter le groupe Bolloré et Pétrolin du projet. « Il faut avoir le courage de changer d’avis lorsque la situation le requiert. Ne pas le faire serait faire preuve de cécité ou d’irresponsabilité. La construction d’un chemin de fer moderne requiert des moyens considérables, 4 milliards de dollars (environ 3,27 milliards d’euros) pour ce qui concerne le Bénin, que ni le groupe Bolloré ni Pétrolin ne sont en mesure de mobiliser. L’État chinois a décidé de mettre 60 milliards de dollars à la disposition des pays africains pour la construction d’infrastructures. Ce serait idiot de ne pas en profiter », explique au Monde, Patrice Talon, pas influencé pour un sou par le personnage Vincent Bolloré.

La construction d’un chemin de fer moderne requiert des moyens considérables, (…), que ni le groupe Bolloré, ni Pétrolin ne sont en mesure de mobiliser.

Pour remettre les choses dans leur contexte, il faut savoir que le président béninois est lui-même, et cela depuis une époque précédent son élection, la première fortune de son pays et la 15e d’Afrique. Estimée à 350 millions d’euros en 2015.

 

Un personnage qui fascine, mais surtout en Afrique francophone…

Le personnage Bolloré est un véritable capteur d’attention. Malgré les nombreux procès qu’il lui inflige, la presse ne cesse, essentiellement en France, de se mêler de ses affaires. En Afrique, francophone surtout, Vincent Bolloré est un véritable objet de fascination, positive ou non. Beaucoup moins dans la partie anglophone du continent qui est plutôt irradiée par un personnage aussi emblématique que le milliardaire nigérian Aliko Dangoté, riche de 9,95 milliards d’euros selon Forbes, environ 2 milliards de plus que Vincent Bolloré. Ici, Vivendi, dont le breton est actionnaire de référence, n’a pas été en mesure de s’offrir MultiChoice, l’opérateur de télévision phare des marchés d’Afrique anglophone.

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Vincent Bolloré est d’ailleurs devenu, bien malgré lui, et ce pour des milliers
d’Africains, le visage de la « Françafrique ».

Vincent Bolloré n’est-il au final qu’un fantasme africain ? Le mythe Bolloré, en Afrique francophone, semble étroitement lié à la relation équivoque entre l’Afrique et son ancien colonisateur, la France. Vincent Bolloré est d’ailleurs devenu, bien malgré lui, et ce pour des millions d’Africains, le visage de la « Françafrique ». Alors, il n’y a rien de surprenant à ce que les déboires judiciaires du breton envahissent les conversations africaines depuis quelques jours. Les langues se délient de plus en plus depuis que l’homme d’affaire a été mis en examen, ce 25 avril. Même la presse semble avoir moins peur de celui auquel ces derniers événements ont donné l’allure d’un colosse aux pieds d’argile.

Le 19 avril dernier, le milliardaire avait soudainement annoncé sa décision de laisser la présidence du conseil de surveillance de Vivendi à son fils Yannick. Pourtant la retraite de Vincent Bolloré est prévue depuis longtemps pour le 17 février 2022.
En vieux loup, le tueur au sourire, dont la procédure judiciaire était une devenue l’épée de chevet, avait-il senti la tempête venir ? De toute façon, depuis la Bible, tout le monde le sait. Qui tue par l’épée, périra par l’épée.

Servan Ahougnon

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