(Agence Ecofin) - Dans sa politique sectorielle de télécommunication, le gouvernement nigérien veut d’ici 2015 connecter à Internet toutes les 266 communes que comptent les huit régions du pays. Pour cela un texte a été adopté depuis 2007. Il organise la mise en œuvre de la stratégie d’accès universel en milieu rural et périurbain.
« La situation de la connectivité en milieu rural est loin d'être reluisante », a déclaré le ministre nigérien de la Communication et des Nouvelles Technologies de l'Information, M. Salifou Labo Bouché. Au Niger, en effet, il existe un déséquilibre de pénétration entre les zones urbaines, d’une part, et les zones périurbaines et rurales, d’autre part. L’accès au service Internet s’effectue à l’intérieur du pays dans des conditions peu satisfaisantes. Malgré la présence des radios communautaires, 75% des communes rurales ne sont pas couvertes.
Selon un recensement de l’Autorité de régulation multisectorielle (ARM), les opérateurs de téléphonie et fournisseurs d’accès à Internet (FAI) sont l’opérateur historique Sonitel avec sa filiale GSM Sahelcom, Airtel-Niger, Moov-Niger, et Orange-Niger. Les FAI sont Liptinfor-Niger SA, Connecteo, Ixcom, et Alink. Les services de ces FAI sont le plus souvent destinés aux cybercafés et aux entreprises.
Un fonds pour l’accès universel aux TIC
Pour atteindre son objectif, le Niger a mis en place un fonds d’accès universel aux TIC dont la gestion a été confiée à l’Autorité de régulation multisectorielle (ARM). Ce fonds doit servir au développement des infrastructures et des applications TIC permettant le développement socio-économique du Niger. Les ressources du fonds d’accès universel aux services sont déposées sur un compte bancaire distinct des comptes de l’ARM. C’est un fonds qui vise à compenser le déficit des téléphonies dans les zones dites « zones blanches », où les populations n’ont pas accès aux services mobiles, téléphonie et Internet. « Il faut mettre en cohérence les textes nationaux avec ceux de l’espace communautaire. Il faut également compléter le cadre réglementaire et institutionnel, en prenant un décret précisant les orientations et les priorités en matière d’accès universel aux services et les mécanismes de mise en œuvre de la politique d’accès universel aux services. Il faut aussi définir le mécanisme de la gestion de ce fonds en même temps de déterminer les attributions, le fonctionnement, la composition et les modalités de gestion du nouvel organe administratif chargé de la gestion de ce fonds », a indiqué M. Salou Abdou Doro, responsable gestion du spectre des fréquences, à l’ARM.
Actuellement, ces fonds sont estimés à 11 milliards de FCFA. Mais, pour l’heure, rien n’est entrepris en ce qui concerne leur utilisation pour desservir les zones déficitaires du Niger. Il faut souligner, toutefois, qu’une ordonnance a été prise, durant la Transition en 2010, pour créer un organe indépendant chargé de gérer les fonds. Jusque-là, cependant, aucun décret n’est pris. Or, « pour pouvoir utiliser ces fonds rationnellement et les injecter, il faut combler ce vide juridique », a souligné Yayé Harouna, ingénieur télécom à l’ARM.
L’accès universel n’est pas pour demain
Le fonds d’accès universel aux TIC est alimenté par les opérateurs de télécommunication titulaires d’une licence. Leur contribution est fixée à 4% du chiffre d’affaires annuel hors taxes. Les fournisseurs d’accès internet contribuent à hauteur de 1% de leurs chiffres d’affaires si leur résultat net est positif. L’ARM ne les contraint pas, c’est leur cahier de charges qui fixe les modalités de contribution aux missions de l’accès universel.
Pour sa part l’Etat du Niger s’est engagé à modifier sa fiscalité sur le matériel informatique et celui des cybercafés et des télécentres. Certains bailleurs de fonds comme la Banque mondiale, le PNUD et l’Union européenne sont appelés a apporter leur contribution pour l’accès universel aux TIC.
En 2004 et 2007, l’ARM a procédé à des contrôles sur les opérateurs pour évaluer le niveau d’exécution de leur engagement par rapport à leurs cahiers de charge et les prescriptions réglementaires sur le fonds d’accès universel. Elle a malheureusement constaté qu’ils ne respectent pas les clauses de leur cahier de charges. Ils ne respectent même pas le minima d’un service standard sur la qualité. De même, il existe toute une opacité dans leur comptabilité. Les sanctions de l’ARM, sous forme de mises en demeure, ne sont jamais suivies d’effet.
La concurrence
Ce qui a contribué aujourd’hui à désenclaver certaines localités se situant dans les « zones blanches », c’est la concurrence au sein des opérateurs de téléphonie, qui les oblige à couvrir, tant bien que mal, même les zones plus reculées.
La Sonitel, l’opérateur historique, propose à travers sa filiale Sahelcom des accès Internet en Wifi et des accès CDMA sur 35% du territoire national. « La Sonitel est présente dans presque toutes les localités du Niger. Son taux de couverture national est de 35%. Mais cela n’est pas suffisant. Pour l’instant l’Internet se trouve uniquement dans les zones urbaines et là aussi ce n’est pas à tous les niveaux », a déclaré Adam Amoumoune, secrétaire général du syndicat national des travailleurs de la Sonitel. « Il faut faire en sorte que les populations rurales et périurbaines puissent bénéficier des TIC. C’est pourquoi nous demandons au gouvernement de nous accompagner pour atteindre l’accès universel aux TIC en investissant et en créant le cadre juridique à partir duquel il met les investisseurs en confiance », a-t-il ajouté.
Selon S. Boubacar, ingénieur des télécommunications, pour rendre universel l’accès des TIC au Niger, la Sonitel doit mettre à la disponibilité des communautés rurales des télécentres communautaires. « Cela peut contribuer au développement local. En zone rurale les télécentres communautaires c’est mieux que les lignes individuelles par ménage. Dans un télécentre communautaire il y a tous les services assistés par ordinateurs, notamment le téléphone, la télécopie, l’Internet, le télex, la radio, la télévision », a-t-il souligné.
A la disposition de tous les lycées et écoles normales
Présent dans les huit régions du Niger, Moov-Niger offre à ses abonnés Internet et Intranet à partir de leur mobile, en utilisant la technologie GPRS (General Packet Radio Service). Moov-Niger utilise aussi la technologie haut débit EDGE (Enhanced Data for GSM Evolution). L’opérateur Orange-Niger, présent aussi dans huit régions, propose à sa clientèle des services de téléphonie fixe, de téléphonie mobile et d’accès à Internet via le réseau Wimax. Airtel Niger, qui couvre aussi toutes les régions du Niger, offre ses services à sa clientèle à travers la technologie GPRS/EDGE. Il faut préciser par ailleurs que, d’ici 2012, le gouvernement nigérien a dégagé 260 millions de FCFA pour mettre à la disposition de tous les lycées et écoles normales du Niger un télécentre polyvalent. Pourtant, souligne M. Aliou, ingénieur en télécommunication, « même s’il y a une amélioration de la télédensité grâce aux réseaux mobiles, l’accès universel aux TIC n’est pas pour demain au Niger ».
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