(Agence Ecofin) - Les tensions sociales observées dans les pays touchés par le printemps arabe sont de nature à différer une reprise économique déjà mise à mal par la dégradation des finances publiques, estime Masood Ahmed, directeur pour le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord du Fonds monétaire international (FMI), dans une interview accordée à l'agence Reuters.
"Le grand défi, cette année, sera de gérer les attentes de populations de plus en plus impatientes de voir engagées les mesures qui stabiliseront l'économie et commenceront à poser les bases d'une transformation économique qui créera davantage d'emplois et une croissance inclusive", a-t-il dit.
Des pays comme la Tunisie, berceau du mouvement parti à l'hiver 2010-2011, l'Egypte ou encore la Jordanie, sont notamment confrontés à une envolée des coûts des importations de pétrole et de nourriture. Le chômage croît. Les tensions sociales aussi.
Cela vient s'ajouter aux lenteurs des développements politiques. « Ces transitions politiques tendent à se prolonger de plus en plus et, dans certains cas, à se dérouler de plus en plus dans un climat de tension », souligne l'économiste rencontré en marge d'une conférence du Forum économique mondial à Amman qui s’est clôturé hier.
Pour amortir l'inflation et atténuer la colère sociale, les pouvoirs publics ont accentué leurs politiques de subventions de l'énergie et des produits de première nécessité, tirant sur leurs réserves de changes et faisant davantage appel aux marchés du crédit, empruntant à des taux élevés.
Deux ans après le mouvement, les déficits publics devraient dépasser en moyenne les 8% du PIB en 2013. En Egypte, le déficit budgétaire sera de l'ordre de 10 à 12%. « Des niveaux qui deviennent progressivement intenables », note Masood Ahmed.
Quant à la croissance de ces économies, elle est attendue en moyenne autour des 3%. Insuffisant pour absorber les nouveaux entrants sur le marché du travail. « Le chômage des jeunes frôle déjà les 30% et au cours des deux dernières années, il s'est accentué dans certains pays. »
Pour l'ensemble de la région Moyen-Orient/Afrique du Nord, les subventions publiques représentaient 240 milliards de dollars en 2011, soit 8,5% du PIB de la région.
Et dans le domaine des subventions de l'énergie, la région représente la moitié de la totalité des subventions mondiales dans ce secteur.
Des pays comme le Maroc, la Jordanie et la Tunisie ont depuis entrepris de les réduire ou de les cibler davantage. Mais cette tendance a un coût social: en novembre dernier, de violentes manifestations ont eu lieu en Jordanie contre l'arrêt des subventions publiques.
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