(Agence Ecofin) - Ce qui se passe à l’Etablissement de télévision tunisienne (Ett) est inédit. Limogeage du président directeur général, Mustapha Ben Letaïef, qui lui-même avait révoqué le rédacteur en chef du service information, Hamadi Ghidaoui. Puis deux démissions : le directeur de la chaîne Watania 1, Iheb Chaouech, et la directrice de la Watania 2, Chadya Khedhir.
Tout est parti de la diffusion de l’image de la tête d’un jeune berger décapité par des djihadistes. C’était dans le journal de 13h, le sur la chaîne Al Watanya 1. Ce samedi 14 novembre 2015, la direction de l’Ett a reconnu qu’une « bourde professionnelle » a été commise, car l’image porte atteinte à la « dignité humaine ». Une sanction a été prise immédiatement contre le rédacteur en chef du service information. Mais cela n’a pas suffi, car dès le lendemain 15 novembre, le chef de gouvernement tunisien, Habib Essid, a limogé le Pdg de l’Ett, Mustapha Ben Letaïef. Un intérimaire a été nommé.
En signe de protestation de la décision du chef du gouvernement, les directeurs des chaînes Watania 1 et Watania 2 ont démissionné de leurs fonctions ce 16 novembre. Ils accusent le chef du gouvernement d’avoir violé le décret loi 116-2015, car ce dernier a pris sa décision sans s’en référé à la Haute Autorité indépendante de la communication audiovisuelle (Haica), qui doit donner son avis sur les nominations dans l’audiovisuel public.
Les 2 démissionnaires disent avoir agi « pour des raisons de principe et pour leur conviction que cette méthode de « limoger et nommer »ne va pas de pair avec le processus de réforme du secteur de l’information du point de vue général, et l’information publique en particulier ». Par ailleurs, ils craignent que la porte soit ainsi ouverte « au pouvoir exécutif pour maîtriser les nominations et détruire la liberté d’expression et l’information qui sont un acquis obtenu grâce à la révolution ».
Pour sa part, la Haica a dénoncé le « déni de son rôle de régulation ». Le président de cette instance, Nouri Lajmi, critique le limogeage du Pdg de l’Ett, car certes la décision revient administrativement à la présidence du gouvernement, mais ce limogeage intervient suite à une faute professionnelle dont le traitement est du ressort de la Haica, seule apte à déterminer la gravité des faits et la sanction qui s’impose. Nouri Lajmi a conclu que la décision du chef du gouvernement est hâtée et sévère.
En janvier 2014, la Haica, qui n’avait pas été associée par le gouvernement, avait refusé de valider les nominations à la tête de l’Etablissement de radio et l’Etablissement de télévision. Le gouvernement avait finalement fait marche-arrière.
Assongmo Necdem
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