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Pr Jacques François Mavoungou : « Au Gabon comme dans la sous-région, la filière manioc est menacée par les maladies »

  • Date de création: 18 septembre 2021 09:58

(Agence Ecofin) - Des chercheurs de l’université de Galway (NUIG) et du Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad) ont publié fin juillet 2021 une étude qui met en exergue les modes de propagation des maladies du manioc à l’instar de la mosaïque du manioc. C’est une maladie virale. D’après l’étude, la propagation des maladies du manioc est favorisée par les échanges de boutures entre populations frontalières et l’utilisation ou la réutilisation des boutures infectées par les producteurs. 

Dans cet entretien accordé au Nouveau Gabon, Pr Jacques François Mavoungou, directeur pays du programme de recherche Wave (West and Central african virus epidemiology), revient sur les maladies du manioc et leur impact sur les rendements et la sécurité alimentaire.

Le nouveau Gabon : Une étude récemment réalisée par des chercheurs de l’université de et du Cirad met en lumière les maladies du manioc. Quel commentaire vous suscite cette étude et ses conclusions ?

Jacques François Mavoungou: Au Gabon comme dans la sous-région, la filière manioc est menacée par les maladies qui détruisent les plantations. Les champs de manioc au Gabon sont aussi infectés comme le souligne l’article. Les collègues du CIRAD ont travaillé sur la distribution de la diversité du manioc au Gabon suivant le lignage (système de parenté) à travers les mariages. Nous, au niveau du programme de recherche Wave (West and central african virus epidemiology), nous avons fait une étude épidémiologique à caractère transversal à travers tout le Gabon qui révèle une incidence de quasiment 100% pour la mosaïque du manioc (cassava mosaic disease, CMD) par exemple, qui est une maladie virale qui s’attaque aux champs de manioc.

Mais au sujet de l’évolution des maladies, bien au-delà des systèmes de diffusion à travers les mariages (comme le mentionne l’article publié par les collègues du Cirad), les introductions et multiplication de matériels par le biais des projets, les échanges de boutures entre populations frontalières et l’utilisation ou la réutilisation des boutures infectées par les producteurs pour renouveler leurs champs, constituent de nos jours les modes de propagation les plus répandus. La méconnaissance des symptômes des maladies par les producteurs et l’inexistence d’un système semencier fiable ont été identifiés à l’issu de notre étude comme facteurs problématiques du secteur.

LNG : Ces maladies du manioc sont-elles une menace pour la sécurité alimentaire au Gabon. Si oui, pourquoi ?

JFM : La maladie de la mosaïque du manioc et la maladie de la striure brune du manioc (cassava brown streak disease, CBSD) sont les deux maladies virales les plus dévastatrices du manioc en Afrique. Ces maladies virales peuvent entraîner des pertes de rendement pouvant aller jusqu’à 90% ou 100% (pour le cas de la striure brune) et des désastres socio-économiques énormes. Nos travaux de laboratoires ont déjà identifié la présence au Gabon des deux souches les plus répandues de la mosaïque (ACMV et EACMV) et les co-infections provoquées simultanément par deux. Signalons que les co-infections engendrent les formes les plus sévères chez les plantes et diminuent considérablement le rendement. Or considérant l’importance alimentaire et socioéconomique pour les populations, les dégâts causés par ces maladies constituent une véritable menace pour la sécurité alimentaire. L’étude menée par l’équipe Wave Gabon au niveau de toutes les provinces du pays a confirmé la présence de la mosaïque du manioc répandue dans toutes les plantations avec une incidence et une sévérité élevées. Cette virose se propage principalement par l’utilisation des boutures infectées. Et si rien n’est fait les baisses de rendements vont accentuer le déficit et peuvent engendrer de véritables problèmes d’alimentation pour les populations.

A ce stade, nous tenons tout de même à préciser que sur le terrain, nous n’avons pas observé les symptômes de la striure brune du manioc (CBSD). Et au laboratoire, nous n’avons pas détecté les virus de la CBSD. Suivant nos résultats (qui seront bientôt publiés), nous pouvons dire qu’à l’heure actuelle, nous n’avons pas la signature de la présence de CBSD au Gabon.

C’est pourquoi, nous devons maintenir les efforts d’échantillonnage et de suivi de la dynamique épidémiologique des virus du manioc dans notre pays.

Dans le cadre des activités du programme Wave et sous le Leadership du ministre de l’Agriculture, le Gabon à l’instar des autres pays membres du programme Wave (Cameroun, Benin, RDC, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Nigeria, Ghana, Togo, Sierra Léone...) a élaboré le plan national de riposte contre les maladies virales du manioc. Ce plan national s’intègre dans le plan régional.

pr jacques francois mavoungou 1

LNG : Le Gabon est un grand consommateur de manioc. Quelle est la quantité de manioc produite dans le pays?

JFM : Le manioc est l’aliment de base de plus de 800 millions de personnes dans les zones tropicales dont 500 millions en Afrique. Au Gabon, il est consommé par plus de 80% de la population. Environ 159 kg/habitant/an dans les années 2010, cette consommation est estimée de nos jours à plus de 180 kg/habitant/an. A ce titre, il est considéré comme l’une des cultures stratégiques pour la relance du secteur agricole au Gabon, car il procure de nombreux revenus aux petits producteurs et assure leur sécurité alimentaire. Le Gabon importe plus de 90.000 tonnes de manioc par an pour combler le déficit par rapport à la demande.

LNG : Qu’est ce qui est fait par les autorités gabonaises ainsi que les acteurs de la filière pour combattre ces maladies ?

JFM : Le gouvernement a entamé plusieurs initiatives pour booster le secteur agricole. Il ambitionne, ainsi, de réduire de moitié, à l’horizon 2025, les importations alimentaires dont le manioc. Actuellement le ministère en charge de l’Agriculture à travers diverses initiatives dont l’appui du FIDA (Fonds international de développement agricole) et du TAAT (Technologies for African agricultural transformation) de la Banque africaine de développement (BAD), a lancé la mise en place d’environ 20 hectares de champs semenciers pour mettre à la disposition des producteurs d’ici 2022, des milliers de boutures saines dans les différentes provinces du pays.

Au niveau de la recherche et particulièrement avec le programme Wave et sous la houlette du ministère en charge de l’Agriculture, nous avons réalisé une étude épidémiologique, c’est-à-dire nous avons réalisés des prospections transversales à l’échelle nationale et donc dans les 9 provinces du Gabon. Ce travail de recherche s’est intéressé aux maladies virales du manioc ainsi qu’à l’état des lieux de la filière manioc dans toutes les provinces. Au cours de cette étude, il était question de rechercher les symptômes de la CMD et ceux de la CBSD au Gabon, d’évaluer l’incidence et la sévérité de ces pathologies (la CMD et CBSD) du manioc au Gabon, ainsi que l’incidence des mouches blanches vectrices de ces virus, et de déterminer les différentes sources d’infection de la CMD rencontrées au Gabon. Pour ce faire, le diagnostic phytosanitaire de la maladie et le comptage direct des mouches blanches ont été menés dans les zones de production du manioc au Gabon. Cette recherche au plan national a permis d'avoir une cartographie nationale de la distribution des maladies virales du manioc au Gabon. On connait l'incidence de la maladie dans les différentes zones. Les producteurs et agent du ministère de l’Agriculture rencontrés lors des prospections ont été sensibilisés. Nous avons fait la collection de toutes les accessions cultivées au Gabon que nous avons conservées sur nos sites d’expérimentations. Les travaux sur la caractérisation des différents cultivars rencontrés sont en cours. Au laboratoire les travaux d’identification par les techniques de biologie moléculaire sont en cours. Parallèlement le programme Wave, toujours sous la houlette du ministère en charge de l’Agriculture a mis en place un plan de riposte contre les maladies virales du manioc, pour la surveillance épidémiologique comme nous l’avions dit plus haut.

Sur le plan juridique, plusieurs textes ont été élaborés en faveur de la mise en place d’un écosystème agricole prospère. Comme vous le savez, l’agriculture doit être soutenue par une recherche capable de donner des réponses adéquates, d’accompagner les producteurs. A ce propos, le ministère en charge de l’Agriculture a mis en place avec l’appui de la Fondation Bill et Melinda Gates un laboratoire de diagnostic moléculaire des pathogènes qui menacent la culture du manioc et bien sûr d’autres spéculations.

Un laboratoire d’analyse alimentaire va bientôt ouvrir les portes dans les jours qui viennent. Le laboratoire d’analyse des sols et celui des analyses vétérinaires pour booster la production animale sont en cours d’installation sur le même site à Avorbam. Ce complexe des laboratoires est une plateforme technique qui appuiera la production agricole dans notre pays.

Pour revenir sur le cas spécifique du manioc, nous sommes aussi en phase d’étude pour la mise en place d’un autre laboratoire de culture in vitro pour accélérer la production du matériel sains à travers les techniques modernes de vitro plants. Le gouvernement à travers le ministère de l’Agriculture apporte un appui total à la mise en œuvre de toutes les initiatives.

Propos recueillis par Sandrine Gaingne


 
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