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Pourquoi  la pénétration d’Internet évolue peu malgré le déploiement d’infrastructures ?

  • Date de création: 09 février 2013 04:56

(Agence Ecofin) - Luc Missidimbazi, coordonnateur national du projet Central African Backbone en République du Congo-Brazzaville, estime que le déploiement d’infrastructures ne suffira pas à développer l’usage d’Inernet en Afrique. D’autres mesures sont impératives pour pour permettre à l’Afrique de tirer un réel profit des TIC.

L’an passé, à la même époque, vous annonciez 30 millions de dollars pour renforcer l’accès à Internet au Congo. Qu’en est-il aujourd’hui ?

Luc Missidimbazi : L’an dernier à cette période, nous lancions le projet d’interconnexion sous-région cofinancé par les Etats et la Banque mondiale, Central African Backbone (CAB) composante Congo, pour une exécution sur cinq ans. Aujourd’hui, les objectifs de la première année, à savoir fixer un cadre institutionnel et mener des études pour réaliser puis de superviser et évaluer les réalisations, sont quasiment atteints. Nous entamons la suite.

Par renforcement de l’accès à Internet, nous entendions la disponibilité des infrastructures, des prix raisonnables à la connexion pour les internautes, le développement des technologies d’accès qui permettent d’avoir des débits raisonnables et surtout la gestion équitable et compétitive des réseaux. Aujourd’hui, il est clair que le déploiement des infrastructures est réel. Le Congo, depuis le 10 mai 2010, est connecté au système à fibres optiques sous-marin (WACS). Au niveau de l’infrastructure nationale (PCN) les travaux de déploiement sont en cours. Au niveau technologique, plusieurs opérateurs de téléphonie mobile, en plus d’obtenir des licences pour les réseaux de 3e génération, ont déployé des réseaux métropolitains en fibres optiques.

En même temps, on constate que le taux de pénétration d’Internet, dans mon pays comme en Afrique, n’a pas vraiment évolué malgré le déploiement massif des infrastructures, principalement causé par les prix qui n’ont toujours pas baissé, car la connexion Internet reste fortement dépendante du satellite qui propose le 1Mbts à plus de 3000$ quand il est 1000 fois moins cher sous d’autres cieux et principalement par manque d’offres de service Internet soigneusement conçues pour les besoins nationaux ou parfois internationaux. Le Projet CAB vise à considérablement baisser les prix et donner un accès au plus grand nombre.

Contrairement au téléphone mobile, l’Internet est encore peu répandu en Afrique. La pénétration des smartphones va-t-elle changer la donne ?

LM : Malheureusement, en fin d’année 2012 on constate que le taux de pénétration d’Internet reste très faible. Les chiffres parlent d’eux-mêmes seuls 0,5% de la population se connecte à Internet en Afrique, malgré le nombre croissant (plus de 15 en Afrique) de câbles sous-marins, avec un taux de pénétration moyen de 13% en 2012 (InternetWorldStats). Les réseaux nationaux (Backbone et métropolitain) sont pourtant déployés en masse. A cela, il faut ajouter le nombre croissant de terminaux (tablette, laptop ou smartphone) qui devrait faciliter l’accès à Internet.

Malgré ces multiples investissements des Etats et des opérateurs privés dans les infrastructures de transports des données. On constate, malgré tout, deux choses : premièrement, les prix à l’accès ne sont toujours élevés. Au Congo, en moyenne une heure de connexion coûte 1000 fcfa, la connexion directe à 128 ko à plus de 100 000 fcfa. Avec la 3G, on espère une baisse. Deuxièmement, le manque d’offre de services et de contenu. Jusqu’à présent, l’usage est fait pour des données concentrées en Occident et pour des services pas encore déployés en Afrique. Par exemple, le faible niveau de bancarisation des citoyens freine le développement des services commerciaux, la non structuration d’un politique de e-gouvernement ne favorise pas le développement des services administratifs et la dématérialisation …

On peut constater que l’infrastructure, bien qu’elle soit présente n’influe pas seule sur le taux de pénétration. La baisse considérable des prix et une politique favorisant le développement des services Internet qui augmentera le taux de pénétration, sont donc indispensables. Sur ce dernier point, l’entreprenariat des jeunes et les incubateurs sont des pistes à développer pour appuyer le développement d’Internet en Afrique.

C’est ainsi que nous avons réalisé, en 2012, des études pour l’établissement de technopoles et d’incubateurs, le tout reposant sur un Plan national de haut-débit qui sera intégré dans la version révisée de la cyber-stratégie nationale.

Voyez-vous un risque de fracture numérique en Afrique entre les villes qui accéderont plus rapidement à l’Internet, et les campagnes ?

LM : Effectivement le risque est grand, la fracture existe même déjà dans certains cas. Il suffit de voir la couverture nationale en réseau de communication. Les villes les plus denses sont mieux couvertes que d’autres. Il y a encore des zones blanches en matière de couverture. Mais cela pose le problème de l’accès pour certains secteurs comme la santé, l’éducation, le transport … qui sont des secteurs consommateurs de nouveaux services dans les localités moins couvertes.

A cette fracture, je suis persuadé que la décentralisation de l’administration centrale dans certains pays peut aider au développement du numérique local. Les localités peuvent mettre en place des mécanismes publics-privés à la hauteur de leurs besoins et de leurs capacités pour développer Internet. Le cas des délégations de services publics en France est un exemple à étudier. Des PME peuvent émerger en créant des services pour la collectivité.

Le projet CAB, ensemble avec l’ARPCE, a lancé les travaux de développement de PPP dans les localités carrefour du réseau sous-régional.

Quelles politiques publiques faudrait-il adopter pour développer véritablement l’usage d’Internet en Afrique ?

LM : Il faut dire que les Etats africains, particulièrement au Congo, ont investi beaucoup d’argent pour les infrastructures. Cet investissement montrent bien l’intérêt des dirigeants du secteur public pour Internet. Cependant cela ne suffit pas, l’action publique dans ce domaine est exigeante et complexe. Il faut construire un mécanisme solide qui, à mon sens, tournerait principalement autour des axes suivants :

  • L’implication du secteur privé dans la construction et la gestion des réseaux en fibres optiques ;
  • Le développement des contenus locaux et de l’entreprenariat des jeunes. Les incubateurs doivent se développer et être accompagnés par de structures comme les technopoles ;
  • Le prix des capacités qui restent toujours assez élevés, à cela la question des taxes et redevances doit aussi faire l’objet d’une profonde analyse ;
  • La gestion des infrastructures en mode partenariat public-privé (PPP) doit être approfondie, d’une part pour garantir la souveraineté des infrastructures, généralement financées par des Etats, et d’autre part pour garantir une gestion équitable et un apport d’expertise ;
  • L’adaptation des textes réglementaires aux contextes locaux, afin de faciliter le développement des mécanismes nouveaux de gestion et de partage ;
  • Le renforcement de l’usage du numérique dans les formations académiques. Le numérique doit être au centre de l’éducation dans les écoles, lycées et universités du continent. Les mécanismes d’introduction doivent être analysés et examinés avec les experts du secteur ;
  • Surtout la restructuration profonde des sociétés nationales (opérateurs historiques) souvent indexées d’être un frein au développement du numérique car leur gestion reste éloignée des standards internationaux et des exigences du marché du numérique qui se veut neutre et non discriminatoire.

Quel rôle devraient jour les opérateurs téléphoniques dans ce développement ?

LM : En plus de jouer le rôle standard qu’exige le métier de la téléphonie, lié à la qualité et à la disponibilité du service, ils ont un rôle important dans la baisse des prix, en les rapprochant des coûts. Aussi, il va falloir que les opérateurs diversifient les services de données compatibles aux activités socio-économiques sur le territoire. Les opérateurs doivent, ensemble avec les créateurs de contenus, développer les dispositifs pour créer, contenir et accéder aux données locales.

Des centres locaux de recherches, sous forme de cluster numérique, sont donc nécessaires pour apporter l’innovation tant attendue pour le développement d’Internet. Très souvent, les grands opérateurs ne soutiennent pas ce type d’initiative et préfère jouer solo.

Que faut-il attendre des agences de régulation dans ce développement ?

LM : Par rapport à Internet, beaucoup d’agence de régulation disposent des textes organiques qui concentrent leur mission sur des services voix. La révision doit être envisagée pour aborder les problématiques liées aux plateformes IP. Par exemple, l’interconnexion dépend des réseaux voix ce qui donne l’analyse des catalogues d’interconnexions et conduit à déterminer les marchés pertinents ou les opérateurs dominants. Ce principe ne marche pas avec Internet qui est basé sur du pur routage de paquet. Les agences de régulation ne disposent donc pas toujours des outils pour réguler le secteur d’Internet. Les services nouveaux, qui faciliteront l’usage d’Internet, utilisent des plateformes de routage (packet IP) et du stockage des données. Pour être plus efficace, les agences de régulation doivent s’adapter. Mais je dirais que c’est aussi une question qui concerne le réglementaire.

Les agences de régulation, au-delà des missions classiques, doivent impulser les changements et l’innovation, en accompagnant les structures de gestion des plateformes Internet (gestion de ccTLD, gestion des point d’échange Internet, des conditions de stockage de données…).

L’ARPCE accompagne l’ACNIC en charge du ccTLD « .cg » et du CGIX (point d’échange Internet), dont les études et les équipements ont été financés par le projet CAB en 2012.

L’Afrique a beaucoup innové dans l’usage du téléphone mobile. Pensez-vous qu’elle innovera également dans celui d’Internet et, auquel cas, dans quelle direction ?

LM : Je ne pense pas qu’il y ait eu de grandes innovations technologiques africaines en matière de téléphonie mobile, mais qu’il y a eu, à la grande surprise de tout le monde, un engouement inattendu sur le mobile, qui a vite intégré le quotidien de tout le monde et qui a permis d’atteindre des taux de pénétration supérieurs à 90%. S’il s’agit de ce type d’innovation, je pense que oui, Internet va connaître cet engouement, rien que par les services commerciaux ou encore administratifs, mais il y a du chemin à parcourir, la rapidité ne sera peut-être pas la même que celle de la téléphonie mobile.

D’un point de vue purement « innovation technologique », on est tous fiers, moi le premier, de Vérone Mankou au Congo, qui a conçu la première tablette africaine et ainsi qu’un smartphone. Cette ingéniosité africaine est vite rattrapée par la réalité économique d’Internet qui est assez complexe, imprévisible et paradoxale : ce n’est pas la solution technique qui permet le développement économique et social, mais l’usage qui en est fait.

A mon sens l’Afrique n’a pas suffisamment accompagné cette ingéniosité, pour en faire un produit phare africain, on s’est limité à parler de l’exploit du jeune, ce qui s’explique par l’absence d’identification d’un service précis. Peut-être que si un service bien précis avait soutenu cette créativité cela aurait permis de transposer l’ensemble de cette découverte à travers le monde. On découvre là, l’exigence du marché du high-tech qui ne favorise pas la consommation de produits africains mais le besoin de trouver des solutions aux usages existants. La stratégie marketing et culturelle est un volet important pour que l’innovation africaine, dans ce domaine, impacte le tissu économique de l’Afrique.

Le projet CAB publiera dans bientôt le rapport pour accompagner l’innovation en matière du numérique au Congo afin de développer l’innovation au Congo et en Afrique.

Propos recueillis par Dominique Flaux pour le magazine Réseau Télécom Network No 59



 
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