(Agence Ecofin) - Dans le secteur agricole, le changement climatique est une problématique majeure pour l’ensemble des filières. À l’échelle mondiale, toutes les productions sont affectées, des céréales aux oléagineux en passant par les fruits et légumes.
À l’avenir, l’industrie mondiale de la banane fera de plus en plus face à des vents contraires dans la perspective d’un développement du marché du fruit tropical. C’est ce qu’indique un nouveau rapport publié en mars dernier par l’Institut international pour le développement durable (IISD).
À l’échelle globale, la banane est le fruit le plus produit, exporté et consommé, contribuant à la sécurité alimentaire et nutritionnelle de plus 400 millions de personnes. Son offre a atteint 120 millions de tonnes en 2020 et son commerce déjà valorisé à 25 milliards $ devrait encore croître à un rythme de 4,5 % par an entre 2022 et 2027.
Si du côté de la consommation, la tendance à la hausse devrait aussi se confirmer, force est de constater d’après les auteurs que les nuages s’accumulent à l’horizon. En effet, estiment-ils, la production de bananes est de plus en plus fragilisée par le changement climatique qui représente le défi le plus important pour la chaîne de valeur mondiale.
Selon les prévisions, l’augmentation de la fréquence des évènements extrêmes comme les sécheresses, les ouragans ainsi que les inondations devrait de plus en plus affecter les exploitants tandis que la hausse des températures pourrait réduire les superficies propices à la culture sous les tropiques de près de 100 millions d’hectares d’ici 2050.
À plus court terme, le groupe de réflexion estime que le phénomène pourrait conduire à une prolifération plus rapide des ravageurs et des maladies à commencer par la race tropicale 4 (TR4) de la maladie de Panama ou fusariose du bananier.
Cette pathologie fait peser une menace existentielle sur la filière qui ne repose que sur une seule variété : la Cavendish. Cette espèce compte pour la quasi-totalité des échanges et 50 % de la production malgré l’existence d’un catalogue de plus de 1 000 variétés du fruit à travers le monde.
Selon le rapport, le principal risque à l’avenir est que la Cavendish subisse le même sort que la défunte variété « Gros Michel » effacée par la TR4 en Amérique Centrale et du Sud, en l’absence de mesures de lutte efficace dans un contexte de faiblesse de la diversité génétique qui rend déjà la plante naturellement vulnérable aux nuisibles.
Déjà signalée au Pérou (premier exportateur mondial de bananes biologiques) en avril 2021, la TR4 pourrait s’étendre à long terme d’après les auteurs à 67 % des zones de production aux Philippines, second exportateur mondial derrière l’Équateur.
La durabilité comme réponse aux défis du secteur
Face au changement climatique, l’IISD estime que le secteur de la banane gagnerait à prendre le virage de la durabilité afin non seulement de s’adapter aux contraintes du phénomène, mais aussi de tirer l’opportunité de repenser l’ensemble du système.
Dans plusieurs pays fournisseurs comme l’Équateur et la République dominicaine, les agriculteurs ont déjà pris la mesure des enjeux en adoptant des pratiques agroécologiques comme la culture simultanée de bananes et de café dans les champs.
Selon le think-tank, le développement des normes volontaires de durabilité (voluntary sustainability standards/VSS) dans l’industrie peut aussi être un véritable atout. Ces critères établis par plusieurs ONG comme Organic, Fairtrade et Rainforest Alliance exigent que les producteurs adoptent une gestion intégrée des nuisibles limitant l’usage des pesticides et interdisant les engrais chimiques dans la production de bananes certifiées durables.
Si ces pratiques peuvent bousculer les exploitants dans leurs habitudes, l’IISD estime que les normes VSS peuvent avoir des impacts positifs pour le climat et la biodiversité et ouvrent la porte à un marché d’écoulement qui devrait croître à l’avenir.
Selon l’organisation, la demande de banane VSS devrait s’accélérer dans les prochaines années notamment en Europe et en Amérique du Nord avec la sensibilisation accrue des consommateurs aux questions de durabilité des produits et d’achats responsables.
Espoir Olodo
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UMA Fairs Ground, Kampala, Ouganda.