(Agence Ecofin) - Le riz est la céréale majeure dont les échanges mondiaux sont les plus faibles. Cette situation qui tient au fait que les principaux producteurs de la denrée en sont aussi les plus gros consommateurs rend le marché très sensible aux politiques commerciales en Asie, le foyer de l’offre.
En 2022, l’Inde enverra moins de riz sur le marché global. Selon B.V. Krishna Rao, président de la Rice Exporters Association (TREA), les exportations de la céréale sont attendues en baisse de près de 5 millions de tonnes d’ici la fin de l’année fiscale 2022/2023 en mars prochain en raison des restrictions imposées par New Delhi.
Le pays asiatique, second producteur mondial de la graminée a en effet interdit depuis le 9 septembre dernier, les expéditions de riz brisé 100 % et imposé un droit de 20 % sur les ventes de différentes qualités du produit (riz non-basmati, riz paddy, riz complet, riz non étuvé).
Il s’agit de la première mesure de limitation du commerce extérieur du riz de l’Inde depuis la fin en 2011, de l’interdiction portant sur l’exportation du riz non basmati ayant duré trois ans. Cette démarche s’explique par la volonté des autorités d’améliorer l’approvisionnement domestique après des pluies de mousson inférieures à la moyenne enregistrées dans les principaux Etats producteurs tels que le Bengale-Occidental, le Bihar et l’Uttar Pradesh.
Il faut aussi noter que la mesure est l’une des conséquences de la forte demande du riz brisé 100 % de la part de la Chine. Le pays qui avait été déjà en 2021, le premier acheteur mondial de riz brisé avec 1,1 million de tonnes en 2021 a accru ses importations depuis quelques mois pour satisfaire les besoins de l’alimentation du bétail sur fond de sécheresse.
Globalement, à la faveur du recul anticipé, les exportations de riz de l’Inde devraient atteindre au total 16,2 millions de tonnes durant l’actuel exercice contre le record de 21,5 millions de tonnes écoulées durant l’année fiscale 2021/2022.
Les restrictions de l’Inde, une aubaine pour l’alliance Thaïlande-Vietnam…
Cette décision de l’Inde qui compte pour plus de 40 % des expéditions mondiales de riz est un coup de pouce formidable pour le duo Thaïlande-Vietnam qui travaille depuis peu à faire augmenter les prix de vente de la céréale sur le marché.
Avec les droits de douane qui effritent la compétitivité du riz indien, les deux pays qui pèsent pour le quart du commerce mondial de la céréale peuvent désormais profiter d’une hausse de prix qui découlera à la rareté de l’offre indienne. Ceux-ci pourraient même grappiller quelques parts de marché en proposant la céréale à un prix plus avantageux aux clients traditionnels de l’Inde.
La Thaïlande est particulièrement bien positionnée d’autant plus que le pays anticipe une hausse de 500 000 tonnes de ses exportations de riz à 7,5 millions de tonnes avec la faiblesse de sa monnaie locale (baht) et une bonne récolte.
….Et un casse-tête pour plusieurs pays africains
Sur le continent africain, où 40 % du riz consommé provient des importations, la décision de l’Inde fait naître des inquiétudes dans la mesure où le pays asiatique est le premier fournisseur de ce marché. Dans la zone, les importations de riz dépassent les 14 millions de tonnes par an depuis 2018 pour plus de 7 milliards $.
Pour l’essentiel, les effets de la mesure à l’échelle de chaque pays dépendront du niveau des stocks, de l’état de dépendance vis-à-vis de l’approvisionnement indien ou de la durée de la restriction. Déjà, plusieurs observateurs soulignent que le Sénégal sera l’un des pays où la prohibition à l’export pour le riz 100 % brisé sera la plus scrutée.
En effet, dans la seconde économie de l’UEMOA, 98 % du riz importé est du riz brisé pas cher qui entre dans la composition du plat national « Thiéboudiène ». Cette variété est préférée par les consommateurs parfois au détriment du riz blanc entier produit localement qui est écoulé en partie vers la Guinée-Bissau, le Mali, la Gambie et la Mauritanie.
En 2021/2022, l’Inde a fourni 55 % des importations sénégalaises de riz devant la Thaïlande (22 %), le Brésil (12 %) et la Chine (4 %), selon les données de Trade Data Monitor (TDM). En dehors du Sénégal, la Côte d’Ivoire est aussi une destination clé pour le riz indien en Afrique de l’Ouest. La nation éburnéenne a importé en 2020, plus de 550 000 tonnes de riz en provenance du pays asiatique, soit 45 % du total de ses achats de la céréale.
Dans la sous-région, principale zone importation de la céréale, le Ghana est l’un des rares pays où le Vietnam domine l’approvisionnement extérieur comptant en 2021 pour 63 % des achats totaux
Espoir Olodo
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