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257 milliards $ d’investissements annuels dans l’agriculture africaine sont nécessaires pour atteindre la « faim zéro » (AGRA)

  • Date de création: 15 septembre 2022 10:03

(Agence Ecofin) - Alors que l’agriculture africaine demeure largement pluviale et familiale, l'expansion des surfaces cultivables constitue actuellement le principal facteur de croissance de la production alimentaire.  

L’Afrique a besoin de 257 milliards de dollars d’investissements supplémentaires dans le secteur de l’agriculture par an pour assurer la résilience de ses systèmes alimentaires et atteindre l’objectif de la « faim zéro » d'ici 2030, selon un rapport publié le 6 septembre 2022 par l'Alliance pour une révolution verte en Afrique (AGRA).

« Pour transformer les systèmes alimentaires en Afrique, des ressources financières importantes doivent être mobilisées. L’ampleur des investissements supplémentaires nécessaires est considérable, allant d'une estimation de 77 milliards de dollars par an pour le secteur public jusqu'à 180 milliards de dollars pour le secteur privé », souligne le rapport intitulé « Rapport sur la situation de l'agriculture en Afrique 2022 : Accélérer la transformation des systèmes alimentaires africains ».

Le rapport rappelle que l’agriculture familiale à petite échelle, pluviale et caractérisée par une faible adoption des technologies est encore dominante en Afrique, ce qui constitue une « menace majeure » pour les systèmes alimentaires du continent.

La facture des importations alimentaires de l’ensemble des pays africains est d’ailleurs estimée à plus de 50 milliards de dollars par an, alors que le continent est la région où la prévalence de la faim est la plus élevée au monde, avec 278 millions de personnes touchées en 2021, selon la FAO.

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L’agriculture africaine est d’autre part très vulnérable au changement climatique et à son corollaire de phénomènes météorologiques extrêmes comme les sécheresses anormalement longues, les inondations inédites, les fortes tempêtes et les feux de forêt difficilement contrôlables.

« Etant donné que 90 % de la population rurale de l'Afrique subsaharienne dépend de l'agriculture comme principale source de revenus et que plus de 95 % de l'agriculture est tributaire des précipitations, les conséquences de l'imprévisibilité des précipitations, de l'augmentation des températures, de la sécheresse extrême et de la faible teneur en carbone des sols réduiront davantage les rendements agricoles, exposant ainsi les communautés les plus pauvres à des risques climatiques et hydriques de plus en plus intenses, et aux conséquences désastreuses », note le rapport.

Les caractéristiques de l’agriculture africaine renforcent la dépendance excessive du continent à l'égard de l'expansion des surfaces cultivables comme principale source de croissance de la production alimentaire, ce qui aggrave la déforestation, la destruction de l'environnement et la perte de la biodiversité.

Diversifier les sources de financement

Le rapport de l’AGRA estime cependant que l’Afrique est parfaitement capable d’atteindre le deuxième objectif de développement durable (ODD2), qui consiste à éliminer la faim, assurer la sécurité alimentaire, améliorer la nutrition et promouvoir l'agriculture durable, en mobilisant les investissements nécessaires à la transformation de son agriculture.

Jusqu’ici, l’écrasante majorité des pays africains n'ont pas encore atteint le niveau financement recommandé par le Programme détaillé de développement de l'agriculture africaine (PDDAA), conçu dans le cadre du Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD), en l’occurrence l’affectation 10% au moins de leur budget au financement du développement de l’agriculture.  Ce niveau de financement peut être atteint grâce à une combinaison d’investissements publics et privés.

Si la majeure partie des fonds nécessaires pour la transformation des systèmes alimentaires devrait provenir du secteur privé, les ressources du secteur public sont essentielles pour financer l’environnement d’infrastructures indispensables, la recherche & développement (R&D) et les institutions chargées de piloter les politiques agricoles.

Les donateurs et les institutions de financement du développement (IFD) ont également un rôle spécifique à jouer, qui consiste à fournir des ressources pour financer les prestataires de services financiers axés sur les PME agricoles, notamment les banques commerciales, les banques publiques de développement, les institutions de microfinance et les coopératives.

Les mécanismes de partage des risques et les systèmes de garantie des prêts pourraient également servir de puissants leviers à la mobilisation des investissements privés.

Les solutions de financement innovantes comme les mécanismes le financement de la chaîne d'approvisionnement par le biais de solutions numériques et le financement mixte (NB : une approche visant à structurer des ententes d'investissement qui utilisent des fonds publics et philanthropiques pour mobiliser et recueillir davantage de capitaux privés) sont également nécessaires pour diversifier les sources de financement de l’agriculture africaine.

« Au rythme actuel, il est très peu probable que l'Afrique puisse mettre fin à la faim d'ici 2025, conformément au PDDAA, ni d'ici 2030, comme le prévoient les objectifs de développement durable des Nations unies. Mais s'il y a un engagement et un investissement délibéré dans l'agriculture aujourd'hui, l’histoire pourrait changer d'ici trois ans », résume Ed Mabaya, professeur à l'Université Cornell (Etats-Unis), l'un des auteurs du rapport.