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France: pourquoi la circulaire Guéant est un suicide économique

  • jeudi, 09 février 2012 09:36

Après les Roms, le ministre de l'Intérieur français Claude Guéant traque aujourd’hui les jeunes diplômés étrangers avec sa circulaire du 31 mai 2011. Un texte qui inquiète le patronat français.

«Certaines entreprises ne souhaitent plus recruter d’étudiants étrangers comme moi car elles sont conscientes des difficultés qu’il y aura derrière pour changer le statut d’étudiant à salarié». Engagé en France comme consultant chez OPEN, une société de conseil informatique, Bienvenu est toujours en attente de sa carte de séjour. Engouffré dans une procédure «longue, pénible et humiliante», ce jeune Camerounais est victime comme près d’un millier d’autres étudiants étrangers en France de la désormais célèbre circulaire Guéant.

Publiée le 31 mai 2011 à l’initiative du ministre de l’Intérieur Claude Guéant, cette circulaire restreint drastiquement la possibilité pour les étudiants étrangers d’obtenir un statut de salarié après leurs études.

Le malaise des entreprises

Ainsi, du jour au lendemain, des étudiants qui ont été recrutés par des entreprises françaises se retrouvent forcés d’abandonner leur poste après le refus de la préfecture de changer leur statut. Un choc pour ces jeunes qui ont passé plusieurs années à construire leur avenir professionnel dans ce pays. Un choc, aussi, pour les entreprises qui les ont accueillis.

«Nous formons durant plusieurs mois une personne qu’on nous interdit ensuite de recruter pour satisfaire à une logique de préférence nationale», explique sous couvert d’anonymat une chargée de recrutement dans une société de services informatique.

«Une logique de préférence nationale» à laquelle certaines entreprises se contraignent, à l’image d’Arnaud Lievin, directeur d’une société parisienne. Dans une lettre ouverte adressée au Premier ministre François Fillon, il affirme avoir dû licencier une de ses collègues à cause de la circulaire Guéant et que désormais il ne recrutera plus «d’étudiants étrangers en école d’ingénieurs, puisque les changements de statut sont refusés».

Il ajoute qu’il ne va «certainement plus recruter d’étranger en situation régulière, puisque la prochaine étape sera de refuser les renouvellements de permis de travail» et que comme il doit recruter, il sera contraint «de collaborer et d’appliquer cette préférence nationale avant l’heure».

Certains des étudiants interrogés nous l’ont également confirmé.

«Pendant les entretiens d’embauche, dès que j’annonçais mon statut, le regard de mon interlocuteur changeait comme s’il venait de perdre son temps», soutient Quentin, ingénieur calcul en aéronautique d’origine congolaise.

Il faut dire que pour garder un étudiant étranger, il faut s’armer de patience. «On doit parfois ralentir ou suspendre notre activité pour se concentrer sur les dossiers des futurs recrues, où on demande à l’employeur de fournir de nombreuses pièces justificatives très précises, des documents qui peuvent être longs à réunir, ajoute notre chargée de recrutement. Sans compter qu’une fois le dossier envoyé, l’attente d’une réponse est très longue (plusieurs mois, ndlr), trop longue, et on ne peut pas se permettre de garder un poste vacant trop longtemps.» Et si la demande est rejetée, retour à la case départ!

Fuite des cerveaux

Les entreprises victimes de cette circulaire s’inquiètent aussi car parmi les jeunes hautement qualifiés déboutés, certains vont voir ailleurs. Et notamment au Canada, où ils sont très courtisés, en particulier s’ils sont bilingues français-anglais. Ce qui peut se révéler désastreux en matière de concurrence et de rayonnement sur le plan international. D’autant plus que la France est, comme d’autres pays, victime de la fuite de cerveaux.

Pour l’organisation patronale Medef (Mouvement des entreprises de France), qui «suit de très près le dossier», la circulaire Guéant menace donc «l’attractivité des entreprises et leur compétitivité». «Ces jeunes sont très demandés. Ils sont sur des postes souvent à haute responsabilité à l’international, où on a besoin de ces talents particuliers, de ces nationalités», ajoute-il, mettant en garde contre le risque de perdre ces étudiants au profit des autres pays. Un risque réel.

«Mon profil intéresse d’autres pays c’est pourquoi, j’ai sérieusement envisagé de partir à l’étranger, au Canada ou en Allemagne, ou alors de rentrer chez moi au Maroc étant donné l’humiliation que me fait subir l’administration française malgré un parcours d’excellence. Je pense être mieux accueilli là-bas qu’ici», souligne Karima, consultante en monétique dans une grande banque française et en attente du grand sésame.

Bienvenu a aussi envisagé cette option:

«Si les conditions administratives ne me permettent pas de rester ici je vais aller ailleurs, certainement au Canada où l’accueil des étrangers est meilleur et l’intégration plus facile d’après les témoignages que j’ai reçus. Pourtant avant, en aucune façon j’aurais envisagé de changer de pays car je trouvais que ça aurait été hypocrite de ma part vu que j’ai été formé par la France. Il me semblait juste que ce soit elle qui profite en premier de mes compétences et de mon expérience».

Face à la mobilisation suscitée par sa circulaire, Claude Guéant a finalement décidé de publier une circulaire complémentaire signée le 12 janvier. Elle «invite les préfets à faire en sorte que la nécessaire maîtrise de l’immigration professionnelle ne se fasse pas au détriment des besoins de certaines de nos entreprises en compétences spécifiques de haut niveau».

Le texte revient en arrière sur certains points. Ainsi, les étudiants étrangers qui peuvent justifier d'un niveau master ou équivalent bénéficient de nouveau d'une autorisation provisoire de séjour (APS) de six mois, à compter de la date du jury du diplôme concerné.

Il introduit même une nouveauté, à la demande des milieux universitaires et des grandes écoles. Désormais, un titre de séjour est accordé à l'étudiant étranger qui décroche un emploi ou une promesse d'embauche «avant la délivrance de son diplôme».

Reste que malgré ces retouches, nombreux sont encore ceux qui réclament un retrait pur et simple.

Mise à jour du 8 février: A l'Assemblée nationale, le 7 février, le député de la Martinique Serge Latchimy, apparenté PS, a assimilé les récentes déclarations de Claude Guéant au régime nazi, provoquant une nouvelle polémique.

 

Par Vitraulle Mboungou pour SlateAfrique.com

www.slateafrique.com/82341/france-immigration-travail-circulaire-gueant-etudiants-etrangers

 

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