(Agence Ecofin) - L’année 2014 a démarré sur des chapeaux de roues pour les opérateurs des télécommunications installés au Nigeria. Au mois de février 2014, les sociétés MTN, Glo et Airtel ont écopéchacune d’une amende pour mauvaise qualitéde service enregistrée durant le mois de janvier. MTN et Airtel ont payéchacun185 millions de nairas (1,1 million de dollars) tandis que Glo a versé277,5 millions de nairas (1,6 million de dollars), soit une somme globale de 647,5 millions de nairas (3,9 millions de dollars). Seul Etisalat s’en est bien tiré. Les sanctions, le régulateur télécom en a toujours fait usage pour rappeler aux opérateurs télécoms leurs obligations envers les consommateurs au Nigeria. Et elles n’ont pas toujours portéque sur la mauvaise qualitéde services. Suite àla violation de l’interdiction de promotion et loterie par mobile dont les consommateurs avaient dénoncéle trop-plein, le 8 novembre 2012, MTN, Etisalat, Airtel et Glo avait étécondamnés àverser respectivement une amende de dix millions, six millions, quatre millions et deux millions de nairas au Trésor public.
Dans la gestion du secteur national des télécom, la NCC s’est toujours montrée intraitable envers les opérateurs fautifs. Malgréles actions mises en place pour susciter l’amélioration des services, notamment la portabilitédes numéros mobiles, les choses ne se sont pas améliorées pour autant. Les plaintes des consommateurs sont demeurées face aux prestations mitigées des services de télécommunications. La NCC, outrée, a alors décidél’année dernière de croître en sévéritéet a instaurédes indicateurs clés de performance dans le secteur. Omobola Johnson, la ministre des Technologies de l’Information et de la Communication, avait expliquéen décembre dernier que ces outils permettraient de jauger chaque mois la qualitédes prestations offertes aux abonnés. En cas d’insatisfaction, les fautifs seraient punis et pourraient même àla longue perdre leur licence. Ironie du sort, cette possible recrudescence des sanctions contre les telcos a suscitéune réaction protectrice des abonnés, pourtant mécontents de la qualitéde service des opérateurs.
Des abonnés conscients
Saluant le dynamisme du régulateur àdéfendre leurs intérêts, les consommateurs, par la voix de Deolu Ogunbanjo, le président de l’Association nationale des abonnés télécom (NATCOMS), a indiquéque les peines financières ne sont pas les mieux indiquées pour punir les telcos. Elles fragilisent leur portefeuille et par conséquent leur potentiel d’investissement. « Imposer plus d’amendes n’est pas dans le meilleur intérêt des firmes télécoms ou des abonnés. Au final, la NCC perçoit l’argent et les abonnés qui souffrent des problèmes pour lesquels les sanctions ont étéservies ne gagnent rien du tout », souligneDeolu Ogunbanjo, qui préconise àla place des peines pécuniaires des retraits temporaires de licence et des peines d’emprisonnement. Avant de recourir àces peines très sévères, la NATCOMS penche déjàpour des peines légères qui profiteraient aux consommateurs. « Nous croyons que les amendes légères sont meilleures que de verser de l’argent au régulateur. Il peut être décidéque chaque opérateur dédommagera chacun de ses abonnés àhauteur de 5000 nairas de crédit de communications. Si les problèmes de service persistent, cette somme pourrait monter à10000 nairas. Si le problème ne trouve toujours pas résolution, la NCC pourrait alors aller plus loin dans ses sanctions. »
Opérateurs indignés
Pour l’Association des opérateurs télécoms détenteurs de licences télécom au Nigeria (ALTON), les actions du régulateur sont contre-productives. Dans une interview accordée en février dernier au journal The Guardian, Gbenga Adebayo, son président, déclarait: « Comment la NCC peut-elle penser que pénaliser les opérateurs va supprimer le problème ? La question que nous devrions leur poser c'est: “Est ce que les dernières sanctions ont résolu le problème ?” Si elle continue de cette façon, le défi sera toujours là. Je l'ai dit avant, il n'existe pas d'industrie qui est àl'abri de l'échec. Les fonds que les opérateurs auraient utilisés pour stabiliser davantage le réseau, ils sont emportés par les sanctions. Ils sont en train de tuer cette industrie. »Qu’en est-il alors des pertes financières générées par la mauvaise qualitéde service au Nigeria?
Le manque à gagner
En 2013, l’entreprise Back-Up Networks Ltd a dévoiléque les Nigérians perdent près de 6,4 millions de dollars chaque jour àcause de la mauvaise qualitéde services téléphoniques. L’étude qu’elle a menée sur l’impact financier de cette situation avait étéprésentée par Monday Ogbe, le président directeur général de Back-Up Networks. Il expliquait qu’avec seulement 10 minutes de mauvaise qualitéde service, les pertes financières cumulées sont faramineuses. « Pour 100 millions d’abonnés qui font l’expérience d’une mauvaise qualitéde service pendant 10 minutes, avec une moyenne de perte de 10 nairas chacun (0,06 dollar), la perte nette cumulée est de 1 milliard de nairas (6,4 millions de dollars) par jour ». Au cours d’une année qui comprend 365 jours, Back-Up Networks Limited estime la perte totale nette cumulée des consommateurs du mobile àprès de 730 milliards de nairas en général (près de 4,6 milliards de dollars). Une perte qui aurait des incidences sur le cash flow du pays, d’après Monday Ogbe.
Par Muriel Edjo pour Réseau Télécom No 71
Palais du Pharo, Marseille, France - Explorer, Investir, Réussir.