(Agence Ecofin) - Deutsche Bank, BPCE, Société Générale, BNP Paribas, Crédit Agricole, Barclays sont les derniers établissements bancaires à s’être fait épingler cette année pour leurs activités de « spéculation sur la faim ».
« Un marché fonctionne bien quand les activités commerciales représentent 70% et la spéculation, 30%. Or, aujourd’hui, nous vivons exactement la situation inverse », avait alerté Michael Greenberger, professeur de droit de l’Université du Maryland, en avril dernier. Plus en amont, en octobre 2011, le président du groupe Nestlé joignait sa voix à celles des agences onusiennes pour alerter le monde sur les risques croissants d’un retour aux émeutes de la faim.
Ainsi, petit à petit, l’indignation a fait son chemin, la crainte du désordre également, et les plus grandes banques ont fini par reculer. Pourtant, depuis le début de cette année 2013, plusieurs grands établissements se sont tout de même distingués par leur âpreté au gain, coûte que coûte.
En janvier dernier, Ilse Aigner, ministre allemande de l’Agriculture, sortait de ses gonds et interpellait la Deutsche Bank : « La Deutsche Bank a manifestement échoué à reconnaître les signes des temps ! » déclarait-elle au quotidien Handelsblatt. « Je m’attends à ce qu’une ligne claire soit établie entre les investissements responsables, utiles dans la lutte contre la faim, et les transactions qui pourraient augmenter les fluctuations des prix mondiaux. Prés de 900 millions de personnes dans le monde souffrent de la faim, ceux qui ne font aucune distinction font preuve d'un manque de sentiments et agissent de façon irresponsable ».
Quelques jours plus tard, Antony Jenkins, directeur exécutif de la Barclays, annonçait la décision de sa banque de se retirer des activités de trading avec les hedge funds sur les matières premières agricoles pour des « raisons de réputation ». Accusée de spéculer sur des produits aussi importants que les céréales et autres produits alimentaires de base, la banque britannique a finalement jeté l’éponge.
Le 12 février dernier, Oxfam publiait un rapport peu glorieux pour quatre banques françaises, intitulé : « Ces banques françaises qui spéculent sur la faim ». Selon l’ONG, fin 2012, BNP Paribas, BPCE (via Natixis), Société générale et Crédit Agricole géraient encore dix-huit fonds spéculant sur les matières premières. « Il y a deux façons de spéculer. En prenant des positions sur les marchés de produits dérivés de matières agricoles. Ou par ces fonds indiciels, qui suivent les prix des matières premières agricoles et les poussent à la hausse », expliquait Clara Jamart, responsable de la sécurité alimentaire chez Oxfam France.
Le retour de manivelle se prépare peut-être : d’une part la taxe sur les transactions financières permettra de réduire la rentabilité des activités spéculatives, et d’autre part, de nombreuses voix s’élèvent pour que le produit de cette taxe soit affecté en partie au financement du développement : « La TTF permettrait de réduire les flux de capitaux qui alimentent la spéculation, entraînent une instabilité des prix et causent des ravages au droit à l'alimentation dans le monde entier.» déclarait récemment Cephas Lumina, Rapporteur spécial à l’ONU sur la dette extérieure et les droits de l'homme.
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Abidjan, Côte d'Ivoire. Une plateforme de mise en relation entre les entreprises allemandes et leurs homologues de l’Afrique francophone.