(Agence Ecofin) - « L’histoire du Rwanda jamais contée », voilà traduit le titre du documentaire intitulé « Rwanda’s untold story ». Il a été réalisé puis diffusé le 1er octobre 2014 par la BBC, la chaîne de télévision britannique. Depuis, la polémique ne cesse d’enfler, même si le gouvernement rwandais n’a pas encore réagi officiellement.
Mais déjà ses relais ont pris les devants. Il s’agit d’un documentaire « extrêmement biaisé », pense l’ambassadeur rwandais en Grande-Bretagne, Williams Nkurunziza, à qui la BBC a donné la parole. Il y a également la sortie de Ibuka, un regroupement d’associations de rescapés du génocide de 1994, proches du régime de Kigali. Une lettre a été adressée à la BBC qui est appelée à arrêter la diffusion d’un documentaire qui nie la réalité du génocide.
Pourtant, un autre son de cloche se fait entendre : celui des partis politiques rwandais d'opposition, des organisations de la société civile et des Rwandais de l’étranger. Une lettre a également été adressée à la chaîne britannique. Parmi les signataires, il y a le Congrès national du Rwanda (RNC) de Patrick Karegeya, l'ex-chef des renseignements rwandais retrouvé assassiné dans un hôtel en Afrique du Sud le 1er janvier 2014. « La communauté rwandaise en Angleterre, représentée dans ses différentes composantes, partis politiques, associations de rescapés, militants des droits de l'homme, remercie la BBC pour avoir ouvert le débat sur ce qui s'est passé durant le génocide et dans les vingt ans qui ont suivi »,lit-on sur le site de l'organisation Global Campaign for Rwandan Human Rights (GCRHR), dirigée par l'activiste René Mugenzi, en exil.
Les détracteurs du documentaire reprochent à cette production de donner la parole uniquement à ceux qui imputent la responsabilité du génocide à l’actuel président rwandais, Paul Kagame. L'ancien chef d'Etat major de ce dernier, Kayumba Nyamwasa, affirme carrément que son ex-patron fut le commanditaire de l’attentat contre l’avion du défunt président Juvénal Habyarimana, un crime commis en connaissance des conséquences qui allaient suivre. La journaliste de la BBC, Jane Corbin, qui a posé sa voix dans le documentaire, explique que toutes les personnes mises en cause, dont Paul Kagame, ont été sollicitées pour réagir, en vain.
Le documentaire va plus loin en interviewant deux chercheurs américains, Christian Davenport et Allan C. Stam, qui trouvent exagéré le million de morts avancé par le gouvernement rwandais. Et s’il y a eu tant de victimes, celles-ci seraient en majorité des Hutus (800 000) et non l’inverse, tel que retenu officiellement, ajoutent-ils. Hors du Rwanda, l’ancien Premier ministre britannique, Tony Blair, l’Onu et les Etats-Unis sont accusés d’avoir protégé jusqu’ici les véritables coupables du génocide.
La voix de la BBC est arrivée par le biais d’un de ses porte-paroles qui réfute l’idée selon laquelle le documentaire serait négationniste. Il précise que la chaîne de télé se réserve le droit de répondre à Ibuka. Un militant rwandais des droits de l'Homme ironise en ces termes : « Tout le long du documentaire, les auteurs disent que toute personne qui remet en cause l'histoire officielle est accusée d'être négationniste. »
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