(Agence Ecofin) - La gouvernement du Maroc travaille à la mise en place d'un nouveau cadre de régulation de la solvabilité dans le secteur des assurances. Il s'agit du projet de Solvabilité Basée sur les Risques.
Si le projet venait à entrer en vigueur, la marge de solvabilité des sociétés d'assurance et de réassurance marocaines devra prendre en compte l’ensemble de leurs activités et des risques qu’elles encourent, à savoir le risque de souscription, le risque opérationnel, la politique d’investissement, les risques de marché, les risques de concentration ou de contrepartie.
Un axe mis sur la transparence des sociétés d’assurance
L'autre aspect de cette réforme réside dans les exigence qualitatives, qui visent le renforcement des systèmes de gouvernance des entreprises d’assurances et de réassurance et leur maitrise des risques à travers notamment des systèmes performants d’audit, de contrôle interne et de gestion des risques.
Enfin, il sera question pour le secteur d'améliorer la communication financière des sociétés de ce secteur. Elle devra être plus pertinente, intègre et fiable. L’objectif est de promouvoir la transparence financière à des fins de communication et de contrôle. Avec cette nouvelle règlementation, la régulation du secteur des assurances au Maroc devrait se hisser au niveau des nouveaux standard.
Rappelons que selon le rapport de stabilité financière publié récemment par la banque centrale marocaine (Bank Al Maghrib), la marge de solvabilité, en couverture du risque de souscription, a augmenté en fin décembre 2016 à 449% contre 408% en 2015. Toutefois, avec le passage au régime de la solvabilité basée sur les risques, certains acteurs du secteur seront contraints de se recapitaliser.
Une adaptation des filiales de la zone CIMA ne serait pas appropriée
Cette dynamique pose le défi de l'expansion des sociétés d'assurances marocaines sur le continent africain, notamment dans la partie régulée par le code de la Conférence InterAfricaine des marchés d'Assurance (CIMA).
Si on exclut Saham Assurance dont la maison mère, Saham Finance, est passée sous le contrôle du sud-africain Sanlam, les assureurs Royale Marocaine d'Assurance (RMA qui a acquis Beneficial Life Insurance Company) et Wafa Assurance, présent en Côte d'Ivoire et au Sénégal, devront faire face à ces enjeux de régulation.
L’autre groupe financier marocain présent dans les assurances en Afrique est le groupe Banque Centrale Populaire, via sa filiale Atlantique Finance Group. Mais il n’est pas précisé si la réforme sera imposée à ce type de groupe financier.
La zone CIMA met en œuvre depuis quelques temps, deux mesures nouvelle dans la régulation du secteur. L'une concerne l'augmentation du capital social des sociétés qui y opèrent, et qui doit atteindre 5 milliards de FCFA.
L'autre est la limitation des transferts de primes à des réassureurs étrangers, qui augmentera le chiffre d'affaires potentiel du marché de la réassurance, mais contraindra les entreprises de ce secteur à adapter leurs fonds propres.
Face à la fragilité des acteurs locaux, la question a été posée de comprendre s'il est possible que la nouvelle dynamique dans la régulation des assurances au Maroc, entraîne des adaptations dans les pays d'Afrique subsaharienne où le Royaume est un partenaire important. Selon des experts de Finactu, un groupe spécialisé en Afrique sur le conseil stratégique et financier, notamment dans le domaine des assurances, cela ne risque pas d'arriver sur le moyen terme.
« Les règles de solvabilité dites « Solvency II », sont extrêmement complètes, en ce qu’elles tiennent compte des risques techniques, financiers, opérationnels. Mais il faut avoir conscience que plus ces contraintes de solvabilité sont fortes, et plus elles sont complexes, donc coûteuses à implémenter par les compagnies : elles mobilisent beaucoup de monde, consomment énormément de données, imposent des adaptations informatiques très onéreuses. Les imposer aux compagnies de l’espace CIMA serait à la fois inutile et dangereux », ont-ils fait savoir.
Un effet à suivre sur le marché marocain
En attendant de voir comment cela transformerait l'expansion en Afrique subsaharienne des sociétés marocaines d'assurance, il faudra déjà suivre les premiers impacts sur le marché marocain. En 2016, les performances ont été positives, même si la hausse de 15,4% des primes globalement collectées, à 35,1 milliards de Dirhams marocaine est le fait d'une progression exceptionnelle du segment vie, suite à l'entrée en activité d'un nouvel acteur.
Cette évolution est d'autant plus intéressante à suivre, que le marché des assurances dans ce pays d'Afrique du nord offre des opportunités de croissance. Compte tenu du faible taux de pénétration de l’assurance par rapport à d’autres pays (3,6% contre 8,8% pour les pays de l’OCDE), le potentiel de développement demeure important. Par conséquent, les analystes de Bank Al Maghrib estiment que le risque d’une baisse importante du chiffre d’affaires des différentes catégories d’assurances est à écarter, même avec l’arrivé d’une nouvelle régulation.
Idriss Linge
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