Le directeur exécutif International, Afrique, Moyen-Orient & Asie d'Orange explique sa stratégie et ses objectifs sur le continent africain.
Vous n'êtes pas présent en Afrique du Sud, le pays qui connaît la plus forte croissance du continent africain. Pourquoi ?
Nous sommes présents partout à travers Orange Business Services, mais nous ne sommes opérateurs que dans 20 pays, avec près de 70 millions de clients à ce jour. L'Afrique, c'est 54 pays et 54 réglementations, et c'est souvent assez compliqué pour un opérateur. De plus, dans la plupart des pays, il y a déjà entre deux et cinq opérateurs, voire plus. L'Afrique du Sud est un marché très pénétré, à plus de 100%, avec trois opérateurs dominants.
Quels pays vous intéressent ?
Le Groupe n'a pas l'habitude de faire des effets d'annonces en la matière. Il existe assez peu de « green fields » à prendre, de nouvelles licences à décrocher qui nécessiteraient de développer de nouveaux réseaux. Le monde de la voix et du SMS est très simple, et tout le monde peut y opérer. Mais celui de l'Internet, de la data mobile et du contenu est beaucoup plus compliqué et est plus facilement accessible à des grands groupes avec une puissance de feu considérable et disposant de labos. Sur le continent africain, Orange est souvent le premier employeur ou contribuable d'un pays, mais cela reste petit à l'échelle de France Telecom-Orange. L'accord qui nous a permis de distribuer l'iPhone en Afrique par exemple, est un des atouts d'un groupe mondial comme Orange.
Quels sont vos objectifs pour Orange Money ?
C'est une de nos fiertés. A Africacom (le principal salon africain des opérateurs télécoms), on ne parle que des « VAS » (value added services), mais 95% de notre chiffre d'affaires se fait sur la voix et le SMS. Demain sera aussi fait de nouveaux services -le chat, l'accès à Facebook... -, mais pour le plus grand nombre, ce sera demain. Cela dit, parmi tous ces nouveaux services, il y en a un particulièrement prometteur, c'est le paiement mobile, qui va atteindre plusieurs dizaines de millions d'utilisateurs. Nous sommes dans un continent très faiblement bancarisé, entre 3 et 7% pour la plupart des pays. Pourtant, les gens ont besoin de d'échanger de l'argent, de toucher un salaire, de payer des factures d'électricité, de recevoir de l'argent de l'extérieur, de bénéficier du microcrédit. En dehors de M-pesa, nous sommes leaders en Afrique, et nous allons bientôt franchir la barre des 3 millions d'utilisateurs. De toute façon, c'est une révolution, un tsunami : la vague n'est pas encore sur nous mais le rouleau est en train de se former.
Parmi les nouveaux services très populaires en Afrique, on parle aussi beaucoup du top-up, très présent en Côte d'Ivoire. De quoi s'agit-il ?
Si vous voulez recharger votre mobile en prépayé, vous allez voir un revendeur dans la rue qui a acheté du crédit dans une boutique Orange. Vous lui donnez 500 francs CFA, et il compose sur son mobile #123# puis votre numéro et la valeur du crédit, et le crédit est transféré. C'est juste magique. Souvent, l'Afrique des télécoms apprend de ses collègues européens, mais parfois, l'Europe pourrait apprendre des solutions innovantes qui sont inventées ici.
François Bourboulon
Rédacteur en chef numérique Les Echos