(Agence Ecofin) - La réussite de l’eurobond de 2,6 milliards $ de la Côte d'Ivoire a surpris avec un taux très favorable de 6,61%. Elle attire l'attention du monde financier sur ce petit marché national considéré comme spéculatif par les agences de notation. Elle révèle une dynamique mondiale plus imprévisible que jamais, et peut-être de nouvelles opportunités pour des émetteurs souverains africains.
La réussite par la Côte d'Ivoire de son eurobond de 2,6 milliards $ sur le marché international des capitaux a capté l'attention mondiale. Rappelons que l’opération a non seulement généré des souscriptions atteignant 8 milliards de dollars, mais elle a également établi un taux d'intérêt moyen final de 6,61%, selon les informations communiquées par le ministère des Finances de la Côte d'Ivoire.
Ce taux proposé par les investisseurs se rapproche de celui des obligations à 10 ans du gouvernement américain, actuellement autour de 4,25%. Or, les États-Unis jouissent d'une notation triple A, tandis que la Côte d'Ivoire, à l'instar de nombreux pays africains, est classée dans la catégorie des émetteurs spéculatifs.
Un expert, qui a choisi de rester anonyme en raison de restrictions professionnelles, a partagé ces observations lors des Rencontres du Marché des Titres Publics qui se déroulaient à Cotonou. L'intérêt pour les obligations souveraines de ce pays considéré comme spéculatif peut être attribué à plusieurs facteurs.
Récemment, il a été annoncé que l'Égypte sera retirée dès février 2024 de l'indice des obligations de pays émergents de JP Morgan. Il n’est pas exclu que cela ait poussé les investisseurs à rechercher des alternatives. Dans ce contexte, la Côte d'Ivoire s'est imposée comme une option viable, notamment en raison de la performance du prix du cacao, sa principale exportation. L'augmentation du prix de ce produit, combinée à une valorisation croissante du dollar par rapport à l'euro - devise à laquelle le FCFA est arrimé par une parité fixe - suggère une amélioration potentielle des revenus pour la Côte d'Ivoire. De plus, la conversion de la nouvelle dette en une devise stable par rapport au FCFA pourrait présenter des avantages économiques.
Un autre aspect pertinent de cette dynamique est l'anticipation des investisseurs européens sur la trajectoire que prendront les taux sur les obligations des Etats membre de l’UE. Malgré des taux directeurs élevés maintenus par la Banque centrale européenne, cette dernière continue de soutenir les économies de la région. Dans ce contexte, les obligations de référence de ses pays membres se situent à des taux allant jusqu'à 3,4% pour les plus élevés et 2,28% pour l'Allemagne. De ce point de vue, les 6,6% de l’eurobond ivoirien deviennent une option attractive, surtout pour un emprunt dénommé en euros.
L'avenir du marché des émissions souveraines d'Afrique subsaharienne, reste cependant incertain. Bien que la réussite de la Côte d'Ivoire puisse inciter à l'optimisme, la réplication de tels succès dans d'autres contextes pourrait s'avérer difficile.
Le Cameroun, par exemple, a reporté pour 2024 une émission de 333,2 millions $ qui était prévue pour la fin de l'année 2023, et le Kenya doit refinancer jusqu'à 2,4 milliards de dollars de dettes internationales en 2024. La situation économique mondiale, en constante évolution, continuera d'influencer les perspectives des marchés africains dans ce secteur.
Nairobi, Kenya - Promoting sustainable economic growth through trade