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Prosper Africa : « Parmi les défis, il y a les histoires négatives que rapportent souvent les médias à propos du continent »

  • Date de création: 25 juillet 2022 16:28

(Agence Ecofin) - Pour améliorer ses relations commerciales avec l’Afrique, les Etats-Unis ont lancé l’initiative Prosper Africa qui est une forme de guichet unique, permettant d’accompagner les investisseurs des deux bords dans la construction de projets communs. Leslie Marbury est la coordinatrice par intérim de cette institution, et a accepté d’échanger en exclusivité avec l’Agence Ecofin

Agence Ecofin : Pouvez-vous nous expliquer ce qu’est le projet « Prosper Africa » ? Nous savons qu’il a été lancé en 2019, mais il semble que dans certains pays africains, notamment ceux d’expression francophone, très peu connaissent cette institution. A quelles attentes répond-elle ?

Leslie Marbury : Prosper Africa est l'initiative du gouvernement américain visant à accroître le commerce et les investissements entre les États-Unis et l'Afrique. Nous travaillons donc en partenariat avec le secteur privé en puisant dans les outils de 17 départements et agences américains pour atteindre trois objectifs : faire avancer les accords, promouvoir les opportunités et renforcer le climat des affaires et de l'investissement. Nous le faisons en tenant compte des priorités africaines et américaines, en vue de créer des emplois et faire progresser la prospérité partagée. Depuis le lancement de l'initiative en 2019, comme vous l'avez mentionné, le gouvernement américain a aidé à conclure 800 accords dans 45 pays pour une valeur estimée à plus de 50 milliards $, et nous poursuivons aujourd'hui sur cette lancée en lançant des outils innovants qui rendent l'accompagnement gouvernemental au secteur privé plus accessible, plus agile et plus compétitif. Nous travaillons aujourd’hui dans la perspective du Sommet des dirigeants africains, qui a été annoncé cette semaine, qui aura lieu du 15 au 13 décembre prochain. 

Agence Ecofin : Un des objectifs de l’initiative, lorsqu’elle a été lancée, était de faire doubler les chiffres du commerce entre les Etats-Unis et l’Afrique, mais à l’évidence cet objectif peine à être atteint, on note même, selon des chiffres du gouvernement américain, que le volume des échanges entre l’Afrique et les USA tend plutôt à baisser. Alors quels sont les défis que vous rencontrez dans la mise en œuvre du projet ?

Leslie Marbury : Avec le projet Prosper Africa nous apportons des réponses à des opportunités, mais aussi à des défis. Pour ce qui est des opportunités, l’Afrique possède certains des marchés à la croissance la plus rapide au monde. Nous trouvons des opportunités dans la population qui est de plus en plus urbaine, connectée numériquement et qui est jeune. 

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« L’Afrique possède certains des marchés à la croissance la plus rapide au monde » 

Nous voyons aussi des défis, comme vous l'avez mentionné. L'un de ces défis sont les histoires négatives que rapportent souvent les médias à propos du continent. Nous entendons sans cesse parler de l’Afrique du désespoir, de la famine, et pas beaucoup de celle de l’innovation et de l’esprit d’entreprise que connaissent bien ceux qui ont passé du temps en Afrique.

« Nous entendons sans cesse parler de l’Afrique du désespoir, de la famine, et pas beaucoup de celle de l’innovation et de l’esprit d’entreprise que connaissent bien ceux qui ont passé du temps en Afrique »

Et puis, évidement, aller de l’avant nécessite de relever les défis que nous rapportent le secteur privé, notamment le manque d’accès au financement, le manque d’assistance technique, et un environnement faible ou beaucoup moins fort que ce que les gens espèrent trouver. Ce sont là trois choses que l’Afrique essaye de résoudre.

Agence Ecofin : Une question plus directe, supposons que je sois une entreprise basée au Benin, où je me trouve actuellement, et que je souhaite profiter des programmes mis en place par le Prosper Africa, comment je procède, quelles sont les étapes, que devrais-je faire, à quelles exigences mon entreprise devrait répondre pour retenir votre attention ?

Leslie Marbury : Une partie de ce que Prosper Africa a réalisé, c’est de mettre en place un guichet unique pour les entreprises et les investisseurs basés en Afrique et aux États-Unis. Nous avons donc mis en place une équipe de conseillers qui travaillent avec les entreprises, les investisseurs et les aident à naviguer dans les divers instruments du gouvernement américain, parmi lesquels on retrouve : notre institution de financement du développement du secteur privé le US DFC ou Exim Bank USA pour ce qui est des aspects financiers, l’USTDA (Agence Américaine pour le Commerce et le Développement) pour ce qui est des études de faisabilité, et le US-Africa Foundation ainsi que l’USAID qui sont sur le terrain pour soutenir les petites et moyennes entreprises à travers le continent. Nous avons mis en place une équipe à Johannesburg, C'est ainsi que nous travaillons.

Agence Ecofin : C’est bien d’avoir une équipe à Johannesburg, mais savez-vous que cette ville se trouve à 9 heures de vol de la Côte d’ivoire, une des économies, sinon l’économie la plus dynamique d’Afrique francophone subsaharienne. Cela m’amène à la question de savoir quels sont vos engagements actuels ou prospectifs sur l’Afrique subsaharienne francophone ?

Leslie Marbury : C’est une bonne question, déjà je veux vous assurer que juste avant le forum des investissement Etats-Unis-Afrique de décembre prochain, une délégation de l’administration américaine d’environ 60 personnes se rendra à Abidjan pour des discussions. 

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« C’est une bonne question, déjà je veux vous rassurer… » 

Nous avons des équipes dans tous les pays et surtout en Afrique de l’Ouest. Nous travaillons dans les coulisses à travers des représentants du département d’Etat, de l’USAID et d’autres agences gouvernementales américaines qui y sont présentes sur le terrain.

« Juste avant le forum des investissement Etats-Unis-Afrique de décembre prochain, une délégation de l’administration américaine d’environ 60 personnes se rendra à Abidjan pour des discussions » 

En parlant d'Afrique de l'Ouest, nous y voyons d'énormes opportunités. Nous voyons un secteur numérique en plein essor avec les fintechs, notamment. Nous avons en février voyagé dans la région pour participer à une rencontre axée sur les économies créatives et c’était très intéressant. A travers son hub des échanges commerciaux en Afrique de l’Ouest, l’USAID travaille dans tous les pays francophones de cette sous-région, sur des co-investissements aux côtés du secteur privé.

Agence Ecofin : Depuis votre création en 2019, est-ce que vous avez des exemples concrets de projets réussis, que vous souhaiteriez partager avec nous ?

Leslie Marbury : Un exemple dont j’aime parler, c’est celui de cette entreprise qui s’appelle Rivers Food, qui travaille depuis longtemps avec des producteurs de noix de cajou. Nous avons vu que les productions étaient directement exportées vers l’Asie, sans aucune valeur ajoutée. Nous sommes intervenus en co-investissant aux cotés de River Foods. Avec l’appui de 3 millions $ du gouvernement américain, ils ont pu mobiliser 47 millions $ supplémentaire pour investir 50 millions $ dans la construction d’une usine de transformation. Ils ajoutent donc de la valeur à ces noix de cajou, créent des emplois en Afrique de l'Ouest et créent de la valeur aux États-Unis, et maintenant ils transforment et exportent vers les États-Unis.

Agence Ecofin : Le monde traverse actuellement une période difficile avec une inflation qui s’est globalisée et d’autres défis. Comment gérez vous ce contexte, quel type de soutien vos partenaires sur le terrain peuvent attendre du projet Prosper Africa ?

Leslie Marbury : C’est une question très importante et c'est certainement le sujet du jour ici à Marrakech (Maroc). Je souhaiterais être concrète. Nous voyons de plus en plus un intérêt de la part des investisseurs institutionnels américains. Ils sont au nombre de cinq, ici dans le forum, et sont intéressés à investir en Afrique. Mais au-delà des rendements financiers, ils souhaitent surtout avoir un impact social et environnemental. Avec eux, il y a deux choses que nous essayons de faire. Nous essayons d’améliorer leurs perceptions du risque, mais aussi de leur permettre de rencontrer des partenaires crédibles sur le terrain. Nous emmenons ces investisseurs sur le continent depuis plusieurs années et un d’entre eux qui participait à ces voyages a pu rencontrer des partenaires en Afrique pour investir 100 millions $ dans les énergies propres dans plusieurs pays de la région. C’est un excellent travail que nous essayons de répliquer à plus grande échelle au sein de Prosper Africa.

« Le but est de trouver des partenaires qui peuvent rapidement relever les défis de l'insécurité alimentaire et de la résilience des systèmes alimentaires sur le continent africain »

Maintenant pour répondre directement à votre question, je voudrais donner un exemple de quelque chose que nous faisons avec l'USAID pour vraiment tirer un avantage des partenariats avec le secteur privé.

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« Nous serions donc ravis de trouver des partenaires prêts à travailler avec nous sur les défis de l'insécurité alimentaire »

Nous avons lancé un programme de subvention des partenariats pour la sécurité et la résilience alimentaire en Afrique. Le but est de trouver des partenaires qui peuvent rapidement relever les défis de l'insécurité alimentaire et de la résilience des systèmes alimentaires sur le continent africain. Nous serions donc ravis de pouvoir trouver des partenaires prêts à travailler avec nous pour relever une partie de ces défis auxquels nous sommes confrontés aujourd’hui. 

Entretien réalisé par Idriss Linge

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