(Ihsane El Kadi, pour Africa Oil Magazine ) - Le troisième appel d’offres d’Alnaft, l’Agence qui gère le domaine minier algérien, a été un échec alarmant. La loi sur les hydrocarbures en vigueur depuis 2006 ne permet plus d’attirer les investisseurs sur l’immense amont pétro-gazier du pays.
L’exploration dans l’amont pétro-gazier algérien ne redémarre pas. Mis entre parenthèse entre 2005 et 2007 pour cause de réforme de la législation pétrolière, l’accès à un domaine réputé sous-exploré n’a pas connu de rush des compagnies étrangères à sa « réouverture » en 2008. Trois appels d’offres ont été lancés depuis juillet 2008 par la nouvelle Alnaft, l’agence en charge du développement du domaine minier algérien. La désaffection des majors est spectaculaire et l’intérêt des compagnies émergentes, refroidi. L’arrivée de Youcef Yousfi à la tête du Ministère de l’énergie et des mines en mai 2010 a laissé croire que la loi de 2005 allait être revue, afin de réhabiliter l’attractivité de l’investissement étranger dans la recherche exploration en Algérie. La « surprise » de cette première année de l’après Khelil aura donc été le maintien d’un cadre légal jugé dissuasif par les investisseurs.
Le 3ème des appels d’offres d’Alnaft a rendu une sentence impitoyable en mars dernier. Dix blocs de recherche étaient proposés par Alnaft, 85 compagnies ont été pré-qualifiés, une quarantaine ont participé aux data rooms. Mais au final deux blocs seulement ont été attribués. Et seulement trois entreprises étrangères ont soumissionné. Sur les deux blocs attribués l’un – le bloc 406 Rhourde Fares dans le bassin de Berkine - le sera au profit de Sonatrach qui, pour la première fois est venu « animer » la compétition, alors que la partie la plus prometteuse du domaine minier national lui est déjà réservée. L’espagnol Cepsa est l’autre bénéficiaire d’un permis de recherche , sur le bloc Rhourde Rouni II dans le bassin de Sbâa. L'indonésienne Pertamina et le groupement algéro émirati, Petrogas-Kougp, recalés, complètent ce maigre tableau des soumissionnaires. Le revers pour Alnaft parait d’autant plus dur que les compagnies qui ont manifesté de l’intérêt pour ce troisième round des appels d’offres ont pour noms Exxon Mobile, Conoco Phillips, BP, Shell, Total, Statoil, Gaz de France , Eon , Eni , Gazprom, Iberdrola ou encore Chevron.
Le représentant d’une de ses grandes compagnies actrice dans le gaz, dans le Sahara algérien, a expliqué la démarche de son entreprise : « Nous avons payé pour voir. Nous avons étudié les données géophysiques des périmètres proposés. Le potentiel ne peut pas être grandiose. Dans un contexte plus attractif, prendre le risque de chercher un petit gisement reste un risque bien encadré. Mais pas avec la fiscalité qui est appliquée à notre activité en Algérie. Notre participation aux premières phases de l’appel d’offres sert aussi à montrer aux autorités algériennes que les partenaires sont là. Il faut juste qu’il y ait une écoute vis-à-vis de nos doléances ».
Une loi « hybride » qui insécurise les investisseurs
Mais quelles sont donc ces doléances des compagnies pétrolières étrangères qui ne soumissionnent plus aux appels d’offres d’Alnaft ? Les taxes qui configurent la fiscalité pétrolière prévue par la loi.
Khemais Drareni, juriste chez Sonatrach dans les années 80, conseiller indépendant décortique l’imbroglio : « La nouvelle fiscalité a été conçue pour la concession, un système avantageux pour le producteur ou la puissance publique récupère, à travers les taxes, des revenus fiscaux et non des parts de pétrole. Mais ce système de la concession n’a pas pu être déployé dans les faits. La loi d’avril 2005 qui l’introduisait a été amendé l’été 2006 et Sonatrach est redevenu partenaire d’office à part égale de tout opérateur étranger ayant découvert du pétrole ou du gaz en Algérie. Il aurait fallu revoir la fiscalité au moment de l’amendement de la loi. Cela n’a pas été fait et nous nous retrouvons avec un dispositif incohérent ou les compagnies étrangères ne seront pas propriétaires concessionnelles des gisements découverts, mais où elles partageront production et investissement avec Sonatrach en payant des taxes calibrées pour un concessionnaire seul sur le gisement ».
Un responsable de chez Statoil (Norvège) avait également expliqué directement à Chakib Khelil en 2009 : « Avec cette fiscalité là les gisements petits et moyens ne sont pas rentables pour l’opérateur. Or en Algérie, il ne reste à découvrir que des petits et moyens gisements ». La taxe sur les super profits introduite par Chakib Khelil en 2007 est venue aggraver le tableau.