(Agence Ecofin) - Jersey avait déjà restitué au Nigeria 267 millions de livres sterling en 2019, issus de la corruption sous le régime du général Sani Abacha. Les banques de l’île britannique, impliquées dans la réception de fonds détournés, pourraient être tenues responsables de recel et possiblement de blanchiment.
Une décision rendue publique le lundi 15 janvier par la Cour Royale de Jersey de saisir près de 8,9 millions $ d’actifs ouvre la possibilité d’une restitution de ces fonds au Nigeria, leur pays d'origine. Cette initiative, enclenchée par le Procureur général dans le cadre de la lutte contre la corruption, s'inscrit dans un effort plus large initié en 2015 par l'ex-président Muhammadu Buhari pour récupérer les actifs spoliés.
La somme en question, déposée en 2014 par des entreprises nigérianes dans une banque locale de Jersey, a été identifiée comme issue de la corruption à la suite d'une enquête minutieuse. Le Procureur général de Jersey, Mark Temple KC, a précisé que ces fonds auraient été détournés par de hauts fonctionnaires nigérians dans des transactions douteuses, notamment pour l'achat d'armes et d'équipements aéronautiques dans la lutte contre Boko Haram.
Mark Temple KC souligne l'efficacité de la loi de 2018 sur la confiscation des biens : « Cette affaire démontre une fois de plus l'efficacité de la loi de 2018 sur la confiscation pour récupérer les produits de la corruption et restituer cet argent aux victimes de crimes. Je compte maintenant négocier un accord de restitution des biens avec la République fédérale du Nigeria ».
Cette affaire n'est pas un cas isolé. En effet, Jersey avait déjà restitué au Nigeria 267 millions de livres sterling en 2019, issus de la corruption sous le régime du général Sani Abacha. Ces fonds, tout comme ceux récemment saisis, seront restitués au Nigeria suivant un protocole similaire, reflétant l'engagement croissant de la communauté internationale dans la lutte contre la corruption et la récupération d'actifs illicites.
La corruption n'est cependant qu'une des sources d'évasion de capitaux hors d'Afrique. Selon des rapports, dont celui de 2020 de la Conférence des Nations Unies pour le commerce et le développement (Cnuced), le continent perdrait chaque année près de 90 milliards de dollars par ces canaux. Outre la corruption, les ressources quittent aussi le continent via des pratiques d'évasion et d’optimisation fiscale, les manipulations des prix dans le commerce international, et un système fiscal mondial encore insuffisamment structuré en faveur des pays en développement.
Dans le cadre de cette saisie, et à l'instar de la procédure précédente, les banques de Jersey impliquées dans la réception de ces fonds pourraient être tenues responsables de recel et possiblement de blanchiment. Selon l'ONG Tax Justice Network, l'élimination de la nébuleuse du crime financier international nécessite des règles efficaces sur la transparence des bénéficiaires effectifs, empêchant les détenteurs d'actifs de se dissimuler et les contraignant à justifier l'origine des ressources qui leur sont attribuées.
Cette nouvelle actualité met en lumière la complexité et l'importance de la coopération internationale dans la récupération des actifs liés à la corruption. Il souligne également le besoin urgent de mesures plus strictes pour assurer la transparence financière et combattre l'évasion fiscale, des éléments clés pour la stabilité économique et la justice sociale en Afrique et dans le monde.
Une initiative lancée par l'Association des universités africaines de télévision (AAU TV).