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Félix Tshisekedi : 5 ans après, le bilan

  • Date de création: 20 décembre 2023 15:52

(Agence Ecofin) - C’est dans la poursuite du programme de son premier quinquennat que le chef de l’Etat sortant de la République démocratique du Congo espère conquérir l’électorat au sortir de l’élection présidentielle de ce 20 décembre, qui se tient simultanément avec les législatives, provinciales et municipales. Élu en 2018, Félix Tshisekedi a permis à la RDC de rebondir économiquement. Mais loin de ce succès, les défis liés à la pacification du pays ou encore l’amélioration de la gouvernance politique et économique, des promesses de campagne, attendent toujours d’être relevés.

De façon générale, les organismes financiers et agences de notation internationales s’accordent à dire que l’économie de la République démocratique du Congo (RDC) s’est améliorée ces 5 dernières années. En proie à l’instabilité politique depuis des décennies, le pays a connu une alternance démocratique pacifique, fin 2018, avec l’arrivée au pouvoir de Félix Tshisekedi (Fatshi) après des années passées dans l’opposition, sous l’ancien régime du président Joseph Kabila. Pour des observateurs de la scène politique et économique, cette alternance pacifique était déjà un indicateur clair que la RDC était prête à amorcer un autre virage.

Selon le Fonds monétaire international (FMI), la croissance du pays a fortement rebondi, passant de 1,7 % en 2020, à 6,2 % en 2021, bien au-dessus des 4,5 % enregistrés par l'Afrique subsaharienne sur la même période. En 2022, la croissance a atteint 8,9% selon l'institution. Cette nette reprise a été tirée par la performance du secteur minier et des services du pays, soit deux ans après l’arrivée au pouvoir du nouveau dirigeant. Pour 2023 et 2024, la Banque africaine de développement (BAD) souligne que les perspectives de la RDC restent bonnes.

Une progression de croissance adossée à une stratégie d’attractivité

Selon la BAD, les projections du taux de croissance de la RDC sont estimées à 8 % en 2023 et 7,2 % en 2024. L’économie devrait être principalement portée par le secteur des industries extractives, qui devrait croître d’au moins 12 % en moyenne entre 2023 et 2024.

Selon la Banque mondiale, en 2022, le PIB par habitant ($ US courants) du pays a atteint 586,5 $ contre 575,9 $ en 2019, grâce aux mesures gouvernementales visant à améliorer le cadre des affaires, à rassurer les investisseurs et à accroître la productivité locale. Le gouvernement va donc accélérer les réformes et mettre l'accent sur la performance macroéconomique, en vue d’asseoir la crédibilité du pays.

L’une des actions phares à ce titre a consisté pour le gouvernement congolais à doter le pays d’un « Plan directeur d’industrialisation », en 2021. D’un coût de 58 milliards $, le plan présenté officiellement aux opérateurs économiques locaux et étrangers vise à atteindre « l'émergence de la RDC d'ici 2030-2040 », avait indiqué le ministre congolais de l'Industrie, Julien Paluku. Pour « libérer le potentiel de croissance et de transformation industrielle du pays », le Plan a divisé la RDC en six zones industrielles, lesquelles seront transformées à l'échéance 2040 « en hubs d'exportation vers les pays voisins », le tout adossé à un plan d’attractivité visant à accroître les investissements privés et stimuler la production locale.

Le 2 septembre 2023, le chef de l’État Félix Tshisekedi a procédé au lancement de la première production industrielle « made in RDC » de la zone économique spéciale pilote de Maluku (ZES de Maluku), près de 3 ans après le lancement des travaux de construction. L'objectif étant d’enclencher le processus de diversification de l'économie de la RDC qui dépend encore en grande partie de la manne minière. La construction de la ZES de Maluku devrait déboucher sur l'implantation d'au moins 30 grandes entreprises et de plusieurs PME tout en attirant davantage d'investissements directs étrangers (IDE). Le projet devrait également entraîner la création de plus de 3000 emplois directs selon les autorités.

Dans son Rapport sur l'investissement dans le monde 2023, la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED) indique qu’en 2022, les IDE mobilisés par la République démocratique du Congo sont restés stables à 1,8 milliard $, soutenus par des flux vers les champs pétroliers offshore et l'exploitation minière. Cela, souligne-t-elle, dans un contexte global de baisse des flux vers l'Afrique entre 2021 et 2022.

Des stratégies sectorielles ciblées

Selon la BAD, cette vitalité de l'économie de la RDC s’explique par le dynamisme de l’industrie extractive qui a crû de 20,8 %, mais aussi par la relance du secteur non extractif qui a gagné 3,2 %, tiré par les services, « malgré la détérioration de la situation sécuritaire dans l’est du pays ».

Nonobstant une demande internationale en forte baisse, du fait de la crise sanitaire de Covid-19, le secteur extractif en RDC s’est montré résilient. Sa valeur ajoutée a progressé de 9,7% en 2020 contre un ralentissement de 1% en 2019. Le secteur extractif a connu une croissance de 9,7% en 2021 alors que les activités hors extraction ont connu une croissance de 4,7% sur la même période. La production de cobalt, de cuivre et de zinc, qui représente 90% des exportations du pays, a été en hausse durant ces trois dernières années, en raison de leur importance dans la transition énergétique.

Parmi les initiatives entreprises dans le but d’accroître l’attrait du pays, les autorités de la RDC ont lancé le Sommet de l'investissement de la RDC, fin juin 2022. L’objectif était d’attirer plus de 10 milliards $ d'investissements en mettant en avant des projets de développement d'infrastructures privées et de partenariats public-privé (PPP).

Dans le secteur de l’agriculture, les autorités ont fait le pari d’investir 6,6 milliards $ sur dix ans dans le cadre du Programme de transformation de l’agriculture (PTA). Pour soutenir ce programme, elles ont tenu un forum sur l’agribusiness début octobre 2023 à Kinshasa, afin de stimuler l’investissement du secteur privé dans les chaînes de valeur agricole. Mais aussi de dynamiser l’agribusiness. À cette occasion, la RDC avait présenté son Pacte national de l’alimentation et de l’agriculture.

Parallèlement, dans le but d’accéder aux marchés du reste du continent et de renforcer son rôle dans l’intégration continentale, la RDC a ratifié, début 2022, l’Accord de libre-échange continental africain (ZLECAf). En mars de la même année, le pays a également rejoint la Communauté d'Afrique de l'Est (EAC) en tant que septième membre, élargissant ainsi sa portée dans le cadre de ce bloc commercial.

D’autres secteurs tels que le transport, la santé, l'accès à l’eau et l'électricité et l’entrepreneuriat ont été également pris en compte dans cette dynamique de développement. Au cours de l’année précédente, le gouvernement congolais a contracté au total neuf engagements extérieurs d’une valeur globale de plus de 1,3 milliard $ qui ont été orientés vers ces secteurs.

Cette frénésie d’investissement a induit une progression du stock de la dette extérieure de près de 6 points de pourcentage entre 2019 et 2022. Cependant, selon le FMI, la RDC présente un risque modéré de surendettement,.

Relever les défis de l’éducation

A son arrivée au pouvoir, Félix Tshisekedi a fait le pari de la croissance inclusive par la mise en valeur du capital humain.

« Notre système éducatif doit être en phase avec nos grands défis économiques et humains. Nous devons offrir une meilleure formation technique et professionnelle à notre jeunesse pour faire de notre pays un solide pôle d’attractivité et d’implémentation technologique [...] Conformément à notre constitution, la gratuité de l’enseignement fondamental doit être une réalité. Nous allons veiller à améliorer les conditions des enseignants du primaire, secondaire et universitaire », avait-t-il déclaré dans son discours d’investiture, le 24 janvier 2019.

Ainsi, dès les premières heures de son mandat, il poursuit la mise en œuvre de la politique de gratuité de l’enseignement primaire déjà en vigueur, en faisant d’elle l’une de ses priorités alors que le pays fait face à de profondes inégalités en matière d’accès à l’éducation. Le taux de scolarisation dans le pays est fortement influencé par la situation de conflit qui persiste dans l’est du pays depuis plus de 25 ans, contribuant ainsi à accroître le niveau de précarité dans les communautés rurales. La région orientale, faut-il le rappeler, est profondément marquée par les enlèvements, le recrutement forcé d'enfants-soldats, le travail des enfants dans les mines, l'usage du viol de masse comme arme de guerre et les déplacements de populations.

D’après des chiffres de la Banque mondiale, le gouvernement Tshisekedi a augmenté la part de l'éducation dans son budget voté, de 11,6 % en 2017 à 21,8 % en 2021. Dans le même sillage, l’institution note avec satisfaction les efforts consentis par le gouvernement pour améliorer l’accès du plus grand nombre aux ressources éducatives. « Le ministère de l’Éducation a développé des manuels de lecture et des guides d’enseignant dans quatre langues nationales pour les premières années et est en train de les distribuer à toutes les écoles primaires du pays – une première pour le pays et un pas dans la bonne direction vers la réduction de la pauvreté des apprentissages [...] Tout ce qui précède témoigne que le leadership et les initiatives politiques audacieuses qui ont un impact tangible sur le capital humain sont possibles en RDC. C’est aussi un signal précoce important que - malgré les défis – la RDC peut ! », s’est-elle réjouie.

Des zones d’ombre importantes

Malgré ces bonnes performances, le bilan de Fatshi reste marqué par l'incapacité de ses différents gouvernements à résorber la crise sécuritaire et à inverser de manière significative la pauvreté. Dans l’est de la RD Congo, le climat sécuritaire continue de se détériorer, exacerbé par les actions de plusieurs groupes armés, malgré les premières mesures prises par le chef de l'État pour y mettre fin. Arrivé au pouvoir début 2019, Félix Tshisekedi proclame, en mai 2021, « l'état de siège » dans les provinces du Nord-Kivu et de l'Ituri. A cet effet, il remplace l'administration civile par des responsables militaires et policiers sans que cela n’entraîne des résultats probants. Le 31 octobre 2023, l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) a dénombré 6,9 millions de déplacés internes, soit un « record jamais enregistré ».

En matière de lutte contre la corruption, alors qu’il en avait fait son principal thème de campagne, Félix Tshisekedi est accusé par ses opposants et des acteurs de la société civile, d’avoir échoué en raison des scandales impliquant des membres du gouvernement, sous le coup d’accusations de détournement de fonds. On peut notamment citer l’enquête Congo Hold-up éclaboussant le clan de l’ancien président Joseph Kabila avec qui une entente de cogestion du pouvoir avait été établie. Mais également d’autres affaires impliquant les proches de Tshisekedi lui-même, qui seront finalement soit acquittés, soit libérés provisoirement. Selon l’indice de corruption de Transparency international, la RD Congo est dans le rouge, avec un score qui n’a que trop peu évolué entre 2019 et 2021, occupant ainsi le 169e rang mondial sur 180 pays.

Cerise sur le gâteau, selon le dernier classement de l’Indice Mo Ibrahim sur la bonne gouvernance, publié en 2021, la RDC se positionne au 49e rang parmi 54 pays.

Sur le plan infrastructurel, de la fourniture de l’électricité et de l’accès à l’eau potable, très peu d'avancées ont été enregistrées. A titre illustratif, le taux d’accès à au moins un point d’eau de base n’est que de 14% en zone rurale en 2022, contre 59% en milieu urbain. L'accès à au moins un assainissement de base n’est garanti que pour 11% de la population vivant en zone rurale contre 22% pour les citadins. Avec l’un des taux d’électrification les plus faibles du globe, la disponibilité de l’énergie représente toujours un enjeu capital dans le pays, alors que le gouvernement a annoncé vouloir porter le taux d’électrification national à 32 % d’ici 2030 contre environ 15 % en 2023.

Dans le pays, la pauvreté est restée prépondérante, y compris dans les zones urbaines. Malgré les réformes engagées, une large partie de la population est encore exclue des bénéfices générés par les ressources minières. En Afrique subsaharienne, la RDC est le deuxième pays après le Nigeria, en ce qui concerne le nombre de personnes extrêmement pauvres. Selon la Banque mondiale, le pays est classé parmi les cinq nations les plus pauvres au monde. En 2022, environ 62 % de la population vit avec moins de 2,15 dollars par jour, et près d'un habitant sur six en situation d'extrême pauvreté en Afrique subsaharienne réside en République démocratique du Congo.

Charlène N’dimon et Victoria Sedji 


 
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