(Agence Ecofin) - Entre les « fraudes en matière de passation de marchés et les projets non viables », Kenya Power est au bord de l’effondrement. En pleine restructuration, le fournisseur d’électricité compte tirer profit du contexte mondial de décarbonation, pour se refaire une santé financière.
Kenya Power envisage de déployer des bornes de recharge publiques pour voitures électriques (VE), sur tout le territoire kényan. L’ambition affichée par le fournisseur d’électricité, en dévoilant ses plans, vendredi 3 décembre, lors de l'assemblée générale annuelle de l'entreprise, est de tirer profit du marché naissant des véhicules électriques.
L’entreprise a également révélé être en discussions avec le gouvernement afin de réduire les taxes sur l’importation des VE et de l’équipement pour la construction de bornes de recharge.
« Nous prévoyons de mettre en place des installations de recharge dans tout le pays et nous utiliserons nos ateliers existants pour fournir des services après-vente tels que l'assistance mécanique », a déclaré Rosemary Oduor, PDG par intérim de Kenya Power, aux actionnaires de la compagnie. « L'opportunité présentée par les VE est suffisamment importante pour être un moteur de progression pour l'entreprise », poursuit-elle.
Si Kenya Power atteint ses objectifs, elle lèverait deux obstacles universels à l’achat de VE, que sont leur prix rédhibitoire ainsi que la disponibilité d’infrastructures de recharge. S’y ajoute, dans le cas de l’Afrique, un approvisionnement électrique erratique.
Une mauvaise santé financière
Précédé sur le marché des VE par le producteur d’électricité, Kengen, Kenya Power amorce ce nouveau virage lesté du poids des années d'une gestion calamiteuse qui a plombé la trésorerie de la compagnie. Outre les « fraudes en matière de passation de marchés et les projets non viables » qui ont mené l’entreprise au bord du gouffre, selon sa présidente Vivienne Yeda, le dernier rapport de l’auditeur général Nancy Gathunga a mis au jour des processus de contrôle faibles qui représentent des risques pour l'entreprise.
« Nous devons faire table rase du passé en élaborant des normes, des spécifications et des cadres de passation de marchés qui garantissent l'obtention de biens et de services de la plus haute qualité », a toutefois déclaré Mme Yeda, au cours de l’assemblée annuelle, augurant d’un avenir plus rassurant pour Kenya Power.
Des projections encourageantes
Le second défi de taille que doit affronter Kenya Power est la demande de VE qui reste anecdotique en Afrique. Mais la fin programmée des voitures thermiques devrait renverser la vapeur, à long terme.
Dans ses prévisions à dix ans sur l’évolution du marché automobile, publiées en 2020, le cabinet de conseil en stratégie, Boston Consulting group (BCG), révèle qu’avec 52% de part de marché, la vente des VE dépassera celle des voitures thermiques en 2030. A Glasgow, à la Cop 26, de grands constructeurs comme Ford, General Motors, Jaguar Land Rover, Mercedes-Benz, ainsi qu’une trentaine de gouvernements et des gestionnaires de flottes de voitures ont annoncé avoir adopté un accord sur les véhicules zéro émission. Si 2035, au plus tard, est l’échéance retenue par les constructeurs signataires de l’accord, les pays en développement, parties de l’accord, quant à eux, se sont engagés à « travailler intensément » pour l’adoption des VE, sans préciser une date.
Notons que, pour encourager l'adoption des VE, le Kenya a pris des mesures comme la réduction des droits d'accise sur ces voitures de 20 % à 10 %. Le Kenya Bureau of Standards (Kebs) a également adopté des normes pour les véhicules électriques.
Stéphane Alidjinou