(Agence Ecofin) - Les relations entre les autorités et l’antenne nigériane de MultiChoice se sont compliquées depuis plusieurs mois. D’une part, les autorités ont décidé de faire perdre au groupe son monopole sur la diffusion du contenu sportif, et d’autre part l’opérateur refuse de créer une facturation à la carte comme le réclame le parlement nigérian.
Au Nigeria, l'administration fiscale vient de demander aux banques locales de geler les comptes de MultiChoice Group. Les autorités reprochent à la société d’avoir violé des accords fiscaux et refusé l'accès à ses dossiers dans le cadre d’un audit concernant ces manquements. Le service fédéral des revenus (FIRS) a pris cette mesure draconienne pour récupérer 1,8 trillion de nairas (4,4 milliards de dollars) d'obligations fiscales impayées par le groupe.
« La société a constamment violé tous les accords et engagements avec notre service. Elle ne répondait pas rapidement aux correspondances, elle manquait d’intégrité au niveau des données et elle n'était pas transparente puisqu'elle refusait continuellement l'accès à ses dossiers », a déclaré le FIRS dans un communiqué repris par la presse locale nigériane.
FIRS moves to recover alleged N1.8trn unpaid tax from Multichoice Nigeria https://t.co/KZ6uo2Fc04 via @todayng
— Nigeria Newsdesk (@NigeriaNewsdesk) July 8, 2021
Suite à cette situation, la valeur de l'action de Multichoice Group a chuté de 10,4% sur le Johannesburg Stock Exchange ce jeudi 8 juillet 2021. « Nous n'avons pas reçu de notification formelle de cette affaire, cependant, les actionnaires sont informés que le Groupe est au courant de rapports dans les médias concernant une affaire fiscale en cours avec le FIRS. L'affaire porte apparemment sur des allégations non fondées selon lesquelles MultiChoice Nigeria n'a pas entièrement divulgué la liste de tous ses abonnés aux autorités », a réagi le groupe dans un communiqué sur le Johannesburg Stock Exchange.
L’administration nigériane s’est souvent montrée perspicace dans la mise en branle de procédures contre des filiales de grands groupes panafricains sur leur territoire. MTN Group avait déjà fait face à une procédure pour une fraude fiscale présumée de 2 milliards $ au Nigéria, avant que l'affaire soit abandonnée.
Si Multichoice Group devait effectivement verser la somme réclamée par les autorités fiscales, cela risque d'être un coup dur, car ce montant représente 1,2 fois son chiffre d'affaires pour la période de 12 mois s'achevant fin mars 2021. Plus important, cela représente environ 5 fois son bénéfice avant impôts et amortissements sur la même période. Les responsables ont signalé avoir déjà entrepris des discussions avec l'administration fiscale nigériane, pour en savoir plus.
Multichoice Group a pourtant débuté l'année 2021 avec un résultat annuel (pour l’exercice s'achevant fin mars) affichant des performances en hausse. Selon des données fournies par Capital IQ, la branche « données de marchés » de S&P Global Ratings, sa marge de résultat net est ressortie à 4,1% de son chiffre d'affaires global. C'est le meilleur niveau de cet indicateur depuis 2019.
Highlights of MultiChoice Group financial performance for the year ended March 31 https://t.co/D27JCL2x9x
— benjamin a ameh (@Benameh2Ameh) July 7, 2021
Mais derrière cette embellie globale, le Nigéria pose un certain nombre de défis pour le groupe. Dans son rapport de l'exercice financier 2020/2021, Multichoice a signalé une trésorerie équivalente à 2,3 milliards de rands (160,7 millions $) qui est bloquée au sein de l'économie la plus peuplée d'Afrique, en raison de problèmes avec les réserves de change.
Rien que de ce fait, le groupe risque de perdre 7% de la valeur de sa trésorerie au Nigéria, représentant le degré de dévaluation du Naira, la monnaie locale. Le défi fiscal serait donc un problème supplémentaire.
Plusieurs actionnaires suivront donc de près cette affaire. L'un d'eux est notamment Vivendi SE, un groupe coté à la bourse de Paris et qui a pour premier actionnaire Bolloré Participations, une des filiales du groupe Bolloré. Les autres actionnaires importants de Multichoice Group sont la Public Investment Corporation (le fonds de gestion des retraites de la fonction publique sud-africaine), et Allan Gray, un important gestionnaire d'actifs en Afrique, lui aussi basé en Afrique du Sud.
Servan Ahougnon
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