Agence Ecofin TikTok Agence Ecofin Youtube Agence WhatsApp
Ecofin Finance
Agence Ecofin
Yaoundé - Cotonou - Lomé - Dakar - Abidjan - Libreville - Genève

Tribune

Côte d’Ivoire : recommandations de reformes pour améliorer l’environnement des affaires

Côte d’Ivoire : recommandations de reformes pour améliorer l’environnement des affaires
  • dimanche, 25 novembre 2012 17:29

André Soumah, président du groupe ACE Global, basé à Genève, qui emploie 4800 personnes dans 34 pays, fait le point sur le climat des affaires en Côte d'Ivoire et recommande plusieurs réformes réglementaires pour améliorer l'attractivité économique du pays.

Dès son accession à l’indépendance la Côte d’Ivoire a fait le choix d’un modèle économique basé sur le libéralisme et tiré par l’entreprise privée. Paradoxalement toutes les politiques mises en place pour favoriser l’émergence d’un tissu d’entreprises nationales ont échoué. La population d’entreprises dans le pays est toujours dominée par les filiales de grands groupes multinationaux, de grandes entreprises locales aux capitaux étrangers, les entreprises publiques et les PME/PMI aux capitaux étrangers, notamment français et libanais.

La grande majorité des entrepreneurs nationaux se retrouvent dans les micro-entreprises et le secteur informel. Globalement les PMI/PME et les entités du secteur informel sont peu développées et le tissu industriel est fragmenté, désarticulé, les grandes entreprises modernes ne concédant pas de la sous-traitance aux PME/PMI locales pouvant favoriser leur intégration au tissu industriel.  

De même, malgré le nombre impressionnant de réformes engagées par les gouvernements successifs pour améliorer l’environnement des affaires dans le pays, les opérateurs économiques continuent de s’en plaindre et le classement de la Côte d’Ivoire à ce niveau est très mauvais autant dans le Doing Business (DBI) de la Banque mondiale que dans Enabling Trade (ETI) du World Economic Forum.

 

 

CI 2009      

CI 2010        

CI 2011      

CI 2012      

CI 2013

Doing Business

163(183)

168(183)

169(183)    

177(185)    

177(185)

Enabling Trade

120(121)  

123(125)    

126(132)            

-

-

( ) Nombre de pays dans le classement

Le classement est plus mauvais avec ETI qui inclut les infrastructures physiques. Quand on sait que la sécurité physique, le racket et la corruption (la mauvaise gouvernance) ne sont pas inclus dans les paramètres utilisés dans la construction de ces 2 indices, on comprend que l’environnement des affaires est vraiment très dégradé en Côte d’Ivoire. Pour une fois les indices des organismes internationaux rejoignent les complaintes des opérateurs économiques et le sentiment général.

Il y a donc un problème réel au niveau de l’environnement des affaires en Côte d’Ivoire. Réside-t- il dans la pertinence ou la cohérence des mesures arrêtées ? A-t-on pris en compte les modalités d’acceptation ou de digestion des mesures prises, ainsi que le cadre réglementaire approprié pour leur mise en œuvre? Comment faire pour améliorer les réformes pour obtenir de meilleurs résultats dans ce domaine, notamment un meilleur classement de la Côte d’Ivoire dans le DBI (être au moins dans la médiane) ? Comment faire pour que les mesures prises se traduisent également par un accroissement de la compétitivité de l’économie ivoirienne, un développement plus soutenu du secteur privé local et une densification du tissu industriel ?

En effet, on sait que les objectifs poursuivis par les réformes engagées par les autorisées ivoiriennes visaient, au delà de l’amélioration de l’environnement des affaires, les objectifs de développement des PME/PMI et de l’entreprenariat national, d’accroissement des investissements privés, y compris les IDE et de compétitivité de l’économie ivoirienne.

Il convient dans le cadre du présent rapport d’examiner également les performances réalisées à ce niveau, ainsi que les améliorations qu’on pourrait y apporter.

913 AVIS DEXPERT FINANCE1

Distribution de la Cote d’Ivoire dans Doing Business 2013.

 

1-   Le rôle du secteur privé et de la création d’entreprises dans la stratégie de développement de la Côte d’Ivoire

 

1.1-  Le secteur privé, moteur de la stratégie de développement de la Côte d’Ivoire

Le modèle économique libéral pour lequel la Côte d’Ivoire a opté dès son accession à l’indépendance reposait sur la recherche d’une industrialisation tirée par un secteur d’entreprises privées dynamiques. Les entreprises privées sont perçues comme une source de création de richesses pouvant impulser l’industrialisation du pays pour les raisons suivantes :

1) Poursuivant un but commercial et mues par la recherche de profits, les entreprises privées sont enclin à prendre des risques et recherchent l’efficacité économique (rationalisation des choix, minimisation des coûts et optimisation dans l’utilisation des facteurs de;

2) Préparées à affronter la compétition avec les concurrents, autant sur le marché domestiques que sur les marchés extérieurs, elles sont capables de mettre au point les innovations technologiques pour obtenir les techniques de production les plus performantes et les méthodes marketing les plus;

3) Elles sont capables d’une mobilisation et d’une concentration de compétences et de ressources financières à partir de programmes d’investissements, autant dans le processus de production, la commercialisation que la recherche et le développement.

L’entreprise est ainsi l’unité de base du système de production capitaliste. Toutefois, les entreprises privées ne peuvent, à elles seules, garantir le développement des pays, notamment dans les pays en développement, car elles peuvent laisser de côté des secteurs qui, bien qu’utiles pour le pays, n’offrent pas de rémunérations suffisantes ou sont jugées trop risqués. Dans ces conditions l’Etat est contraint d’intervenir en offrant des incitations ou en mobilisant des entreprises publiques. Ainsi, d’autres types d’organisation économique recourent aux entreprises, mais cette fois publiques, pour réaliser les objectifs économiques et sociaux. Ce fut le cas en Côte d’Ivoire, qui a dû recourir à la création d’entreprises publiques, au cours de la décennie 1970, pour combler l’absence d’entrepreneurs nationaux et compléter les opérations des entreprises privées, essentiellement étrangères. Cette intervention massive (couvrant les secteurs agriculture et industrie, le commerce et le secteur bancaire) a été remise en cause par les programmes d’ajustement structurel qui ont lancé, au début des années 1980, un vaste programme de liquidation et de privatisation des entreprises publiques, qui se poursuit encore aujourd’hui.

Toutefois, au niveau international, le rôle de l’entreprise publique revient au premier plan avec la montée en puissance des pays émergents d’Asie (Chine et Inde) et d’Amérique latine (Brésil, Mexique et Venezuela), reposant fortement sur des sociétés d’Etat, modernes et efficaces. C’est ainsi que dans le classement de Fortune Global 2012 des 500 premières sociétés, 71 sont des sociétés d’Etat en provenance de la Chine, de l’Inde, du Brésil, de la France, d’Allemagne, d’Italie, de Russie, d’EAU, du Mexique et du Venezuela. On dénombre 5 sociétés, dont 4 chinoises, dans le top 15 de ce classement.

Avec ces société d’Etat de plus en plus importantes à côté de grandes société privées, la question pertinente aujourd’hui devient comment assurer l’efficacité et la compétitivité des entreprises en général (privées comme publiques) et leur aptitude à conquérir et conserver des marchés tout en contribuant au développement des pays dans lesquels elles interviennent.

 

1.2- Création d’entreprises et création d’emplois

La politique des autorités ivoiriennes en direction de la création d’entreprises a évolué dans le temps. Au cours de la période de l’immédiat après l’indépendance le champ a été laissé libre à toutesles activités industrielles et commerciales sans trop d’intervention publique, le gouvernement étant préoccupé par la mise en place des institutions publiques. Ainsi ce sont les entreprises qui prospéraient pendant la période coloniale qui vont poursuivre leurs activités, suivies par d’autres entreprises évoluant dans leur sillage. Il s’agit, au niveau industriel, de Blohorn, des Savonneries marseillaises, d’Uniwax, pour la fabrication de pagnes, de Nestlé pour l’industrie alimentaire, des grands moulins d’Abidjan, des compagnies de commerce, telles que Optorg, CFAO, CCA, SAV, Jean Abil Gal, etc., et des exploitations agricoles telles que la SPROA, la CCCI. On observe l’arrivée de la première vague d’opérateurs libano-syriens (qui tiennent également de grands commerces) avec des noms bien connus, Attié, Khalil, Safiédine, etc..

Au début des années 1970, constatant les insuffisances de cette politique au regard des besoins d’une accélération du développement du pays, les autorités ivoiriennes s’engagent dans une promotion active de l’entreprenariat local, parallèlement à la création de nombreuses entreprises publiques et à la poursuite de la politique d’attraction des investisseurs étrangers. En fait, le pouvoir politique s’est fixé, dès 1968, pour objectif de promouvoir la PMI nationale dans le but de contrebalancer la domination des firmes multinationales, considérant que l’industrialisation ne peut pas reposer sur les seules grandes entreprises étrangères. Au niveau de la promotion de l’entreprenariat l’accent est mis sur les promoteurs plutôt que sur les projets/transactions qu’ils entreprennent.

Les instruments utilisés dans le cadre de cette politique sont le code d’investissement (qui contient certes d’importantes exonérations fiscales en direction des investisseurs étrangers, mais aussi des avantages particuliers aux foyers fiscaux nationaux et aux PMI/PME), la création de banques et fonds (BICT, BIDI, BENEC, BNDA) et de structures d’encadrements des entrepreneurs (OPEI en 1968 qui devient CAPEN la même année), surtout en direction des opérateurs nationaux. Ainsi, pour soutenir la création d’entreprises nationales les mesures ont été prises pour la diversification des sources de financement, l’identification des opportunités d’investissement, l’assistance technique pour la préparation et la présentation des dossiers de projets, l’assistance directe aux entreprises.

La formation technique et professionnelle constituait un volet important de la politique d’appui à l’entreprenariat local, ainsi que de la promotion des entreprises et de l’emploi. L’architecture du système de formation technique et professionnelle est articulée autour de 4 pôles complémentaires : la formation des formateurs, la formation des ouvriers et techniciens, la formation des techniciens supérieurs et des ingénieurs, et la formation professionnelle initiale et continue.

La formation des formateurs pour l’ensemble du système est assurée par l’Institut Pédagogique National de l’Enseignement Technique et Professionnel (IPNETP). C’est lui qui assure également la formation et le perfectionnement des personnels d’encadrement (inspecteurs, conseillers pédagogiques, chefs d’établissement, etc.), la recherche pédagogique, l’élaboration des curriculums, la production et la diffusion des médias pédagogiques.

La formation des ouvriers et techniciens est assurée par les lycées professionnels qui accueillent des élèves sortant des collèges avec le BEPC. D’une durée de 3 ans, ces formations conduisent au Brevet de technicien (BT) dans les spécialités professionnelles suivantes: technique administrative et comptable, industrielle, travaux publics, agro-alimentaire, hôtellerie.

La formation des techniciens supérieurs et ingénieurs est assurée par des écoles spécialisées dans les secteurs industriel et tertiaire, regroupées au sein de l’Institut National supérieur de l’Enseignement Technique (INSET).

Il s’agit de:

 

- l’ENSIA, l’ENIS, l’ESI, structures polyvalentes et spécialisées, qui concernent les disciplines suivantes: mécanique, électricité, énergie, ingénierie industrielle, électronique, électrotechnique, informatique;

- l’Institut de Technologie Industrielle (ITI) et l’Ecole de Techniciens Supérieurs du Tertiaire, qui couvrent les spécialités: mécanique, électronique, électrotechnique, maintenance industrielle, chimie industrielle et génie alimentaire;

- l’Ecole de techniciens supérieurs du tertiaire: elle comprend quatre structures qui forment des Techniciens Supérieurs en Gestion Commerciale, Finance-Comptabilité (ISC), Assurance, Transport-Logistique (ITT) Informatique de Gestion (ISI), Secrétariat de Direction (ISS).

 

Puis l’INSET est intégré à l’Institut National Polytechnique Houphouet Boigny (INPHB) de Yamoussoukro, comprenant d’autres grandes écoles qui forment des ingénieurs agronomes (ENSA), des ingénieurs et ingénieurs des techniques en travaux publics (ENSTP).

La formation professionnelle initiale et continue était gérée au départ par l'Office National de la Formation Professionnelle (ONFP) et le Fonds National de Régulation (FNR), premiers organes publics de gestion du secteur de la formation professionnelle. De 1987 à 1991, le FNR a financé la réalisation de 82 projets collectifs, sectoriels ou régionaux, et de 1420 plans de formation concernant 87 777 salariés de 705 entreprises (FNR, 1992). Le nombre de stagiaires doitêtre rapporté au volume estimé de l’emploi dans le secteur moderne, soit 200 000 (c.-à-d. près de 44% de ce dernier), pour mesurer l’impact des actions menées.

Toutefois, ces 2 organismesont été dissouts à la fin des années 1980 et remplacés par le Fonds de Développement de la Formation Professionnelle (FDFP) en 1991 et l'Agence Nationale de la Formation Professionnelle (AGEFOP) en 1992.

L'AGEFOP a pour mission de prospecter et analyser les besoins de formation professionnelle, d’élaborer des projets de formation professionnelle selon les besoins exprimés ou détectés, et gérer et coordonner les projets dont elle a la charge. Dans ce cadre l’Agence met en œuvre des actions de formation continue, individuelles, sectorielles, inter-entreprises et intra-entreprises, des actions de formation qualifiante, élabore des projets et met en œuvre les plans de financement relatifs aux projets de formation professionnelle. Selon les statistiques nationales, la demande annuelle de formation est de 500 000 personnes, quand le système classique de l’enseignement technique ne peut absorber que 60 000 personnes environ. La mission de l’AGEFOP est donc de contribuer à la résorption de ce gap. Ses activités comportent un volet d’incubation à côté du volet de formation.

Le FDFP, à la différence du FNR, est chargé de gérer à la fois le produit de l’impôt pour la formation continue et celui de la taxed’apprentissage. Hormis cette modification, qui s’apparente à la situation qui a prévalu entre 1977 et 1987, le nouveau dispositif marque plutôt un recul. Ainsi, les employeurs peuvent désormais conserver 50% de la cotisation obligatoire. Cette disposition, en réduisant les possibilités de mutualisation, pénalise les entrepriseset les publics défavorisés. Enfin, l’emprise plus forte de l’administration sur le nouveau Fonds laisse moins de champ à l’expression des représentants des salariés. Toutefois, le reversement par le Trésor du produit de l’impôt au compte du FDFP à la Caisse Autonome d’Amortissement est désormais obligatoire.

Ce système a produit des cadres et techniciens qui sont employés non seulement par le gouvernement, les entreprises privées en Côte d’Ivoire, mais aussi partout sur le continent africain. Quelques-uns ont pu monter leurs propres affaires. Mais, le système est en panne et tourne au ralenti aujourd’hui, de nombreuses entreprises n’arrivant même plus à recruter sur place pour leurs besoins en personnel qualifié dans les domaines techniques.

Dans le cadre des efforts de facilitation de la création et du développement des entreprises en Côte d’Ivoire, ce volet de la formation technique et professionnelle devrait être revisité afin d’améliorer l’offre de travail qualifié dans les domaines recherchés par les entreprises.

Une politique complémentaire d’ivoirisation des capitaux (encouragement au transfert volontaire graduel des capitaux des investisseurs étrangers aux nationaux) et de l’emploi (encouragement à l’emploi des nationaux et introduction de contraintes à l’emploi des non-nationaux, i.e. autorisation particulière pour l’emploi de non nationaux à des postes qui peuvent être occupés par des nationaux-principe du permis de travail) a été mise en place. Le soutien à la création d’entreprises visait in fine la création d’emplois.

Cette politique très interventionniste n’a pas eu le résultat escompté. Le nombre d’entreprises nationales est resté faible pendant les 3 premières décennies de la vie indépendante du pays. En 1990, on dénombrait 423 entreprises modernes enregistrées à la Banque des Données Financières (BDF), dont 50 grandes industries, soit 12 % du total, qui réalisaient 80% du chiffre d’affaires ; 100 moyennes industries, soit 24% pour 15% du chiffre d’affaires ; 273 petites industries, soit 64 % pour 5% du chiffre d’affaires. Une enquête réalisée par le Secrétariat d’Etat au Plan et à l’Industrie sur l’année 1980 recensait 429 entreprises industrielles modernes, dont 219 petites et moyennes entreprises, qui occupaient 5700 salariés sur 69 700 emplois totaux, soit 8,2% du total. Ainsi, le nombre total d’entreprises industrielles stagnait sur la période et la contribution au chiffre d’affaires des PME/PMI est restée très limitée.

L’ivoirisation des capitaux a connu un succès limité malgré tous les efforts déployés pour faire émerger au forceps des entrepreneurs ivoiriens. Les capitaux privés nationaux dans le capital cumulé des entreprises, tel que rapporté à la BDF, représente seulement 8,7% en 1981, 11,1% en 1991 et 9% en 1991. De même le relatif succès de l’ivoirisation des emplois (­­56% de l’emploi dans l’industrie manufacturière en 1961, 65,5% en 1981 et 67,8% en 1991) n’a pas débouché sur l’émergence d’entrepreneurs à partir des cadres des grandes entreprises étrangères comme anticipé, en dehors de quelques cas isoles, tels que Alcide Kacou (Ivoiroutils, ABI), Alain Bambara (COSMIVOIRE), Oka Gnangoin (ADK) et Fulgence Koffi (CCP-MACACI).

 

1.3- Compétitivité de l’économie et environnement des affaires

A partir du début des années 1980 la crise économique et l’imposition des programmes d’ajustement structurel par les institutions de Breton Wood se traduisent par le démantèlement des entreprises publiques, le redimensionnement des structures de promotion des entreprises et une réduction drastique des moyens affectés aux politiques de soutien à l’entreprenariat national. De fait la politique en direction du secteur privé va changer totalement d’orientation. L’accent va être mis désormais sur les mesures de soutien à la compétitivité, l’objectif étant de créer les conditions de développement du secteur privé en général, les incitations concernent désormais toutes les entreprises sans distinction. L’adoption d’un nouveau code des investissements en 1985 et d’un programme d’ajustement sectoriel compétitivité (PASCO) en 1991, ainsi que la création du CEPICI en 1993, consacrent cette nouvelle orientation. L’objet du CEPICI est la facilitation des investissements privés nationaux et étrangers dans tous les secteurs de l'activité économique. Ses instruments sont le guichet unique, le code d’investissement, les missions et évènements promotionnels.

L’existence d’organismes de promotion de l’entreprenariat national ne changera rien à cette nouvelle orientation. En effet, le FIDEN, créé en 1997 et l’INIE, créé en 1999, ont pour objectif de favoriser l’esprit d’entreprise et accompagner les entrepreneurs, et rentrent pleinement dans ce nouveau moule plus libéral. Le FIDEN est un mécanisme de financement au profit des Petites et Moyennes Entreprises (PME) et des Petites et Moyennes Industries (PMI), qui intervient sous la forme d’un refinancement des crédits qui leur sont accordés par les banques et établissements financiers et de prêts directs pour la réalisation des investissements, l’exécution des marchés de sous-traitance et des marchés publics des collectivités locales. L’objectif de l’INIE est de promouvoir la culture d’entreprise et de faciliter l’insertion des jeunes dans le tissu économique par la création d’entreprises viables. L’INIE propose les services suivants aux entreprises et aux créateurs d’entreprises : appui technique au montage de projets, à la recherche de financement, conseil en création d’entreprises, en gestion et promotion marketing, appui à la formation. Les ressources de ces 2 organismes sont essentiellement publiques (provenant du budget de l’Etat). Ce qui explique les difficultés énormes qu’ils connaissent pour financer leur fonctionnement et opérations.

Il y a donc un shift vers une amélioration générale de l’environnement des affaires et des conditions de la compétitivité au détriment des actions de soutien direct à l’entreprenariat national. Il y a eu des tentatives de retour à de tels soutiens directs avec les fonds sociaux, créés en 1998 avec des conditions d’octroi et de remboursement très souples faites aux bénéficiaires. Mais l’expérience s’est arrêtée très vite en 1999, après le coup d’Etat, laissant d’énormes ardoises.

D’autres actions ont été posées pour aller encore plus vite dans cette nouvelle direction. C’est ainsi que la Côte d’Ivoire donnera toutes les garanties supplémentaires relatives à la protection des investissements (à travers le nouveau code d’investissement adopté récemment par le gouvernement), le pays a signé avec 9 pays (7 européens, le Canada et la Tunisie) des accords de non double imposition, et avec 9 autres (6 européens, les Etats unis, la Chine et le Qatar) des accords de protection mutuelle des investisseurs. La Cote d’Ivoire est membre de l’organisation africaine de la propriété intellectuelle (OAPI) et de l’organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI/WIPO). Il a été créé une chambre arbitrale, la Chambre d’Arbitrage de Cote d’Ivoire (CACI) et les tribunaux de commerce. La Cote d’Ivoire a adopté un nouveau code des marchés publics en 2009, qui reprend les directives de l’UEMOA et prévoit une autorité de régulation. Cette dernière, l’ARMP, qui a été créée en 2010, reçoit et traite les réclamations des soumissionnaires aux marchés publics et veille au respect des procédures dans l’attribution des marchés publics.

En dépit de toutes ces initiatives la perception des opérateurs reste très négative et les classements de la Côte d’Ivoire en matière d’environnement des affaires mauvais.

 

2- Les réformes et l’amélioration de l’environnement des affaires

Au regard de l’historique rappelé ci-dessus, on note que de nombreuses réformes ont été engagées en Côte d’Ivoire en vue d’une amélioration de l’environnement des affaires et de la compétitivité des entreprises. Les évolutions semblent indiquer que les initiatives ont souffert d’un manque de coordination, étant souvent confiées à différentes structures sans lien apparent. De même, il y a eu beaucoup de changements d’orientation, laissant apparaitre des ruptures temporelles qui ont nui à la visibilité et la continuité des actions.  

Ce sont là certainement des raisons pour lesquelles, malgré les nombreuses réformes engagées, le pays se trouve toujours mal classé dans les indices qui mesurent la qualité de l’environnement des affaires. Il importe d’analyser les facteurs explicatifs de cette situation à travers un examen détaillé du rapport Doing Business 2013 de la Banque Mondiale. Ceci nous permettra de mesurer le chemin qu’il reste à parcourir.

2.1- Mesures du Doing Business de la Banque mondiale

Le tableau suivant fourni les résultats du Doing Business 2012 et 2013.

 

 

Doing Business 2013  

Doing Business 2012

Variation

Classement moyen

177

177

0

 

 

 

 

Classement par catégorie

 

 

 

Création d’entreprise

176

173

-3

Octroi de permis de construire

169

168

-1

Raccordement à l'électricité

153

150

-3

Transfert de propriété

159

158

-1

Obtention de prêts

129

127

-2

Protection des investisseurs

158

155

-3

Paiements des impôts

159

161

2

Commerce transfrontalier

163

163

0

Exécution des contrats

127

126

-1

Règlement de l'insolvabilité

76

73

-3

Le classement projeté de la Cote d’Ivoire dans Doing Business 2013 montre un indice moyen inchangé, bien qu’on assiste à une dégradation dans 8 des 10 paramètres de l’indice, 1 reste stable et un autre progresse légèrement.

La création d’entreprise (176e), l’octroi du permis de construire (169e) et le commerce transfrontalier (163e) sont les domaines dans lesquels les performances sont les plus mauvaises. Les domaines qui connaissent une dégradation sont la création d’entreprise, le raccordement à l’électricité, la protection des investisseurs et le règlement de l’insolvabilité, qui est le domaine où le pays a fait mieux jusqu’à présent (73e en 2012 et 76e en 2013).

Les réformes du gouvernement ne sont pas ciblées par rapport aux différents domaines sensibles : ceux dans lesquels le pays est le moins bien classé, notamment par rapport à des pays comparables (création d’entreprise, octroi de permis de construire, transfert de propriété, protection des investisseurs, facilitation du commerce) et ceux dans lesquels on observe une forte dégradation (raccordement à l’électricité, règlement de l’insolvabilité), signifiant que le pays a fait moins bien que dans le passé ou que les autres pays font mieux que lui par rapport aux années précédentes.

Ainsi, tout en poursuivant les réformes à large spectre, engagées jusqu’à présent, des mesures précises doivent être prises dans 5 ou 6 domaines clé sur lesquels un accent particulier sera mis. Les 6 domaines suivants peuvent être retenus comme prioritaires : permis de construire, connexion à l’électricité, enregistrement du transfert de propriété, la protection des investisseurs et la facilitation du commerce.

Création d’entreprise : sur les 10 procédures requises aujourd‘hui 3 pourraient être reformées : la libération du capital minimum pourrait se faire dans un délais de 6 mois et cesser d’être une condition de la création de l’entreprise, les fonds à libérer lors de de la création pourraient se limiter aux fonds nécessaires au paiement des frais de timbres et d’enregistrement et frais notariés ; l’obligation de publication de la création et la légalisation de cette publication devraient être laissées à la discrétion des fondateurs et ne plus faire partie des procédures requises pour la création d’entreprise. Ceci permettrait d’éliminer 30% des procédures requises. Toutefois, ces révisions, qui sont conformes à ce qui se passe dans des pays tels que le Ghana et la Zambie, supposent qu’une formule soit trouvée par rapport aux dispositions pertinentes de l’OHADA et du SYSCOA. De même, la mise en place des tribunaux de commerce, la poursuite de la modernisation des greffes et le renforcement de l’efficacité des autres juridictions (moyens supplémentaires en vue d’une accélération des procédures, en commençant par l’apurement des dossiers en souffrance), réduiront les files d’attente, améliorant les conditions d’enregistrement des créations d’entreprises.  

Obtention du permis de construire : Sur un total de 17 procédures requises 3 peuvent être revues : l’approbation de l’extrait topo par le cadastre devrait pouvoir s’obtenir en 30 jours au lieu de 70 actuellement ; l’obtention du permis de construire devrait se faire en moins de 200 jours, c.-à-d. 6,5 mois. Actuellement, 90 jours, c.-à-d. 3 mois devraient être suffisants ; le certificat de conformité des autorités de la sécurité devrait pouvoir s’obtenir en 30 jours au lieu de 70 actuellement. Les délais maximum suggérés ici devraient faire l’objet d’une évaluation technique pour être confirmés, ajustés ou améliorés. Ils reposent en fait sur le temps mis par l’administration pour donner le certificat d’urbanisme et l’approbation des plans sanitaires (30 jours maximum). Ces 3 procédures étant les plus lourdes, en les allégeant on améliorera fortement le processus d’obtention du permis de construire. De plus, la mise en place d’un programme spécial pour apurer les dossiers en attente pourrait réduire les files d’attente, fluidifier et améliorer le processus.

Connexion à l’électricité : Ici aussi, bien que le nombre de procédures ne change pas, les délais de réalisation peuvent être revus au niveau de 3 d’entre elles : le dépôt de la demande de connexion ne devrait pas prendre 14 jours, 7 devraient suffire ; les travaux de connexion externe devraient pouvoir se faire en 14 jours au lieu de 19 actuellement ; une fois que le dossier est complet, la signature du contrat avec la CIE, la pause du tableau et le branchement devraient prendre au maximum 7 jours au lieu de 14 actuellement. Compte tenu de la spécificité du domaine une confirmation technique de ces suggestions s’impose.

Enregistrement du transfert de propriété : On observe au niveau de ce domaine, une forte amélioration entre 2005 et 2010, suivie d’une stagnation après 2011. Toutefois, sur les 6 procédures requises quelques changements sont suggérés relativement aux délais de réalisation de 2 procédures: le dépôt de l’acte de vente par le notaire auprès des autorisées fiscales devrait prendre au maximum 5 jours au lieu d’une fourchette de 5-10 jours actuellement; l’enregistrement à la conservation foncière et au cadastre du transfert de propriété devrait prendre au maximum 14 jours au lieu de 32 actuellement. L’adoption de la loi portant réforme du cadastre projetée en 2012 devrait s’étendre à la conservation foncière et prévoir des dispositions visant à accélérer les interventions de cette administration autant dans l’établissement du titre foncier que dans l’enregistrement de tous les actes liés à l’acquisition et au transfert de propriété, ainsi qu’à l’octroi du permis de construire.

Protection des investisseurs : Ce domaine concerne essentiellement l’accès aux informations de l’actionnaire ; les responsabilités des mandataires/dirigeants et les facilités de poursuite des dirigeants en cas de manquements ou préjudices subis par un actionnaire détenant moins de 10% du capital. Toutes ces questions relevant de l’HOADA et du SYSCOA, les améliorations à ce niveau impliquent nécessairement ces 2 organismes. Par contre la réforme de la justice en vue d’une plus grande efficacité (traitement rapide des dossiers) et de plus de professionnalisme et de probité dans l’exercice de leur métier, rejailliraient sur la protection des investisseurs. De même, la lutte contre la contrebande sur les produits textiles, pharmaceutiques et les pièces détachées de véhicules, due à la porosité des frontières pourraient renforcer la protection de la propriété intellectuelle et des investisseurs.

Facilitation du commerce : A ce niveau, 10 documents sont requis pour l’exportation tout comme pour l’importation. Le temps d’exécution des différentes opérations semble raisonnable (entre 2 et 7 jours en moyenne) sauf au niveau de la préparation des documents qui prend 19 jours à l’importation et 15 jours à l’exportation. Ces documents, qui sont généralement rassemblés par le transitaires en vue de la déclaration en douane et du dédouanement, proviennent de diverses sources (l’exportateur/importateur, le ministère du commerce, les ministères tels que l’agriculture, les eaux et forêts, la sante, l’environnement, etc., selon les cas, du transporteur, des organismes tels que l’OIC, etc.). Ici aussi il convient de faire une étude fine des éléments constitutifs de la préparation des documents à tous les niveaux en vue de faire les propositions d’amélioration du processus, qui s’imposent.

A la lumière du rapport Doing Business 2013, il apparait que malgré les nombreuses réformes engagées dans les secteurs qui touchent aux différents paramètres entrant dans le calcul des indices, aucune mesure ciblée sur ces derniers n’a été engagée ces 5 dernières années. C’est le cas pour les domaines que nous avons jugés prioritaires (permis de construire, connexion à l’électricité, enregistrement du transfert de propriété, la protection des investisseurs et la facilitation du commerce) dans lesquels on dénombre très peu de mesures ciblées alors que ces secteurs ont fait l’objet de grandes réformes sur la période considérée. En arrêtant des mesures ciblées dans les domaines couverts par le Doing Business, avec une attention particulière accordée aux 6 domaines jugés prioritaires, on pourrait obtenir une amélioration rapide dans le classement de la Côte d’Ivoire.

2.2- Les autres mesures

Les mesures du Doing Business ne concernent qu’une partie des facteurs qui affectent l’environnement des affaires et la compétitivité des entreprises. La création d’entreprises intéresse le gouvernement autant que l’augmentation des investissements, la croissance et l’emploi. Les mesures autres que celles du Doing Business, qui nous paraissent d’une grande importance, concernent l’accès aux marchés, le développement des infrastructures, l’accès et réduction du cout du crédit, fiscalité active en faveur du développement des entreprises.

Le développement des infrastructures : Les infrastructures font partie des facteurs qui affectent fortement la compétitivité des entreprises et des économies. Bien que le domaine des transports et des infrastructures de communication et de l’information, est celui dans lequel la Côte d’Ivoire connait son meilleur classement dans le ETI 2012, il est important de rechercher une amélioration supplémentaire à ce niveau (l’indice restant relativement faible) et plus généralement un renforcement des infrastructures en général peut être très bénéfique.

 

ETI 2012

Overall

Marketaccess

Border adm

Transports&ICT

Business env

Côte d’Ivoire

126 3.02      

123 3.07            

121 2.73            

110 2.94          

122 3.34

Au niveau des transports et des TICs des marges d’amélioration des infrastructures existent et le développement des services d’accompagnement reste entier. Par exemple l’exécution du programme routier, ferroviaire et des équipements portuaires tels qu’annoncés par le gouvernement ivoirien devraient contribuer fortement à l’offre de transport s’il est accompagné d’un développement des services.  

La fourniture régulière et le coût de l’énergie et de l’eau, ainsi que le coût des hydrocarbures sont des variables très importantes de la décision d’investissement des operateurs (du plus grand au plus petit). C’est pourquoi ces éléments sont souvent retenus dans la comparaison des coûts des facteurs. En 2006 un tel exercice entre la Cote d’Ivoire et le Togo était peu concluant. En effet, le différentiel de coût de facteurs entre la Côte d’Ivoire et le Togo était ambivalent : au niveau des hydrocarbures, la Côte d’Ivoire était nettement plus chère (+21.8% sur l’essence super, +9% sur le gasoil) ; au niveau de l’électricité, c’est le Togo qui est plus cher, autant au niveau des frais fixes (entre +15.7 et +58.2% selon de type de branchement et de consommation) que du prix du Kwh (entre +13% et +24.8% selon le type de branchement, la durée et la période de consommation) ; au niveau de l’eau, le Togo est moins cher sur les 2 premières tranches, tandis que la Côte d’Ivoire meilleur marché sur la dernière tranche.

Des réformes dans les secteurs de l’énergie et de l’eau, qui ont été délayées depuis des années du fait de la crise, doivent être engagées courageusement pour renforcer l’offre et réduire le coût de ces services.

Les moyens à déployer dans le secteur des infrastructures devraient tendre à accroitre les investissements publics et le recours aux Partenariats Public-Privé (PPP) pour impliquer davantage le secteur privé dans l’accroissement de l’offre d’infrastructures performantes.

La pratique des PPP est relativement vielle en Côte d’Ivoire. Ainsi, la distribution de l’eau et de l’électricité a été concédée à des entreprises privées, une part importante de la production d’électricité est fournie par 2 entreprises privées (Azito et Ciprel), tout comme la production de gaz (Foxtrot, Devon et CNR), la gestion de l’aéroport d’Abidjan Portbouet est confiée également à une entreprise privée (AERIA) ainsi que la gestion du terminal a container de Vridi au PAA (SETV) l’est également.

Le gouvernement pourrait recourir à cette modalité afin d’accroitre rapidement l’offre d’infrastructures. Ce processus est entamé. Un Comité National des Partenariats Public-Privé, une structure gouvernementale instituée par arrêté N° 855 du 11 novembre 2010, a été mis en place pour organiser cette activité et porter assistance et conseil aux entités porteuses de projets dans ce domaine. Une liste d’environ 300 projets marchands en conformité avec le PND, le DSRP, le PIP et le programme d’urgence du Président de la République a été arrêtée. 80 projets issus de cette liste sont en cours de priorisation, 11 l’ont déjà été par la Banque mondiale dans le cadre de son appui au processus de développement des PPP. Les projets concernent entre autres l’autoroute Yamoussoukro-Bouaké, le chemin de fer Man-San Pedro, le train urbain à Abidjan, et la construction d’un dépôt d’hydrocarbures à San Pedro.

Des contrats ont été déjà signés et sont en cours d’exécution pour le pont de Lamarahoue sur le Bandama (Bouaflé), le troisième pont d’Abidjan Rivera-Marcory, l’autoroute Singrobo-Yamoussoukro, l’autoroute Abidjan-Bassam, le pipeline Abidjan-Bouaké et l’échangeur de la Rivera II. Il s’agit de s’assurer que ces projets sont menés à leur terme.

L’accès aux marchés : Il s’agira ici d’un accompagnement des entreprises locales, notamment les PMI/PME, dans l’identification des marchés et des clients par une aide à l’utilisation des « market analysis tools » de ITC/CCI, à travers des sessions de formation ciblées en associant les structures appropriées (AGEFOP et FDFP) ou en renforçant les projets et organismes qui soutiennent la sous-traitance locale tels que la Bourse de Sous-traitance et du Partenariat de Côte d’Ivoire (BSTP-CI. La BSTP-CI, mise en place en 1997 par la FNISCI (Fédération Nationale des Industries et Services de Côte d’Ivoire) avec le concours de l’ONUDI, est spécialisée dans le développement des relations de sous-traitance et de partenariat entre entreprises. La BSTP-CI, dans laquelle sont impliqués entre autres le CEPICI, la CCI-CI, le FDFP, la FIPME et la SIR, assure un suivi permanent des entreprises adhérentes et met en relation celles qui ont une offre de sous-traitance avec les PMI/PME locales. Elle informe également ces dernières des nouvelles technologies disponibles,  recense leurs besoins en matière de formation et d’équipement, et y apporte les réponses adéquates. Les activités de la BSTP-CI restent jusqu'à présent très limitées et peu connues. Une bonne diffusion et surtout leur développement conséquent pourraient aider les entreprises locales.

Le soutien à l’accès aux marchés pourrait aussi se faire à travers la formation et l’assistance apportées aux entreprises locales en vue d’une meilleure maitrise des règles d’origines et des procédures pour pouvoir bénéficier des facilités qu’offrent les marchés régionaux.  

Accès au crédit et réduction du cout du crédit: dans le Doing Business 2013 la Côte d’Ivoire se situe dans la moyenne des pays de l’UEMOA relativement à l’accès au crédit à la 129e place. Les marges de manœuvre pour des mesures unilatérales dans cette matière sont presqu’inexistantes. Une seule réforme a été engagée en 2012 par le biais de l’OHADA. Elle porte sur un léger ajustement des suretés sur les transactions, la prise en compte des produits d’intérêts et la possibilité d’actionner les garanties en dehors des procédures judiciaires. Ceci ouvre une brèche sur une réforme plus large de la gestion des suretés et garanties et la possibilité de prendre des textes qui organisent l’activité de tierce détention et sécurisent les récépissés d’entreposage (« warehouse receipts »), en vue d’en faire des instruments plus efficaces de facilitation et de structuration de crédits innovants au bénéfice des PME/PMI. Par ailleurs, l’accumulation des arriérés de paiements de l’Etat constituant un frein majeur à la continuation des activités de PME/PMI qui ont bénéficié de marchés publics, un plan crédible d’apurement de ces arriérés, qui est bien exécuté, pourrait servir de base à des financements relais qui peuvent sauver de nombreuses entreprises et permettre à d’autres de se développer. La dette intérieure de l’Etat de Côte d’Ivoire se montant à plus de 450 milliards, dont la moitié est due à des fournisseurs privés, on comprend l’importance d’une telle mesure.

Une fiscalité active : l’instrument fiscal a été fortement utilise dans le cadre des politiques publiques en Côte d’Ivoire. Les incitations contenues dans les différents codes d’investissement sont fiscales et douanières avant tout. De même, le gouvernement a été amené à prendre des mesures (à la suite du coup d’Etat de 1999, de la crise de 2002, des évènements de novembre 2004 et récemment à la suite de la crise postélectorale) d’abandon de créances fiscales et allègements fiscaux exceptionnels.

Les réformes fiscales engagées depuis 2000 ont eu pour conséquence d'alléger le poids de l'impôt sur le secteur productif grâce à d'importantes réductions des taux ou de l'assiette. Le taux de l'impôtsur les bénéficesestainsi passé de 35% à 25% et celui de la TVA de 25% à 18%. De 2001 à 2007, ces mesures ont coûté plus de 650 milliards de Fcfa (soit 1 milliard d'euros) au Trésor public ivoirien. La création des centres des impôts, qui rapprochent les services fiscaux du contribuable, l’informatisation des administrations des impôts, douanes et Trésor, l’institution d’un dialogue permanent avec les contribuables et les représentants du secteur privé, sont autant d’avancées qui méritent d’être signalées.

Il convient de poursuivre cette politique fiscale active pour le soutien aux activités productives. En particulier, des améliorations pourraient être apportées au niveau des contrôles et de la gestion des contentieux. Bien que correctement encadrée par les textes (code des procédures fiscales et code douanier), la gestion du contentieux laisse des marges discrétionnaires importantes aux agents de l’administration, notamment en cas de transaction. La fixation des amendes et des niveaux d’abattement souvent très élevés, non seulement pose un problème de transparence, mais il peut donner lieu à des pratiques frauduleuses et de corruption. Une révision des procédures de contrôles et de la gestion des contentieux corrigeant ces anomalies sera bien plus efficace que l’invitation à dénoncer les pratiques suspectes des agents de l’administration à leur hiérarchie.

Au total, ces réformes additionnelles pourraient renforcer le cadre d’exercice des activités des entreprises et contribuer à améliorer significativement l’environnement des affaires en côte d’Ivoire

 

2.3-Le cadre institutionnel des mesures d’amélioration de l’environnement des affaires

Compte tenu des insuffisances du cadre existant l’adoption d’un nouveau cadre institutionnel s’avère indispensable pour la mise en œuvre des reformes préconisées.

Encrage institutionnel

Les constats faits ci-dessus montrent que la dispersion des centres de décision et l’absence de coordination ont nuit énormément à l’efficacité des réformes passées. L’exécution des mesures arrêtées impliquant des services de différentes administrations (quelquefois au niveau ministériel), institutions et acteurs, et la coordination étant éclatée il était très difficile de les piloter et en assurer une exécution diligente.  

Afin de régler ce problème de la dispersion des initiatives, il est proposé de procéder à un regroupement pertinent des différentes initiatives. Il faut regrouper toutes les initiatives techniques et administratives visant l’amélioration de l’environnement des affaires et le développement des entreprises et créer une structure unique, l’Agence Nationale pour le Développement des Entreprises (ANDE) en charge de ces dernières. L’Agence reprendra les activités du CEPICI, de l’INIE, et d’autres initiatives similaires. Compte tenu de la nature présidentialiste renforcée du système ivoirien, l’Agence devrait être rattachée à la Présidence. Elle sera également chargée de centraliser et piloter les réformes en matière de développement des entreprises et des investissements.

L’Agence devrait créer en son sein une commission compétitivité qui sera également en charge des mesures d’amélioration de l’environnement des affaires. Cette commission sera le point focal des réformes préconisées ici. Elle instruira toutes mesures à prendre, identifiera les acteurs et structures impliquées, arrêtera une matrice de mise en œuvre qu’elle suivra attentivement. Ce qui évitera que les autres activités de l’Agence noient le volet compétitivité et amélioration de l’environnement des affaires.

Il convient également de regrouper toutes les initiatives à caractère financier touchant au développement des entreprises dans une structure financière unique, le Fond National de Développement des Entreprises (FNDE), qui reprendra les activités du FIDEN, du fonds de garantie PME/PMI et du fonds de soutien aux emplois jeune (FNS). Le Fonds devrait intervenir à travers les appuis aux études de marché et montage de projets, le préfinancement de l’apport personnel, l’apport de garantie ou de bonification d’intérêt et les prises de participation. Le fonds doit être articulé à un pool de banques afin de faciliter le financement des projets qu’il aura jugé viables.

Pour ses ressources un prélèvement FNDE pourrait être institué. L’assiette (frais généraux des grandes entreprises ou retenue sur les marchés publics au-delà d’un seuil) et les modalités de collecte de ce fonds devraient être étudiées de sorte à ne pas pénaliser outre mesure les entreprises.

Pour augmenter les chances de succès de l’Agence, le dispositif de formation technique et professionnelle doit être revu, renforcé et articulé avec les activités de l’Agence. La formation doit permettre d’améliorer l’offre de travailleurs qualifiés aux entreprises qui en ont besoin et aider ces dernières à renforcer leurs propres capacités. Elle doit également aider à révéler les entrepreneurs potentiels et les projets porteurs à promouvoir.  

Il convient donc de créer une plateforme commune entre ces 2 institutions et entre elles et les organismes en charge de la formation professionnelle (AGEFOP, FDFP, INPHB, etc.) et de la promotion de l’emploi (AGEPE).

Rôle des exécutifs locaux

La décentralisation se traduit par une plus grande implication des exécutifs locaux (communes, districts et régions) dans la mise en œuvre des politiques économiques, notamment au niveau de la fiscalité, de la fourniture d’infrastructures et la vie des entreprises localisées sur leurs territoires.

Les taxes qui affectent le plus les activités des PME/PMI, la patente, les timbres et droits d’enregistrement sont cogérées par l’Administration centrale et les exécutifs locaux. Par exemple la multiplication de taxes locales (taxes de stationnement, timbres et taxes de marché, redevances locales sur produits du sol et du sous-sol, etc.) peuvent contrarier/amenuiser les allègements fiscaux concédés au niveau central. De même, un retard dans la réalisation des infrastructures terminales de transport (échangeurs, voiries urbaines, gares, etc.) ou d’énergie (réseau basse tension, électrification rurale, etc.) qui relèvent des exécutifs locaux peut nuire à l’optimisation des réseaux de transports et d’énergie conçus au niveau central. Toutefois, compte tenu de l’insuffisance des délégations de pouvoirs aux exécutifs locaux, et de la modicité de leurs moyens propres leur influence effective est plutôt réduite.

Ainsi, à la différence du modèle du Mexique, les exécutifs locaux ne peuvent être une alternative à la mise en place de réformes au niveau central touchant à la compétitivité. Il faut faire en sorte qu’ils soient associés pour éviter les incohérences entre ce qui est susceptible d’être fait au niveau local et ce qui est fait au niveau central. Peut-être une façon pour assurer cette cohérence au niveau de la politique de promotion de la compétitivité c’est de prévoir que l’Agence ait des correspondants au niveau des exécutifs locaux.

 

3-  Conclusions et recommandations

Les constats : faiblesses des réformes passées: manque de coordination, de nombreux changements d’orientation, défaut de ciblage sur les paramètres Doing Business, peu de visibilité et de continuité dans le actions.

Cinq recommandations majeures

1) Renforcer la réforme prévue du cadastre et de la conservation foncière

2) Engager des réformes ciblées sur les mesures du Doing Business de la Banque mondiale avec une attention particulière accordée à 6 domaines jugés prioritaires. Evaluer le score/classement de la Cote d’Ivoire et les conditions techniques de la mise en œuvre des mesures d’amélioration identifiées. Comme dans le cas du Mexique, les indicateurs du Doing Business doivent être utilisés comme un déclencheur pour renforcer et cibler les réformes

3) Prendre des mesures complémentaires pour booster les entreprises locales, notamment au niveau de l’accès aux marchés, des infrastructures et des financements, pour densifier le tissu industriel et renforcer la compétitivité.

4) Mettre l’accent sur la formation qui devra être perçue à la fois comme un révélateur de talents et d’entreprises à créer et un moyen d’accompagner les entreprises existant dans leur développement

5) Mettre en place un nouveau cadre institutionnel pour la compétitivité en Côte d’Ivoire plus centralisé et rattaché à la présidence de la République. Le nouveau cadre devra créer des synergies entre toutes les structures impliquées dans la création, le développement des entreprises et la compétitivité

Le plan de travail général pour traiter le sujet

1) Le problème

2) Revue des politiques passées

3) Performance générale (par rapport au développement des entreprises, à l’évolution des investissements et des exportations)/performance par rapport au Doing Business et à ETI

4) Mesures d’amélioration DBI

5) Autres mesures d’amélioration de l’environnement des affaires et de la compétitivité

6) Conclusion et recommandations

Par André Soumah, Executive Chairman, ACE Global

 
GESTION PUBLIQUE

Top 5 des infos marquantes de la semaine dans l’actualité africaine de la gestion publique

Les syndicats nigérians appellent le gouvernement à appliquer le nouveau salaire minimum d’ici fin mai

Le traitement contre le palu, gratuit en Côte d'Ivoire : le point santé hebdomadaire

Cameroun : une ligne de crédit de 800 millions $ de la BID pour soutenir l'économie et le commerce

 
AGRO

Le gouvernement sénégalais augmente la subvention aux intrants agricoles à 197 millions $ en 2024/2025

Tanzanie : la récolte d’anacarde a atteint 305 000 tonnes en 2023/2024, son plus haut niveau en 5 ans

La colère contre les tomates marocaines ne faiblit pas en France

L’Inde ouvre son marché aux avocats sud-africains

 
MINES

Le Zimbabwe place sous administration judiciaire sa seule mine de nickel, en raison de difficultés financières

L’australien Walkabout Resources ne produit toujours pas de graphite en Afrique, malgré les récentes avancées

Ghana : le propriétaire de la première mine de lithium autorisé à être coté sur la bourse locale

Guinée : l’australien Predictive annonce une levée de fonds de 32,6 millions $ pour son projet aurifère Bankan

 
TELECOM

Le Togo lance la portabilité des numéros mobiles

Nigeria : l’État de Kaduna met sous scellés des tours télécoms pour non-paiement de 4,1 millions $ de taxes

La data a soutenu une croissance de 32,5 % du chiffre d’affaires de MTN Ghana au 1er trimestre 2024

Airtel Africa négocie un prêt de 200 millions $ avec la SFI pour financer ses activités en RDC, au Rwanda et au Kenya

 
TRANSPORT

Afrique du Sud : 200ème rame de train de fabrication locale livrée par le consortium Gibela à la PRASA

Burkina Faso : financé par la BID, le lot 2A de l'aéroport Ouagadougou-Donsin achevé à 92%

Côte d’Ivoire Terminal obtient la certification EDGE-Advanced pour l’efficacité énergétique de ses bâtiments

Angola : le gouvernement dévoile un projet d'interconnexion des 3 corridors ferroviaires nationaux

 
ENTREPRENDRE

Le Triple-Double: NBA Africa Startup Accelerator appuiera les jeunes pousses africaines axées sur le sportif

Cameroun : l’État multiplie les accords avec les banques pour aider les PME à accéder aux financements

Avec Caytu Robotics, le Sénégalais Sidy Ndao permet de contrôler des robots multi-tâches à distance

La start-up malienne Kénèya Koura digitalise des processus de prise en charge sanitaire

 
ECHO

Dépenses en importations de riz en Afrique (2022)

Afrique : les pays acceptant le plus de passeports africains sans visa (2023)

Le passeport du Cameroun en 2023

UEMOA : les pays acceptant le plus de passeports africains sans visa

 
FORMATION

L’ESC Clermont Business School implante un campus au Maroc

Lancement des candidatures 2024 pour l'Ecole ouest-africaine sur la gouvernance de l'Internet

Au Nigeria, Google et l’Etat de Kaduna lancent une formation en intelligence artificielle en langue haoussa

La Gambie annonce la création d’une université spécialisée en sciences de l’éducation

 
COMM

Kenya : la radio est le média qui suscite le plus de confiance dans la population

A Cotonou, clap de fin grandiose pour le FInAB : une fusion entre art et culture

L’Arès Fighting Championship compte toujours organiser des évènements en Afrique mais « à moyen ou long terme »

LinkedIn lance des jeux pour mettre en compétition ses utilisateurs