(Agence Ecofin) - Le désintérêt des USA pendant la période Trump et les stratégies défaillantes de l’Europe à l’égard de l’Afrique ont ouvert un boulevard à la Russie qui pourtant investit peu sur le continent et profite d’une balance commerciale très en sa faveur.
Selon le Centre for Democracy and Development (CDD) d’Abuja, les Etats-Unis et l’Europe sont en partie responsables de l’augmentation de l’influence russe sur le continent africain. C’est ce que suggère le think tank nigerian dans son rapport « Russian Influence in West Africa » publié en juillet 2022.
« L'approche non interventionniste des États-Unis à l'égard du continent africain sous l'administration Trump, qui se poursuit sous Joe Biden, et le maintien d’une stratégie d'influence européenne défaillante ont permis à la Russie de s’affirmer », explique le rapport.
Selon l’étude, après le sommet de Sotchi, en octobre 2019, la Russie a identifié deux domaines qui bénéficieraient à sa coopération avec l’Afrique : l’économie et le support militaire.
« L’Occident était de plus en plus réticent à vendre des armes aux Etats ouest-africains en raison des inquiétudes quant à la façon dont les armes pourraient être utilisées pour violer les droits de l'homme [...] Pendant ce temps, l’accès aux armes était un problème pour les forces de sécurité du Nigeria et dans la région du Liptako-Gourma qui jouxte le Burkina Faso, le Mali et le Niger », explique le rapport.
Selon les données du centre Stockholm International Peace Research, « 13 % des armes russes sont vendues à des pays africains ». De nombreux contrats de collaboration ont été signés pendant le sommet de Sotchi pour fournir des armes à certains pays dans la lutte contre le terrorisme. Du côté économique, « les échanges commerciaux de la Russie et ses entreprises s’élèvent à 20 milliards $ par an selon Afreximbank. Le montant représente environ un dixième de la valeur des échanges commerciaux de la Chine avec l’Afrique », selon le rapport du CDD.
Conscients du boulevard laissé à la Russie sur certains axes de collaboration avec l’Afrique, les Etats-Unis essaient de se rapprocher davantage du continent. La sous-secrétaire d’État américaine Victoria Nuland a effectué, fin octobre, une visite au Sahel. Elle a rencontré le chef de la transition malienne Assimi Goïta et, celui du Burkina Faso, Ibrahim Traoré. Quelques jours avant, Anne Witkowsky, secrétaire d’État adjointe en charge des conflits et des opérations de stabilisation, a effectué une visite en Afrique de l’Ouest pour évoquer la stratégie des pays africains dans leur lutte contre le terrorisme.
Pendant ce temps, les puissances européennes présentes en Afrique ne savent pas encore comment contrer l’influence russe. La question a récemment fait l’objet d’un débat au sein du parlement allemand.
Servan Ahougnon
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