(Agence Ecofin) - Leur solidité en temps de crise, combinée à la prise de conscience progressive de l’urgence climatique a permis une croissance exceptionnelle des actifs durables sur les marchés financiers. Mieux, de nouveaux instruments bourgeonnent et pourraient voir le jour prochainement.
L’appétit des investisseurs pour les instruments de financement durable pourrait donner naissance à de nouveaux types d’instruments financiers durables.
A la faveur de la crise, les obligations vertes qui sont le principal outil de financement vert sur les marchés ont connu une forte croissance en 2020. Elles devraient continuer sur cette lancée en 2021, selon les analystes, avec une croissance de plus de 30 % projetée sur l’année. Cependant, elles ne suffiront pas à financer l’atteinte des objectifs climatiques.
Cette situation a poussé les universitaires et les activistes à proposer l’introduction d’un nouvel outil de financement climatique : les nature bonds. Ils demandent en effet des titres plus explicites sur la protection de l’environnement.
« Les obligations souveraines revêtent une importance capitale dans la réponse à la crise et la relance économique, et la nature devrait être au cœur du processus. Les solutions au changement climatique peuvent requérir un effort important. Si vous pensez à financer une relance écologique, elles devraient être à la première place de vos priorités de dépenses publiques », a affirmé Nick Robins, professeur à London School of Economics.
Une telle approche impliquerait que les pays atteignant les objectifs environnementaux fixés lors des mobilisations de fonds pourraient payer moins d’intérêts.
La Research Organization Finance for Biodiversity Initiative qui vise à accroître la matérialité de la biodiversité dans la prise de décision financière, a déjà mis en place un cadre pour ces obligations nature et est en négociation avec la Banque mondiale, les Etats-Unis et l’Europe pour qu’ils proposent aux pays émergents des financements sous cette forme, afin de soutenir leur croissance durable.
Le Pakistan pourrait être le premier à émettre jusqu’à 1 milliard $ de ce type d’obligation au cours de cette année 2021, selon Malick Amin Aslam, conseiller du Premier ministre au changement climatique.
Une autre proposition, faite par Sarasin & Partner sont les eden bonds. Ils s’appuient sur les données du panel intergouvernemental sur le changement climatique qui affirme que l’utilisation des terres est à la base de 25 % des émissions globales de gaz à effet de serre.
L’idée derrière les eden bonds est que l’Etat mobilise de la dette à long terme pour acquérir des terres privées et payer des investisseurs pour les garder vertes.
« Nous en sommes arrivés à un point où le capital naturel restant s’amenuise très rapidement. Pourquoi contracter plus de dettes pour acheter de la terre maintenant que nous avons réalisé le maximum d'émissions pour nous relever de la pandémie ? La réponse est que les problèmes liés au changement climatique et la perte de la biodiversité sont encore plus grands que ceux de la pandémie », a affirmé Henry Boucher, le responsable adjoint des investissements à Sarasin & Partners.
Les perspectives économiques des pays, les plus pauvres en particulier, pourraient être grandement affectées dans les prochaines années par leur gestion du capital naturel. Un aspect qui n’est pas encore pris en compte par les investisseurs.
« Si Nairobi manque d'eau, cela doit sûrement affecter la dette souveraine du Kenya », a déclaré Martijn Wilder, cofondateur de HSBC Pollination, un gestionnaire d’ordre mondial des actifs du capital naturel. Et d’ajouter : « mais personne n’y pense. Ce sont juste des choses que les gens ne comprennent pas. Nous devons reconnaître que nous sommes au début d'un voyage ».
L’émergence de toutes ces propositions marque un pas important dans l’extension du rôle des actifs durables sur un marché financier sur lequel ils étaient encore marginaux, il y a quelques années.
Gwladys Johnson Akinocho
Lomé, Togo - Organisé par la BIDC.