Agence Ecofin TikTok Agence Ecofin Youtube Agence WhatsApp
Agence Ecofin
Yaoundé - Cotonou - Lomé - Dakar - Abidjan - Libreville - Genève

Côte d’Ivoire : Amnesty International dénonce la détention de 18 opposants après une marche pour une réforme de la Commission électorale

  • Date de création: 24 mars 2018 20:16

(Agence Ecofin) - Dans un communiqué publié vendredi 23 mars, l’ONG internationale de défense des droits de l’homme, Amnesty International, a dénoncé la détention de 18 opposants ivoiriens suite à une « manifestation pacifique » tenue le 22 mars à Abidjan pour une réforme de la Commission électorale indépendante (CEI) en Côte d’Ivoire.

« Hier (22 mars – NDLR), la coalition Ensemble pour la démocratie et la souveraineté (EDS), avait appelé à une manifestation pacifique pour demander la réforme de la Commission électorale indépendante ; les autorités l’ont dispersée pour défaut d’autorisation. Plus de 40 personnes, dont Jean Gervais Tcheidé, vice-président du Front patriotique ivoirien (FPI, opposition) et Oula Anselme du même parti, ont été arrêtées. Dans la soirée, une partie des manifestants a été libérée, cependant 18 personnes demeurent encore en détention », déclare Amnesty International.

Ajoutant que « la manifestation n’avait pas été autorisée, nonobstant les discussions entre l’opposition et les autorités pour décider de son itinéraire. Ce n’est que la veille, assez tard dans la soirée, que l’interdiction a été communiquée ». Ainsi, « à défaut de les inculper d’une offense légitime sur la base de preuves suffisantes, toutes les personnes arrêtées doivent immédiatement être libérées », soutient l’ONG International.

A noter que ce même jour, un journaliste-bloggeur, Daouda Coulibaly, qui couvrait une autre manifestation organisée par l’Alliance des forces démocratiques (AFD, opposition) à proximité du siège de la CEI, a été également « agressé par les forces de police, arrêté puis relâché ».

Pour Gaetan Mootoo chercheur sur l’Afrique de l’Ouest à Amnesty International, « les restrictions systématiques au droit à la manifestation pacifique, droit garanti par la constitution, montrent la détermination des autorités à réduire au silence toute voix dissidente ».

Une Commission électorale de plus en plus contestée

Depuis quelques semaines, la CEI ainsi que son président Youssouf Bakayoko (photo) font l’objet de vives critiques de la part de l’opposition politique ivoirienne, sous le prétexte qu’elle serait « illégale » et « illégitime ». L’opposition appelant à une réforme pure et simple de cette institution en charge de l’organisation des élections en Côte d’Ivoire, ainsi qu’au départ de son président.

Pour justifier son action, l’opposition ivoirienne se base principalement sur un arrêt du 18 novembre 2016 de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, relatif à la Commission électorale indépendante de Côte d’Ivoire. En effet, saisie à la suite d’une plainte de l’ONG Action pour la protection des droits de l’homme (APDH) contre l’Etat de Côte d’Ivoire, cette Cour africaine a jugé « qu’en votant la loi qui fonde la CEI (en 2014 – NDLR), et qui est considérée comme ‘‘discriminatoire’’ envers l’opposition et les candidats indépendants, l’Etat ivoirien avait violé son obligation de créer un organe électoral indépendant et impartial, prévu par l’article 17 de la Charte africaine sur la démocratie et l’article 3 du protocole de la CEDEAO sur la démocratie et la bonne gouvernance, et qu’il a également, par voie de conséquence, violé le droit des citoyens de participer librement à la direction des affaires publiques de leur pays, droit garanti par l’article 13 (…) de la Charte africaines des droits de l’homme et des peuples ». Une décision à laquelle les autorités ivoiriennes n’entendent toutefois pas se soumettre.

En effet, en réponse à un appel à la tenue de concertations formulé par l’opposition ivoirienne, le gouvernement ivoirien tout en reconnaissant le caractère obligatoire de l’Arrêt de la Cour Africaine des droits de l’homme et des peuples, affirme cependant, « qu’il ne lui parait pas opportun de l’exécuter avant les échéances électorales ». Un refus qui, pour l’opposition ivoirienne, place « l’institution électorale dans une posture illégitime et illégale qui affecte et entache de nullité toutes les élections qu’elle est amenée à organiser sur injonction du gouvernement ».

A noter que la Côte d’Ivoire fait partie des pays ayant ratifié le Protocole établissant la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, et produit une déclaration spéciale – prévu dans ledit protocole - acceptant la compétence de la Cour pour permettre à ses citoyens de la saisir directement.

Le début des échéances électorales

L’intensification de cette contestation de l’opposition ivoirienne contre la CEI intervient alors que le pays entre dans une série d’échéances électorales. En effet, ce samedi, se sont tenues les premières élections sénatoriales de l’histoire du pays. Les 7011 grands électeurs (députés et élus locaux) doivent ainsi choisir 66 sénateurs, tandis que 33 autres seront nommés par le Président Alassane Ouattara en vertu de la nouvelle Constitution ivoirienne adoptée par référendum en novembre 2016. Le scrutin avait toutefois été boycotté par l’opposition.

Par ailleurs, cette année 2018 devrait également voir la tenue d’élections municipales et régionales. Quant à l’élection présidentielle, elle devrait en principe se tenir en 2020.

Enveloppe Recevez chaque semaine la lettre
Ecofin Droits