Les banques nigérianes se portent mieux, mais présentent plusieurs éléments de fragilité

(Ecofin Hebdo) - A mesure que l’économie du Nigéria se remet peu à peu des conséquences négatives de la baisse des cours du pétrole, les performances des banques s’améliorent aussi, tout doucement, même si des signes de fragilité persistent. Les performances des banques cotées sur le Nigéria Stock Exchange, dont les données sont disponibles, livrent plusieurs enseignements sur la situation actuelle.

Avec un bénéfice net cumulé de 332,6 milliards de Nairas (967 millions $) au terme du premier semestre 2018, les neuf banques cotées les plus importantes du Nigeria Stock Exchange, ont confirmé le retour à une meilleure santé de leur secteur. Cette performance représente une progression 13,6%, comparée aux indicateurs fournis sur la même période en 2017.

 

Un contexte macroéconomique qui présente des signaux positifs.

Cette embellie vient donner raison aux analystes qui avaient prédit une évolution positive de l’environnement macro-économique nigérian, et donc de la rentabilité des banques. Selon des données de l’administration en charge des statistiques, la croissance du produit intérieur brut hors inflation a été de 1,9% au cours du premier trimestre 2018, contre une récession de 0,9% pour la période correspondante en 2017.

evolution

 

Dans le même temps le comité de politique monétaire de la banque centrale du Nigéria a maintenu son principal taux directeur à 14%, alors même que l’inflation a continué de baisser pour atteindre 11,2% à la fin du mois de juin 2018. Une situation intéressante lorsqu’on sait que le repli de l’inflation produit un effet de hausse sur les rendements des obligations et réduit la pression sur la capacité des emprunteurs à rembourser les crédits obtenus.

Enfin les réserves de change du pays se sont, une fois encore, renforcées pour atteindre 47,2 milliards $ au 23 juillet 2018. Une situation favorable les banques qui auront une moindre contrainte à mobiliser des capitaux sur le marché international.

Enfin les réserves de change du pays se sont, une fois encore, renforcées pour atteindre 47,2 milliards $ au 23 juillet 2018. Une situation favorable les banques qui auront une moindre contrainte à mobiliser des capitaux sur le marché international pour satisfaire leurs objectifs d’exploitation, et surtout à un moment où les taux servis sur les obligations en provenance des marchés émergents sont repartis à la hausse.

 

La reprise au rendez-vous pour les banques cotées

Cet environnement n’a pas manqué d’influer positivement sur la performance de plusieurs banques parmi les plus importantes du pays, et dont l’Agence Ecofin a obtenu les chiffres. C’est le cas des groupes FBN Holdings et Zenith Bank, dont les bénéfices nets respectifs (33,5 et 87,1 milliards de nairas) au cours des 6 mois s’achevant le 30 juin 2018, ont affiché des progressions de 15,9% et 8,5%.

On peut aussi mentionner la performance de Guaranty Trust Bank qui demeure la banque la plus rentable du pays, avec un bénéfice net de 109 milliards de nairas en hausse de 8,4%. Il y a aussi lieu de souligner les performances de Sterling Bank et Stanbic IBTC dont les bénéfices nets ont bondi respectivement de 63,5% et 78%.

indicateurs

 

Parmi les indicateurs positifs qui ont accompagné cette rentabilité globale, on relève une amélioration significative des revenus de frais et commission perçus (+19,2% pour les banques analysées). On a pu noter pour certaines banques comme Stanbic, une progression remarquable des revenus de trading sur des instruments financiers (majoritairement les titres émis par le Trésor Public nigérian). Plus globalement, l’endettement des banques cotées à reculer près de 2% comparé au volume qui était le sien au 31 décembre 2017.

 

Des fragilités persistent cependant

Derrière ces éléments positifs, se cachent certains signes de fragilités. Au niveau macro-économique, l’embellie observée est principalement le fait de l’amélioration des prix du pétrole. Dans sa note d’analyse sur le secteur bancaire nigérian publié en mai 2018, l’Agence de notation Moody’s faisait remarquer que l’augmentation des réserves de change, conséquence directe de la hausse des prix du baril de pétrole sur le marché mondial, a permis à la banque centrale d’injecter plus de dollars sur le marché monétaire, ce qui a réduit le coût des importations et, partant, les prix sur le marché.

GTbank

GTBank, la banque la plus rentable du pays.

 

En cas d’un nouveau choc extérieur de même ampleur ces différents acquis pourraient s’effondrer. Moody’s soulignait aussi, comme élément de fragilité, la trop grande exposition des banques commerciales nigérianes au secteur pétrolier. Une situation dont les banques semblent avoir du mal à se débarrasser. A la fin du deuxième trimestre l’encours global des prêts au secteur pétrole et gaz était 3452 milliards de Nairas selon des données du bureau national des statistiques.

Moody’s soulignait aussi, comme élément de fragilité, la trop grande exposition des banques commerciales nigérianes au secteur pétrolier. Une situation dont les banques semblent avoir du mal à se débarrasser. 

Ce niveau d’encours représente 22,57% du volume total des crédits accordés par le secteur bancaire à l’économie nigériane. Un niveau qui est en forte hausse comparé aux 16,9% du premier semestre 2016. Aussi, on note que le volume des crédits accordés par les banques dans le secteur pétrolier et gazier a augmenté, alors que globalement, le volume de crédits distribués a reculé, comparé à celui de décembre 2017. Chez les banques cotées cette baisse est de 5% exclusivement sur les prêts accordés à la clientèle.

Les analystes de Moody’s ont aussi fait remarquer que la croissance économique actuelle qui stimule le secteur, et qui est attendue à 2,9% à la fin de 2018, demeure faible, en comparaison avec la moyenne de 6,4% de croissance que le Nigéria a connu entre 2009 et 2014. Dans un tel contexte, le secteur bancaire restera fragilisé des créances douteuses, dont l’encours est toujours important, en comparaison de la situation dans d’autres pays d’Afrique.

Un autre élément de fragilité dans le secteur, c’est l’entrée en vigueur de la norme comptable IFRS 9 devenue effective depuis le premier janvier au Nigéria. Moody’s avait estimé que cela se traduirait par une réduction des fonds propres, a mesure que les banques se mettront à provisionner certains risques qui jusque-là n’étaient pas pris en compte. Plusieurs scénarios de conséquences sont déjà perceptibles.

Un autre élément de fragilité dans le secteur, c’est l’entrée en vigueur de la norme comptable IFRS 9 devenue effective depuis le premier janvier au Nigéria.

Avec les banques cotées étudiées, on a noté un repli de l’encours des crédits accordés aux clients et, dans ce sillage, une baisse des revenus d’intérêt de 1%.

On relève aussi une baisse des fonds propres des actionnaires de près de 9% et, pour l’exercice 2018, la distribution des dividendes sera à suivre. Plusieurs analystes sont d’avis que le rendement pour les investisseurs des banques nigérianes sera en baisse.

 Idriss Linge

 Idriss Linge

 

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