Où va l’économie du Nigéria en 2019 selon PwC

(Ecofin Hebdo) - Il y a quelques jours, le cabinet PricewaterhouseCoopers (PwC) a publié un nouveau rapport sur l’économie du Nigéria. A partir d’un bilan de l’année 2018, le document dresse les perspectives économiques 209 du pays le plus peuplé d’Afrique de l’ouest.

 

1) Les financements de la diaspora en hausse

D’après PwC, les Nigérians vivant à l’étranger financent de plus en plus l’économie du pays. En 2018, ils auraient réalisé pour 25 milliards $ d’envois de fonds à destination de leur pays, contre 22 milliards en 2017. Ce montant, sept fois supérieur à celui de l’aide publique au développement reçu par le pays en 2017 (3,3 milliards), a porté la part de ces financements à 6,1% du PIB.

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Les Nigérians de l’étranger apportent au pays 7 fois plus de cash que toute l’aide publique au développement.

 

Selon le cabinet d’audit, cette tendance à la hausse devrait se confirmer en 2019. Hormis les envois de fonds, la diaspora nigériane s’investit de plus en plus dans les projets de développement locaux. Ainsi, le gouvernement a annoncé, il y a quelques semaines, un investissement de près de 3 milliards $ de la part de sa diaspora, principalement celle vivant aux Etats-Unis. Cet investissement devrait permettre de développer des projets dans des secteurs comme l’agriculture, l’énergie, les mines et le transport.

 

2) Faible reprise de la croissance économique et incertitudes liées au climat politique

En 2019, la croissance économique nigériane, entrée en quasi-léthargie depuis quelques années, devrait enregistrer une légère reprise. De 1,9% en 2018, le rapport table sur croissance à 2,5% pour le pays, en 2019.

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Une amélioration modérée des exportations nettes et de la demande intérieure.

 

Cette progression devrait être liée à une amélioration modérée des exportations nettes et de la demande intérieure. Cependant, ces prévisions continuent d’être fortement soumises aux fluctuations du secteur des hydrocarbures. « La baisse de la demande de pétrole, conjuguée aux réductions de l'offre de production et aux fluctuations des prix, aura une incidence sur la trajectoire de croissance de l'économie », indique le rapport.

Alors que les investissements directs étrangers (IDE) en Afrique ont affiché une hausse de 6% en 2018, le Nigéria a enregistré une chute de 36% de son flux d’IDE par rapport à 2017.

Selon PwC, le Nigeria aurait besoin de porter la part des investissements à 26% de son PIB, pour atteindre une croissance de 7%. Mais paradoxalement, l’étude note une baisse des investissements étrangers captés par le Nigeria depuis 2016. Alors que les investissements directs étrangers (IDE) en Afrique ont affiché une hausse de 6% en 2018, le Nigéria a enregistré une chute de 36% de son flux d’IDE par rapport à 2017.

La faiblesse des réformes politiques mises en place, ainsi que le climat sécuritaire délétère seraient l’une des causes de recul. Couplés aux incertitudes liées aux climats politiques pré et post électoraux, cette situation pourrait « freiner » les investissements dans le pays à court terme.

 

3) Baisse des recettes pétrolières et accroissement du déficit budgétaire

Le rapport indique que l’économie nigériane reste vulnérable aux fluctuations des prix des matières premières, en particulier le pétrole. En effet, la courbe de production pétrolière continue de descendre en dessous de l'objectif moyen de 2 millions de barils par jour (mbpj) fixé par le gouvernement central. De plus, l’Organisation des pays exportateurs du pétrole (OPEP) a abaissé le niveau de production pétrolière du Nigeria à 1,685 mbpj. Les auteurs du rapport indiquent que cette réduction, couplée aux fluctuations du prix du pétrole, aura un impact sur l’exécution budgétaire de l'année 2019. Les risques de perturbations liées aux attaques des plateformes de production pétrolières par des groupes armés, devraient également impacter le niveau des rentes pétrolières.

Les risques de perturbations liées aux attaques des plateformes de production pétrolières par des groupes armés, devraient également impacter le niveau des rentes pétrolières.

Le déficit budgétaire de l’Etat nigérian va probablement s’accroître cette année. D’après les analyses de PwC, il devrait se creuser de 79%. Les recettes de l’Etat fédéral nigérian devraient être de 27% inférieures aux dépenses, ce qui portera le déficit budgétaire à 3% du PIB. « Par conséquent, le ratio du service de la dette aux recettes augmente plus rapidement que les 31 % prévus dans le budget. Nous prévoyons que le déficit sera financé par une augmentation des émissions sur le marché obligataire intérieur » indique le rapport.

 

4) Légère hausse de l’inflation, causée par les effets de base

Le taux d’inflation annuel 2019, devrait être légèrement en hausse par rapport à 2018. D’un taux estimé à 11,2% l’année dernière, l’inflation devrait s’accélérer de deux points de base pour atteindre les 13% en glissement annuel. Les défis en matière de sécurité alimentaire liés au changement climatique et aux conflits dans les principales régions productrices de denrées, devraient faire grimper l’inflation alimentaire à 15% en glissement annuel.

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L’inflation alimentaire devait grimper à 15% en glissement annuel.

 

L’inflation de base, quant à elle, devrait atteindre les 11%. Ceci, en raison d’une légère augmentation de la demande en consommation qui se manifeste par l’augmentation du salaire minimal ainsi que la hausse des coûts du transport.

 

5) Dépréciation du taux de change et risques de hausse du prix de l’essence

Le rapport indique également que le taux de change du Naira par rapport au dollar devrait subir des contrecoups. En 2018, la banque centrale du Nigéria a augmenté de 87% ses injections de dollars dans le marché des changes, pour les porter à 40 milliards $. Cette mesure devait contribuer à stabiliser le marché des changes jusqu’au début 2019, alors que les pressions exercées par la demande en dollars sont de plus en plus soutenues. La volatilité du marché pétrolier devrait compliquer les choses. Vers la fin de l’année 2019, elle pourrait entraîner une dépréciation qui pourrait se situer entre environ 390 et 415 nairas pour un dollar alors que le taux actuel est d’environ 360 nairas pour un dollar.

Vers la fin de l’année 2019, elle pourrait entraîner une dépréciation qui pourrait se situer entre environ 390 et 415 nairas pour un dollar alors que le taux actuel est d’environ 360 nairas pour un dollar.

La dépréciation du naira, face au dollar, pourrait également faire grimper le prix de l’essence. Actuellement fixé à 145 nairas le litre, ce chiffre pourrait être revu à la hausse selon les différents scénarios du cabinet PwC.

 

6) Hausse du taux de chômage sur fond de boom démographique

Le Nigéria, qui est déjà le pays le plus peuplé d’Afrique avec une population de plus de 196 millions d’habitants, devrait enregistrer une importante croissance démographique d’ici les prochaines années. Selon les chiffres relayés par PwC, la population du pays devrait passer à 206 millions d’habitants en 2020, et 264 millions en 2030. Ce chiffre devrait encore augmenter pour atteindre 333 millions d’habitants en 2040 et 398 millions en 2050.

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333 millions d’habitants en 2040.

 

Ce boom démographique ferait grimper le nombre d’individus composant la population jeune du pays, déjà majoritaire. Au Nigéria plus de la moitié de la population a moins de 30 ans.

Selon les chiffres relayés par PwC, la population du pays devrait passer à 206 millions d’habitants en 2020, et 264 millions en 2030.

Si cette augmentation de la population du pays soulève de nouveaux problèmes quant à l’offre en logements et en nourriture, c’est surtout le secteur de l’emploi qui semble plus menacé. Les estimations de PwC montrent que le taux de chômage du pays n’a pas cessé de croître depuis 2014. D’un taux d’à peu près 6% en 2014, le chômage a explosé pour atteindre environ 21% en 2018. Une tendance prévue pour se maintenir en 2019.

Le rapport indique également que la catégorie de la population la plus touchée par ce phénomène, est celle des jeunes de la tranche d’âge de 15 à 24 ans. Ceux-ci constituent 36, 5% des chômeurs du pays, suivi des jeunes entre 25 et 34 ans, qui comptent pour 24,4% de la population au chômage.

7) Incertitudes liées à l’environnement extérieur

L’environnement extérieur influencera également l’environnement macroéconomique nigérian en 2019. En effet, une violation par les membres de l'OPEP de l'accord sur les réductions de production et l'augmentation de la production de shale, pourrait impacter l’économie nigériane à court ou moyen terme. Concernant cette situation, le rapport indique que la probabilité de survenance d’un tel scénario est très élevée.

Aussi, un ralentissement de la croissance des principaux partenaires commerciaux du pays (Chine, USA, Inde, Royaume-Uni) pourrait à court ou moyen terme avoir un impact moyen sur le pays ouest-africain.

Enfin le rapport indique que « la normalisation en cours de la politique monétaire aux États-Unis pourrait conduire à un renversement de la tendance des capitaux étrangers et restreindre leurs flux ». Ce qui pourrait également impacter l’économie du Nigeria.

Moutiou Adjibi Nourou

Moutiou Adjibi

 

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