(Agence Ecofin) - La réduction du torchage du gaz naturel est l’un des plus gros défis énergétiques du monde. Malgré les nombreux signalements sur la dangerosité du processus pour l’environnement et le frein qu’il représente pour les efforts de la transition énergétique, on y a de plus en plus recours.
Dans son rapport Gas Flaring-Thematic Research, publié cette semaine, la société britannique d’analyses et de conseils GlobalData a révélé que le torchage du gaz naturel représente chaque année un manque à gagner de 82 milliards de dollars pour les pays producteurs. « Les pays pourraient gagner jusqu’à 82 milliards de dollars, s’ils utilisaient ce gaz au lieu de le brûler », a expliqué le document.
D’après Anna Belova, analyste principale chez GlobalData, l’année dernière, les 12 premiers pays producteurs de gaz ont brûlé à la torche près de 13 milliards de pieds cubes de gaz par jour. En replaçant cette donnée dans son contexte, on se rend compte que ce volume de gaz pourrait facilement alimenter l’ensemble du Japon pendant un an.
L’Algérie, l’Angola, la Libye et le Nigéria comptent parmi les plus gros producteurs de gaz torché du monde. Avec l’Indonésie, l’Iran, l’Irak, la Malaisie, le Mexique, la Russie, le Venezuela et les Etats-Unis, ils ont rejeté en 2020, plus de 87 % de l’ensemble du gaz torché dans le monde. Au Nigéria, par exemple, les rejets des trois dernières années ont été estimés à plus de 2 milliards de dollars.
La valeur du gaz brûlé à la torche, lorsqu’elle est évaluée en fonction des prix intérieurs en Russie ou aux Etats-Unis par exemple, est souvent quatre fois inférieure à ce que le gaz pourrait valoir sur les marchés européens ou asiatiques.
Outre la perte de revenus, le torchage constitue un large problème environnemental. Le méthane qu’il contient est l’un des principaux responsables du réchauffement climatique. Pour les pays producteurs, la problématique fragilise leur engagement à réduire les émissions de CO2 d’ici 2050. Vu qu’ils comptent dans le cadre de l’atteinte de la neutralité carbone, continuer d’exploiter du gaz naturel, il urge qu’ils obligent les opérateurs à récupérer ce gaz.
Il faut rappeler que les producteurs laissent ce gaz s’échapper lors de l’extraction du pétrole, car ils estiment qu’il reviendrait trop cher de capter ce gaz et de le traiter. La situation est encore exacerbée par le faible prix du gaz dans la plupart des pays qui brûlent le plus de gaz. De nombreux pays torchent le gaz en raison du manque d’accès à de meilleurs marchés, combiné aux faibles volumes de gaz produits sur les sites pétroliers individuels, explique le rapport.
« Etant donné que des solutions technologiques existent à de multiples échelles, des pressions réglementaires et des partenaires sont nécessaires pour stimuler des investissements, soutenus par des engagements environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) volontaire de la part des opérateurs pour mettre fin au torchage systématique du gaz à l’échelle mondiale », a ajouté Belova.
Il faut savoir qu’en Arabie Saoudite, on a réussi à combiner plusieurs sites de différents opérateurs pour récupérer le gaz torché et le transformer. Une approche désormais appliquée au Texas, où le gaz est transformé en GNL. En Russie, le gaz récupéré est utilisé comme matière première pour l’industrie pétrochimique.
Olivier de Souza