(Agence Ecofin) - La covid-19 et le changement climatique sont des menaces pour l’emploi en Afrique. Le taux de chômage chez les jeunes est en hausse, et le continent souffre d’un déficit de ressource humaine qualifiée, dû à l’inadéquation des programmes de formation à la demande du marché de l’emploi.
Entre la récession des entreprises et des gouvernements, l’emploi est très affecté par la crise du coronavirus. Avec un système de l’emploi déjà fragile, l’Afrique se trouve plus que les autres parties du monde confrontée à la dure réalité du chômage.
Selon l'Union africaine, près de 20 millions d'emplois, à la fois dans les secteurs formel et informel sont menacés de destruction. L’ONU quant à elle, parle de 50 millions d'emplois. De son côté, l’Organisation internationale du Travail relève qu’un jeune sur six qui travaillait avant le début de la crise sanitaire a complètement cessé de travailler.
Nul doute que les jeunes sont les plus touchés, en raison des multiples perturbations dans le domaine éducatif et dans la formation, telles que la fermeture des lieux de formation et la formation à distance encore très limitée du fait de la faiblesse des infrastructures technologiques.
Pendant que le chômage s’accroit, le continent vit déjà les affres du changement climatique. Les inondations sont de plus en plus fréquentes. Dans la matinée du 21 août 2020, la capitale économique du Cameroun, Douala, s’est réveillée les pieds dans l’eau. La catastrophe d’ordre météorologique a eu un grand impact sur le secteur économique.
Serges Ngatchi, propriétaire de la chaîne de restaurant Allô Poulet a annoncé avoir perdu 2000 poussins et d’autres matériaux évalués à près d’une dizaine de millions FCFA. Des pertes qui pourraient contraindre le chef d’entreprise à réduire son activité et son personnel. Le Tchad, la Centrafrique, le Nigeria, la RDC sont entre autres des pays qui font également face aux inondations.
Le changement climatique est également un réel défi pour le secteur agricole qui visiblement a du mal à s’adapter aux fluctuations des saisons. La productivité agricole en Afrique est plus de quatre fois moins que celle des pays à fort rendement, alors que le continent dispose de 60 % du potentiel de terres arables encore disponibles dans le monde. Pourtant, le continent compte sur les importations pour se nourrir.
Les programmes de formation loin des besoins du marché de l’emploi
Face à tous ces défis, l’Afrique a urgemment besoin d’une main-d’œuvre qualifiée pour tenir ses objectifs de développement. La Fondation pour le renforcement des capacités en Afrique (ACBF), une agence spécialisée de l’Union africaine estime la pénurie en ressource humaine en Afrique à plus de huit millions de médecins et de spécialistes, plus d'un million de chercheurs, plus de quatre millions d'ingénieurs et de près de 70 000 agronomes, alors que le taux de chômage ne fait que monter. Il faut voir dans ce paradoxe, l’incapacité du système de formation à produire des personnes qualifiées dont a besoin le marché du travail.
Dans les universités et autres centres de formation, les programmes sont restés les mêmes depuis une dizaine d’années. Les sciences humaines et sociales sont celles qui attirent le plus d’étudiants dans un monde dominé par le digital et l’intelligence artificielle. Ces filières ne sont pas inutiles au développement, mais pas prioritaires. En 2015 par exemple, pour arrimer ses formations aux besoins de développement, le Japon avait décidé de fermer 26 facultés de sciences humaines et sociales.
Le World Economic Forum estimait en 2017 que les jeunes Africains, titulaires d’un diplôme en sciences, technologie, ingénierie et mathématiques (STEM) ne représentaient que 2% des universitaires du continent. En plus du faible taux des étudiants formés, il s’avère que le contenu de ces formations est dépassé.
Motivés par le besoin de s’adapter à l’évolution constante de la société et du marché de l’emploi, les responsables des universités africaines avaient décidé de réviser tous les trois à cinq ans, les programmes d’enseignement relatifs aux STEM, mais jusqu’ici, la décision tarde à se matérialiser.
La Banque mondiale a indiqué que seulement 2% des étudiants africains se spécialisent dans les filières agricoles, alors que ce secteur représente 60% du marché de l’emploi. Cela avait fait dire que le continent se prépare mal au futur monde de l’emploi, à la quatrième révolution industrielle.
Gouvernements et entreprises pointés du doigt
Le faible accès aux études secondaires et universitaires en Afrique prépare mal les jeunes à intégrer le marché du travail. En indiquant que la qualité de l'éducation et de la formation dans les pays africains s'est détériorée, la Fondation Mo Ibrahim a dans son étude 2019 sur la gouvernance en Afrique appelé les gouvernements à investir davantage pour garantir la qualité des formations. Toutefois, Les Etats restent les grands contributeurs aux dépenses de l’enseignement et de la formation technique et professionnelle. Mais ce financement évalué à seulement 2 à 6% des dépenses publiques d’éducation reste toujours faible.
Les entreprises sont aussi garantes de la formation continue des employés. Au Maroc, d’après l’enquête nationale des entreprises, en 2019, seulement 26% des entreprises ont mené des actions de formation au profit de leur personnel.
Les entreprises forment peu leur personnel, même si en Afrique francophone, la formation continue croît à plus de 20% par an. La majorité des entreprises qui forment sont de grandes entreprises qui y consacrent en moyenne 5 à 6 % de leur masse salariale.
Les avantages de la formation continue sont évidents. Elle permet aux entreprises de faire notamment face à la concurrence et surtout d’avoir une ressource humaine qualifiée pour anticiper ou tenir face aux chocs extérieurs.
Vanessa Ngono Atanagana
Kigali Convention Center, Rwanda - Annual conference and exhibition, which was established in 2005. The largest and most comprehensive knowledge sharing event for digital education, training and skills on the African continent.