(Agence Ecofin) - Dans un contexte purement africain, on aurait dit, parlant de l'affaire des dettes cachées du Mozambique, que la grande palabre est en cours, avec au centre des arbitrages, le Fonds Monétaire International, dont une délégation est actuellement en visite dans ce pays lusophone de l'Afrique australe.
Toutes les parties impliquées dans le processus se lancent des accusations ou se trouvent des excuses dans ce qui est l'un des plus gros scandales de finance publique en Afrique, de ces cinq dernières années.
La firme d'audit et d'analyse de risque Kroll Inc, qui a été engagée comme auditeur indépendant de cette affaire, a dévoilé dans son rapport, l'existence d'une autre dette cachée de 500 millions $. Elle a aussi affirmé que Crédit Suisse et VTB Bank ont touché plus de 100 millions $ de frais d'intermédiation. Une information à laquelle les deux groupes bancaires, helvétique et russe, ont apporté un démenti public.
Crédit Suisse a indiqué, que l'information contenue dans le rapport et faisant état de la perception par elle de 100 millions $ ou plus, est complètement erronée. Une déclaration qui met en cause la crédibilité des travaux de Kroll. « Nous avons reçu 23 millions $, ce qui représente à peine 2,3% du montant global du financement arrangé. Cette commission est conforme à la pratique habituelle dans ce type d'opération », a déclaré la banque suisse.
Le groupe des créanciers du Mozambique, pour sa part, reproche le flou légal sur la situation de cette dette dont il ne sait comment obtenir le remboursement, après que le gouvernement du Mozambique se soit déclaré incapable de faire face. Il blâme aussi VTB Bank et Crédit Suisse de ne leur avoir rien dit sur les autres créances qu'elles avaient sur le Mozambique, au moment où était organisé le rééchelonnement des obligations précédentes, début 2016. VTB Bank enfin reproche à ce groupe de créanciers sa trop grande rigidité, et son refus d’examiner des possiblités légales d’ouvrir de nouvelles négociations de restructuration.
Tous les regards sont désormais fixés sur le FMI, dont la mission au Mozambique s'achève le 19 juillet. L'institution de Brettons Woods , elle-même, n’est pas en reste. Le rapport Kroll dévoile qu'elle était au courant des dettes aujourd'hui mises en cause.
Plus que tous les autres, la responsabilité de VTB Bank et de Crédit Suisse est décriée. Kroll Inc, dans son rapport, se demande, par exemple, comment les deux banques d'affaires ont pu négocier des prêts pour des entités qui ne généraient visiblement pas de revenus, et dont le modèle d’affaires ne laissait pas espérer qu’elles puissent en générer.
Ce cas de la dette mozambicaine ne manquera pas de donner des arguments aux défenseurs d'une annulation pure et simple de ce type de dette africaine. Selon les tenants de cette thèse, les populations africaines se retrouvent à rembourser des emprunts parfois illégitimement contractés par leurs gouvernements, pour des raisons qui ne sont pas toujours celles de l'intérêt général.
Idriss Linge
Lomé, Togo - Organisé par la BIDC.