(Agence Ecofin) - Jusque-là, sans véritable réponse, la flambée des taux de change entre le franc CFA utilisé en zone CEMAC et les autres devises internationales, notamment l'euro et le dollar américain, peut désormais être comprise. S’il demeure constant que le jeu trouble de certaines banques puisse être mis en cause, la responsabilité de la Banque centrale commune aux pays de cette sous-région n'est pas négligeable.
Le 10 juin 2019 dernier, le gouverneur de cette institution a signé une série d'instructions, dont l'une d'elles concerne l'exercice de l'activité de change manuel en zone CEMAC. Deux principales dispositions de cette règlementation attirent l'attention.
La première, c'est que toute personne individuelle qui est mandatée par un bureau de change agréé a le droit d’exercer l'activité. Il n'est pas clair si toutes les personnes qui sont présentes dans les rues des grandes villes de la CEMAC possèdent cette autorisation, mais d'une certaine manière leur activité dispose désormais d'un levier pour être légitimée et formalisée.
Aussi, la BEAC a pris une position sur la tarification du change qui non seulement se distancie de la lettre du règlement initial, mais encore explique la hausse des prix. Dans le règlement de change de décembre 2018, il est prévu que les transferts de fonds vers l'extérieur « peuvent être soumis à une commission de transfert déterminée par le libre jeu de la concurrence ». L'instruction semble diluer cette disposition. Désormais, ce libre jeu de la concurrence se déploie dans une fourchette des prix administrés.
L’article 10 de l'instruction sur l'activité de change indique que la conversion du CFA avec des devises autres que l'euro peut se faire à une valeur située 5% en plus ou en moins du taux officiel fixé par la BEAC. En plus de cette possibilité d'appliquer un taux de conversion de 5% supérieur, la BEAC autorise désormais les agents de change à prélever une commission qui peut atteindre 5% hors taxes de la valeur échangée.
Le texte de l'institution d'émission monétaire est présenté comme un minima, mais rien n'empêche les opérateurs de change d'appliquer le niveau le plus élevé de ce minima. Dans de telles conditions, on peut comprendre que les taux de change se soient envolés. Des opérateurs affirment avoir payé des commissions de change qui ne dépassaient pas les 0,8% de la valeur échangée.
Idriss Linge
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