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Burkina Faso : risque de suspension dans l’attribution des titres miniers en 2017 ?

Si ce scénario paraît quelque peu illusoire tant l’industrie minière est devenue depuis quelques années la véritable locomotive économique du Burkina Faso, c’est en tout cas une recommandation forte du récent rapport de la Commission d’enquête parlementaire (CEP) sur la gestion des titres miniers et la responsabilité sociale des entreprises minières qui a récemment été rendu publique par l’Assemblée Nationale Burkinabé. Dans l’attente de l’adoption des règlements d’application du récent code minier (2015), certains enseignements peuvent toutefois être tirés des conclusions de ce rapport.

De nombreuses irrégularités relevées dans l’attribution des titres miniers

En vérifiant l’évolution de l’attribution du nombre des titres miniers délivrés de 2005 à 2015, la CEP constate dans son rapport que ce sont au total 778 permis de recherche, d’exploration et d’exploitation qui ont été attribués au cours de cette période dont seulement 467 seraient valides au 30 juin 2016. Ce sont donc 311 titres miniers qui seraient actuellement invalides ou illégalement détenus au Burkina Faso. Comment expliquer cette situation ?

ü  Un cadastre minier encore largement défaillant

La Direction générale du cadastre minier et des informations minières joue en effet un rôle clé dans l’attribution des titres miniers au Burkina Faso étant donné que les dossiers de demande d’attribution des autorisations et titres miniers y sont déposés et enregistrés[1]. Cette direction ne dispose cependant pas d’une exclusivité dans le traitement de ces demandes, l’instruction des dossiers étant effectuée par la Direction générale des mines et de la géologie.

Cette multiplicité des acteurs dans le traitement des demandes d’attribution de titres miniers entraîne de graves disfonctionnements notamment sur la mise à jour des cartes topographiques et des différents registres miniers. Le rapport de la CPE fait aussi état de nombreuses entorses au principe du « premier arrivé, premier servi » selon lequel le premier demandeur d’une zone délimitée par un titre minier et dont le dossier respecte les dispositions du code minier a la priorité sur tout autre demandeur dans l’attribution du permis en cause. Il est relevé dans ce sens que les agents du cadastre minier reçoivent parfois des instructions pour la suite à donner à certaine demande en dépit de la priorité normalement donnée au premier demandeur.

ü  De nombreux titres miniers sont invalides du fait de leur expiration

 

Selon les conclusions du rapport de la CEP, de nombreux permis de recherche pourtant expirés ne font pas systématiquement l’objet d’un acte administratif constatant la fin des droits du titulaire du permis, ce qui ne permet pas l’actualisation du registre minier et des cartes topographiques du cadastre. Cette constatation administrative interviendrait en moyenne de 1 à 10 ans après la date d’expiration du permis. Rien que pour l’année 2014, les services du cadastre minier burkinabé évaluent à environ 135 le nombre de permis de recherche concerné par l’expiration, avec un délai moyen de deux ans avant l’adoption d’un acte administratif constatant cette dernière.

Ces chiffres sont tout à fait considérables et montrent à quel point il existe à l’heure actuelle de nombreux permis de recherche expirés et non encore inscrits comme tels au registre minier ainsi que sur les cartes topographiques du cadastre. Les conséquences sont désastreuses à la fois pour l’administration des mines qui ne dispose plus d’un registre minier à jour et donc d’un outil permettant de contrôler le respect de la réglementation minière mais aussi et surtout pour les investisseurs miniers qui sont placés dans une situation d’insécurité juridique quand à la question de l’existence même de leur titre minier.

 

Une très importante spéculation constatée sur les permis de recherche

 

Le rapport de la CEP met par ailleurs en lumière une pratique bien connue par l’industrie minière en Afrique, celle de la spéculation sur les titres miniers et plus particulièrement sur les permis de recherche. Selon les estimations de la CEP, elle constituerait un manque à gagner pour l’Etat Burkinabé de plus de 42 milliards de Francs CFA (environ 70 millions dollars US).

Depuis 2005, plus de 700 permis de recherche auraient été délivrés dont 193 au titre de l’année 2011. Cet accroissement significatif du nombre d’attribution de permis de recherche, notamment dans des moments de crises institutionnelles et sociales qui ont agité le pays ces dernières années, laisse à penser que de nombreux titres miniers ont été attribués sans motif économique réel autre que celui d’une pure spéculation.

Le rapport de la CEP note dans ce sens que de nombreux permis de recherche, essentiellement aurifères, on été attribués à des non-professionnels du secteur n’ayant ni les moyens, ni les compétences pour effectivement explorer ces permis. D’après des travaux du Bureau des mines et de la géologie du Burkina (BUMIGEB), les permis de recherche préalablement attribués à des non-professionnels du secteur minier sont par la suite cédés à des société minières pour un droit fixe de 100 000 dollars US, assorti le plus souvent d’une clause d’attribution d’une part (généralement de 5% à 10%) dans le capital de la future société d’exploitation.

Outre le manque à gagner possible de l’Etat Burkinabé sur les plus-values de cession dans le cas où le prix de cession réel serait caché à l’administration, cette pratique crée une bulle complétement artificielle au détriment de l’Etat car les premiers attributaires des permis de recherche n’ont généralement effectués aucun travail préparatoire permettant de justifier leurs reventes à de tels conditions.

Ce système met aussi en évidence les dysfonctionnements institutionnels existant au sein de l’administration des mines. C’est ce que ne manque pas de rappeler la CEP dans son rapport en soulignant par exemple le manque de moyens alloués à l’administration des mines: le personnel de la Direction générale du cadastre minier n’étant actuellement composé que de cinq ingénieurs et techniciens...

En conclusion, ce qu’il faut retenir c’est qu’avec la progression prévisible du cours de l’or cette année et les réserves encore considérables présentes au Burkina Faso, les investisseurs miniers devraient continuer à investir massivement dans le secteur aurifère burkinabè. Ces derniers devront dans ce sens être plus que jamais attentifs à bien contrôler la légalité des titres miniers qu’ils acquerront, et ce notamment compte tenu du nombre très important de titres non valides existant actuellement au Burkina Faso.

Charles Bourgeois

Avocat au Barreau du Québec

[1] Article 9 du Décret n°2005-047/PRES/PM/MCE du 3 février 2005 sur la gestion des autorisation et titres miniers ;


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