(Agence Ecofin) - La course pour la production des terres rares s’intensifie depuis plusieurs mois à mesure que les Etats occidentaux cherchent à réduire leur dépendance vis-à-vis de l’offre chinoise. Au nombre des pays africains participants à cette lutte se trouve l’Angola qui, pour une fois, ne fait pas parler d’elle pour ses richesses pétrolifères ou diamantifères. A Longonjo dans la province du Huambo, le pays détient un trésor qui suscite bien des envies et dont il compte profiter avec l’aide de l’entreprise australienne Pensana Rare Earths.
Les mêmes standards que les projets chinois
Le minerai de terres rares de Longonjo n’a rien à envier aux projets chinois qui font référence dans le secteur. D’après des tests réalisés dans des laboratoires australiens en octobre 2020, le projet peut produire un carbonate de terres rares mixte (MREC) de meilleure qualité, avec notamment une teneur en néodyme et praséodyme (NdPr) d’environ 33,5 %. Ces chiffres correspondraient aux standards des produits obtenus dans l’empire du Milieu, premier producteur mondial de terres rares. Conséquence de cette annonce, Pensana peut s’intéresser à de nouveaux marchés où écouler la future production.
« Nous sommes maintenant en mesure d’entamer des discussions avec des acheteurs potentiels au Japon, en Corée et en Europe, en plus du large éventail de clients potentiels en Chine », commente ainsi Tim George, le PDG.
« Nous sommes maintenant en mesure d’entamer des discussions avec des acheteurs potentiels au Japon, en Corée et en Europe, en plus du large éventail de clients potentiels en Chine », commente ainsi Tim George, le PDG.
Il faut dire qu’en plus d’être d’excellente qualité, les ressources de terres rares de Longonjo sont immenses, et peuvent permettre à la compagnie de nourrir de grands rêves. Les prévisions actuelles font état d’une capacité de production annuelle de 60 000 tonnes de concentré de terres rares sur neuf ans, dont 4600 tonnes de néodyme et de praséodyme.
Tim George : « Nous sommes maintenant en mesure d’entamer des discussions avec des acheteurs potentiels »
Pour concrétiser ce potentiel, il faudra dépenser un capital initial de 131 millions de dollars. Le projet générera un EBITDA annuel de 146 millions $. Autant d’estimations que la compagnie espère améliorer grâce à une étude de faisabilité définitive en cours.
Les grandes ambitions de Pensana
Les parties prenantes du projet Longonjo sont conscientes de détenir un actif rare et particulier, dont l’entrée en exploitation devrait battre des records de durée. En effet, il est pour le moment prévu que la construction de la mine et la mise en service ne durent que 14 mois, en raison de la disponibilité sur le site des infrastructures (ferroviaires, électriques, portuaires). C’est une bonne nouvelle au vu du contexte actuel de guerre commerciale entre la Chine et les Etats-Unis ; Longonjo est aujourd’hui l’un des plus grands, riches et prometteurs projets de terres rares au monde.
C’est une bonne nouvelle au vu du contexte actuel de guerre commerciale entre la Chine et les Etats-Unis ; Longonjo est aujourd’hui l’un des plus grands, riches et prometteurs projets de terres rares au monde.
Pour autant, pas question pour Pensana de faire le petit joueur en se contentant de produire des concentrés de terres rares et de les vendre sur différents marchés. Depuis plusieurs mois, l’entreprise doublement cotée (sur les bourses ASX et LSE) ne cache pas sa volonté de transformer en aval la production de Longonjo. Les premières études engagées dans ce sens ont montré qu’il faudra investir environ 70 millions $ de plus pour une opération de transformation en aval de 50 000 tonnes/an, une somme facilement récupérable eu égard aux nombreux potentiels clients qui ont déjà affiché leur intérêt, aussi bien en Asie qu’en Europe.
Le secteur de l’éolien est grand consommateur d’aimants métalliques.
Par ailleurs, la société examine aussi la possibilité de construire au Royaume-Uni une usine de traitement capable de produire des aimants métalliques en se servant des concentrés de Longonjo. L’objectif est de profiter pleinement de l’opportunité qu’offre le secteur de l’énergie éolienne dans lequel le gouvernement britannique veut dépenser près de 50 milliards £.
Réaliser le rêve angolais
Le gouvernement angolais place de grands espoirs dans les ressources de terres rares de son sous-sol. Luanda ne compte pas rater l’opportunité qui se présente et milite depuis le début pour mettre Pensana dans les meilleures conditions pour exploiter le projet Longonjo. Au-delà du régulier soutien financier pour les activités d’exploration, il a ainsi déjà accordé à la compagnie un permis d’exploitation d’une durée inhabituelle dans le milieu, 35 ans renouvelables.
Le contrat minier conclu entre les deux parties prévoit notamment 2 % de redevances à verser à l’État sur les revenus de la mine ainsi qu’une taxe nationale de 20 % et une taxe municipale de 5 % sur les revenus, après deux ans d’exonération fiscale. La compagnie sera par ailleurs dispensée des droits de douane sur tout le matériel importé et nécessaire à la construction et au développement du projet.
Le fonds souverain de l’Angola est le premier actionnaire de la société Pensana.
Il faut dire que si le projet entre en production, les caisses nationales seront renflouées, non seulement grâce aux redevances et taxes, mais également par la participation de 23,1% détenue par l’Etat dans le projet à travers son Fonds souverain.
Il faut dire que si le projet entre en production, les caisses nationales seront renflouées, non seulement grâce aux redevances et taxes, mais également par la participation de 23,1% détenue par l’Etat dans le projet à travers son Fonds souverain.
Ce dernier est d’ailleurs l’actionnaire principal de Pensana par le biais de son véhicule ASF Africa Mining.
L’Angola est ainsi bien parti pour devenir le deuxième pays africain à produire des terres rares. S’il y arrive, ce sera une excellente nouvelle pour son économie, trop dépendante du pétrole, alors qu’il cherche depuis de nombreuses années à diversifier ses sources de revenus.
Louis-Nino Kansoun
Accra, Ghana