(Agence Ecofin) - Le 19 août dernier, Asante Gold a bouclé officiellement le rachat de la mine d’or ghanéenne Bibiani auprès de l’australien Resolute Mining. Avec cette acquisition estimée à 90 millions $, la junior minière canadienne a certes élargi son empreinte sur les gisements d’or du pays, mais Asante s’est surtout donné une chance d’atteindre le statut de producteur d’or, elle qui est active dans l’exploration au Ghana depuis une dizaine d’années.
Bibiani, un géant endormi
Le prix d’acquisition relativement modeste de Bibiani ne rend pas vraiment honneur à la mine. En décembre dernier par exemple, le chinois Chifeng Gold avait proposé 15 millions $ de plus que le montant accepté en août 2021 par Resolute, mais le deal a capoté au dernier moment, en mars dernier. Moins de six mois auront néanmoins suffi pour qu’un autre acheteur se présente, témoin s’il en ait besoin de l’attractivité de ce projet longtemps négligé par son ancien propriétaire.
In August, Emiral acquired 19+% of Asante Gold Corp which is developing the Kubi gold project & also bought the Bibiani mine in the same month. https://t.co/GxcMV9LVdN
— IntelAfrique (@IntelAfriqueLtd) September 2, 2021
Située dans une juridiction appréciée des investisseurs miniers, Bibiani est un actif qui a connu de beaux jours par le passé et qui a encore beaucoup à offrir. Exploitée depuis la première moitié du 20e siècle, la mine d’or a produit plus de 4 millions d’onces, contribuant à consolider la réputation acquise par le Ghana au fil des décennies, celle d’être la « côte de l’or » ou Gold Coast. Asante entend faire revivre cet héritage et les données disponibles sur ce géant endormi confortent la société dans son ambition.
Exploitée depuis la première moitié du 20e siècle, la mine d’or a produit plus de 4 millions d’onces, contribuant à consolider la réputation acquise par le Ghana au fil des décennies, celle d’être la « côte de l’or » ou Gold Coast.
Bibiani est en régime de maintenance et entretien depuis l’acquisition du projet en 2014 par Resolute, mais la compagnie australienne y a néanmoins mené quelques campagnes d’exploration. Ainsi, 50 000 mètres de forage sur quatre ans auront suffi pour annoncer en 2018 une estimation de ressources minérales actualisées. Le projet hébergerait 27,7 millions de tonnes titrant 3,6 g/t d’or pour 2,5 millions d’onces. Asante a par ailleurs « reconnu des possibilités d'exploration supplémentaires, tant à proximité de la surface que des cibles souterraines », par la voix de son PDG Douglas MacQuarrie.
Bibiani est en régime de maintenance et entretien depuis l’acquisition du projet en 2014 par Resolute.
Notons enfin que, selon l’étude de faisabilité publiée également en 2018 par Resolute, Bibiani est capable de produire 100 000 onces d’or sur une durée de vie de 10 ans.
Un climat favorable pour Asante
L’acquisition du projet Bibiani intervient dans un contexte où les investisseurs sont à l’affût d’opportunités dans le secteur aurifère, notamment en Afrique de l’Ouest. Sous l’impulsion donnée par le rallye historique du métal jaune l’année dernière (les prix ont monté jusqu’à 2000 $ l’once en août 2020 et se négocient à environ 1800 $ actuellement), les sociétés actives dans l’exploration aurifère bénéficient en effet d’une visibilité accrue. Ces derniers mois, plusieurs compagnies ont ainsi obtenu des millions de dollars sur les marchés, afin de financer le développement de leurs différents projets.
C’est donc sans surprise que, pour financer l’opération Bibiani, Asante a eu recours à du financement extérieur. Des investisseurs ont en effet accepté de souscrire les actions de la société et celle-ci a pu lever 74,6 millions $, moins de deux semaines après l’annonce de la transaction conclue avec Resolute le 4 août. Notons que deux sociétés émiraties font partie des investisseurs entrés au capital d’Asante Gold à l’occasion de l’acquisition de Bibiani, en l’occurrence Fujairah Holdings Emiral Resources.
Notons que deux sociétés émiraties font partie des investisseurs entrés au capital d’Asante Gold à l’occasion de l’acquisition de Bibiani, en l’occurrence Fujairah Holdings Emiral Resources.
Cette dernière, propriété de l’homme d’affaire russe Boris Ivanov est déjà présente dans le secteur minier au Burkina Faso, en Mauritanie et au Soudan. Elle a acquis 19,9% d’intérêts dans la junior minière canadienne et entend participer activement au développement de Bibiani.
Le soutien d’investisseurs de cette importance n’est néanmoins pas le seul indicateur qui invite à l’optimise à propos de la relance de l’exploitation d’or à Bibiani. Asante Gold bénéficie également de l’appui du gouvernement ghanéen. C’est un élément tout sauf anodin quand on sait comment les autorités ont bloqué il y a quelques mois le rachat du même projet par une autre compagnie.
Encouragée par l’État ghanéen et le marché, Asante compte bien relancer Bibiani rapidement.
En décembre 2020, Resolute avait conclu un accord avec le groupe chinois Chifeng Jilong Gold Mining pour lui céder Bibiani. Seulement, à la veille du transfert de propriété entre les deux parties, la société australienne a annoncé le 24 mars la résiliation « inattendue » de son bail minier par le gouvernement. L’hypothèse que nous avions alors avancée, d’une opposition des autorités à la transaction négociée avec Chifeng Gold, s’était confirmée quelques jours plus tard. Entrée en discussions avec l’honorable Samuel A. Jinapor, ministre des Terres et des Ressources naturelles, Resolute a en effet appris l’opposition expresse d’Accra à cette prise de contrôle chinoise. Avec le rachat à la même époque de Cardinal Resources et du prometteur projet aurifère Namdini par Shandong Gold, les autorités ne souhaitaient sans doute pas voir des entités de l’empire du Milieu s’emparer ainsi de deux projets d’envergure en si peu de temps. Chifeng Jilong jettera finalement l’éponge, laissant une voie royale désormais empruntée par Asante, avec la bénédiction d’Accra
Avec le rachat à la même époque de Cardinal Resources et du prometteur projet aurifère Namdini par Shandong Gold, les autorités ne souhaitaient sans doute pas voir des entités de l’empire du Milieu s’emparer ainsi de deux projets d’envergure en si peu de temps.
« Je salue l'approche récente de Résolute et d'Asante dans leurs relations avec le ministère des Terres et des Ressources naturelles et je suis heureux de soutenir la transition de la propriété de Bibiani à Asante », dira satisfait, le ministre Jinapor, au moment de l’annonce de la transaction.
Stimuler la production d’or et l’économie du Ghana
Encouragée par l’État ghanéen et le marché, Asante compte bien relancer Bibiani rapidement. Elle a déjà annoncé, dans un communiqué publié le 7 septembre, l’attribution d’un contrat EPCM (Ingénierie, Approvisionnement et Gestion de la construction) à la société locale Harlequin International. Celle-ci sera chargée de la réhabilitation de l’usine de Bibiani d’une capacité de traitement annuel de 3 millions de tonnes. Les travaux seront exécutés dans un délai de 9 mois et emploieront jusqu’à 300 travailleurs, essentiellement de la main-d’œuvre locale.
Dans l’optique de recourir à la compétence locale, notons que la junior minière a aussi engagé Walter Agbey comme chef de l’équipe métallurgique. Il dispose, apprend-on, d’un atout de choix, celui d’avoir travaillé sur la construction de l’usine de traitement qu’Asante veut rénover.
Mr. Agbey has 26 years of working experience with mining companies in Ghana. He has worked to develop and commission three gold processing plants, including our Bibiani plant. #corpasantegold #Gold #mining #MiningNews #investing #OTCMarkets $ASE $1A9 $ASGOF#Boerse
— Asante Gold Corporation CSE:ASE FSE:1A9 OTC:ASGOF (@corpasantegold) September 7, 2021
En plus donc de représenter une opportunité pour le Ghana d’augmenter de quelques tonnes sa production annuelle au cours de la décennie, la reprise de la production à Bibiani stimulera l’économie du pays en créant des emplois.
Pour Asante Gold qui compte produire le premier lingot d’or l’année prochaine, Bibiani est la porte d’entrée dans le cercle des producteurs ghanéens d’or. Si elle réussit, la junior minière ne devrait pas rester longtemps une productrice à un seul actif dans le pays, puisqu’elle y possède plusieurs autres projets à différents stades de développement. Kubi Gold Mine par exemple, actif phare de la société jusqu’au rachat de Bibiani, héberge plus de 300 000 onces d’or, selon une estimation SEDAR de 2014. Avec une cotation prévue prochainement sur la bourse locale (Ghana Stock Exchange), Asante Gold est sur le point de devenir l’une de ces compagnies qui « comptent », dans le secteur aurifère ghanéen.
Emiliano Tossou
Accra, Ghana