(Agence Ecofin) - Au Nigeria, la filière noix de cajou est l’une des principales contributrices aux recettes d’exportation agricole. Alors qu’elle affiche un important potentiel de croissance et de création d’emplois, l’industrie fait face à de nombreux vents contraires qui freinent son décollage. Décryptage.
Produisant en moyenne 200 000 tonnes par an de noix de cajou, le Nigeria occupe la 6e place dans l’approvisionnement international. Avec l’augmentation de la demande mondiale et sa meilleure attractivité commerciale, l’anacarde est devenu l’une des principales cultures de rente du pays depuis quelques années. La filière compte ainsi parmi les principales sources de devises du pays, hors hydrocarbures.
L’anacarde est devenu l’une des principales cultures de rente du pays depuis quelques années.
En 2017, les exportations d’or gris ont généré 144,7 milliards de nairas (380 millions $) occupant ainsi le second poste dans le secteur agricole derrière le cacao en termes de recettes générées, selon les données de l’Association nationale de la noix de cajou (NCAN). Sur le plan social, la filière a également un poids considérable fournissant des moyens d’existence à plus de 900 000 personnes réparties dans les 19 Etats de production. Si globalement, tous les acteurs s’accordent sur l’importance du secteur pour l’économie nigériane, la filière ne jouit pas toutefois de l’attention qu’elle mérite…
Une négligence chronique du gouvernement
Aujourd’hui, la question de savoir dans quelle direction va la filière anacarde nigériane reste sans réponse claire en dépit des différents discours volontaristes des autorités. Si les initiatives ont été nombreuses ces dernières années, elles n’ont pas été vraiment opérationnelles et le flou persiste. A l’heure actuelle, il est très difficile pour les parties prenantes d’avoir une idée précise de la stratégie de développement du secteur.
La faute à l’absence d’une véritable politique nationale du gouvernement posant les bases des orientations stratégiques à moyen ou long terme. Ce manque de lisibilité plombe les décisions d’investissements dans des segments stratégiques comme la transformation génératrice de valeur ajoutée où les mesures incitatives publiques sont particulièrement requises.
Ce manque de lisibilité plombe les décisions d’investissements dans des segments stratégiques comme la transformation génératrice de valeur ajoutée où les mesures incitatives publiques sont particulièrement requises.
Cette situation est aggravée par l’absence de l’Etat dans la plupart des axes capables d’impulser un développement de la filière. En effet, le gouvernement n’a pas encore le contrôle du système de commercialisation intérieure des noix de cajou ; ce qui entretient la volatilité des prix perçus par les producteurs qui doivent composer avec les fluctuations des cours mondiaux.
L’un des maux qui minent l’évolution du secteur est la faible structuration.
De plus, le manque d’encadrement agricole et l’accès insuffisant des producteurs au matériel végétal performant limitent d’autant plus la progression des rendements que le verger anacardier est vieillissant et plus vulnérable aux maladies.
Par ailleurs, l’absence d’un système efficace de contrôle de la qualité conduit à une décote du produit sur le marché mondial ; ce qui nuit à la réputation de la noix de cajou nigériane.
Par ailleurs, l’absence d’un système efficace de contrôle de la qualité conduit à une décote du produit sur le marché mondial ; ce qui nuit à la réputation de la noix de cajou nigériane.
Au-delà de ces problèmes structurels, l’un des maux qui minent l’évolution du secteur est la faible structuration. Actuellement, la NCAN est la seule organisation-cadre chargée de réguler la filière. Si elle essaie tant bien que mal de s’attaquer aux nombreuses contraintes dans la filière, la réalité est qu’elle ne pourra pas mener toutes les batailles pour faire émerger le secteur sans un véritable soutien du gouvernement.
Des réformes urgentes
Pour le Nigeria, l’implication des autorités dans la filière reste cruciale alors que l’industrie connaît un véritable boom au plan mondial et ne semble pas connaître la crise. Une meilleure considération de la filière serait salutaire pour le pays dans la mesure où elle a déjà accumulé des retards par rapport à d’autres pays de la sous-région. Il est clair que le Nigeria dispose du potentiel pour compter parmi les poids lourds du secteur, mais la valorisation de cet atout exige des politiques internes suffisamment stables. Elle requiert aussi que le gouvernement joue un rôle plus actif dans la construction d’un véritable cadre institutionnel pour les réformes dans le secteur, de la production à la commercialisation en passant par la transformation.
Il est clair que le Nigeria dispose du potentiel pour compter parmi les poids lourds du secteur, mais la valorisation de cet atout exige des politiques internes suffisamment stables.
Le pays pourrait notamment s’inspirer des exemples de la Côte d’Ivoire et du Ghana qui ont réussi à mettre sur pied des institutions pour gouverner leurs filières. La Côte d’Ivoire a notamment fait office de pionnier dans la réforme du secteur depuis quelques années, avec la mise sur pied du Conseil du coton et de l’anacarde (CCA) qui a pour but le suivi, la régulation et le développement de la filière anacarde. Le Ghana dispose quant à lui d’un Conseil du cajou.
Espoir Olodo
Lomé, Togo - Organisé par la BIDC.