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Potentiel minier inexploité ou sous-exploité (5e partie) : le cas de l’Ouganda

  • Date de création: 08 octobre 2021 16:54

(Agence Ecofin) - Ils disposent d’un sous-sol riche, hébergeant d’immenses ressources minérales, mais leurs secteurs miniers ne contribuent encore que faiblement (ou pas du tout) à l’économie. Nombreux sont ces pays africains qui n’arrivent toujours pas à valoriser leur important potentiel minier. Les raisons varient entre un manque de volonté politique et l’absence de mesures efficaces pour attirer les investisseurs. Ce nouvel épisode de la série que vous propose l’Agence Ecofin s’intéresse à l’Ouganda, pays abritant une riche diversité de ressources minérales, mais où l’exploitation artisanale est encore dominante.

L’or, principale ressource exploitée

Mi-septembre le ministère ougandais des Finances a annoncé une baisse de 30,4% en glissement annuel des recettes d’exportations pour le mois de juillet. En cause, apprend-on, l’absence d’exportation d’or sur la période. Après une décision du gouvernement visant à augmenter la taxe sur le kilogramme exporté, les acteurs du secteur ont en effet protesté, entrainant une suspension des ventes, le temps de trouver un terrain d’entente avec les autorités. Si cet épisode peut suffire à lui seul à expliquer la place qu’occupe l’or dans le secteur minier ougandais en particulier, et dans la collecte des recettes publiques en général, une autre statistique permet de mieux l’appréhender. En juin 2021, les exportations de café ont rapporté 58,6 millions $ pour l’Ouganda, ce qui correspond au plus haut niveau mensuel enregistré par le secteur depuis 1991. Dans le même temps, les exportations d’or ont généré 165,9 millions $ au cours de la période, soit près du triple du montant lié au café dont le pays est le premier exportateur du continent… Une progression importante quand on sait qu’en décembre 2017 les exportations n’avaient généré que 20 millions $.

Dans le même temps, les exportations d’or ont généré 165,9 millions $ au cours de la période, soit près du triple du montant lié au café dont le pays est le premier exportateur du continent…

Cette croissance du secteur aurifère est portée par une série d’initiatives mises en place pour développer le secteur minier en général, mais surtout pour tirer plus de profits sur la chaîne de valeur. Cela s’est traduit notamment par la construction de raffineries d’or dans le pays, afin de transformer localement la production.

« Nous souhaitons de la valeur ajoutée, parce que l’exportation de minéraux bruts c’est du colonialisme. De quel colonialisme parle-t-on ? Prendre des produits bruts, les transformer à l’étranger et ensuite les ramener à des prix très élevés. Nous ne voulons pas être dans ce type de relation, car nous souhaitons une réelle valeur ajoutée », explique en 2016 Yoweri Museveni, le président ougandais.

1 YoweriYoweri Museveni : De quel colonialisme parle-t-on ? Prendre des produits bruts, les transformer à l’étranger et ensuite les ramener à des prix très élevés. Nous ne voulons pas être dans ce type de relation.

Après celle d’Africa Gold Refinery inaugurée en 2017, la société chinoise Wagagai Gold a lancé cette semaine la construction d’une nouvelle installation de transformation dans le district de Busia. Un investissement de 200 millions $ est annoncé avec une entrée en production en 2023 et des recettes de plus de 20 millions $ sous forme de taxes au profit de l’État ougandais.

Cependant, ces raffineries sont détenues par des entreprises privées, ce qui limite forcément le bénéfice qu’en tire l’État, in fine.

Global Witness accuse ainsi les dirigeants ougandais, ainsi que ceux d’AGR, de fermer les yeux sur la provenance réelle de l’or transformé dans le pays, originaire, selon l’ONG, des régions en conflit dans l’est de la RDC ou le Soudan du Sud.

De plus, plusieurs accusations visent l’Ouganda qui ne produirait pas lui-même l’or transformé dans ces raffineries, mais l’obtiendrait plutôt grâce aux contrebandiers qui font sortir le métal jaune des pays de la sous-région.

2 AGRL’AGR est accusée de traiter de l’or congolais et sud-soudanais de contrebande.

Global Witness accuse ainsi les dirigeants ougandais, ainsi que ceux d’AGR, de fermer les yeux sur la provenance réelle de l’or transformé dans le pays, originaire, selon l’ONG, des régions en conflit dans l’est de la RDC ou le Soudan du Sud. Si les autorités démentent, elles omettent pourtant de fournir des chiffres sur les quantités d’or extraites chaque année dans le pays.

Des minerais stratégiques inexploités

Si les différents paramètres indiqués plus haut peuvent expliquer pourquoi le secteur minier ne contribue encore que faiblement à l’économie, la prépondérance de l’exploitation artisanale et à petite échelle (ASM) joue aussi un rôle.

« 90% des minéraux produits en Ouganda sont produits par les ASM. Pour en tirer profit, nous avons besoin d'investissements adéquats, ce qui nous ramène à la création d'un environnement attractif pour les investissements et à la protection de ces mêmes investissements dans le pays », a souligné cette semaine l’un des participants de la Mineral Wealth Conference organisée par la Chambre des mines.

Cette prépondérance peut expliquer le fait que les ressources minérales diversifiées du pays restent encore inexploitées dans leur grande majorité. Selon les données officielles disponibles en effet, l’Ouganda héberge, en dehors de l’or, du cuivre et du cobalt dans le district de Kasese, où une mine (Kilembe) a d’ailleurs été exploitée jusque dans les années 70. Le gouvernement tente depuis quelques années de trouver des investisseurs pour relancer la production, mais le passage tour à tour de M2 Cobalt puis de l’australien Jervois Mining n’ont pas encore permis d’atteindre cet objectif.

Le pays disposerait en outre de plus de 250 millions de tonnes de fer dans les districts de Muko, Kabale, Kisoro, Mbarara, Hoima Tororo, Bukusu, Sukulu Moroto et Kotido, pour ne citer que ceux-là. Des roches de pegmatite, minerai abritant le lithium, sont aussi localisées dans plusieurs districts ougandais, mais aussi de la colombite et de la tantalite (coltan), ou encore de l’étain.

En dehors du cobalt et du cuivre, métaux prépondérants dans la réussite de la transition énergétique, l’Ouganda dispose de terres rares et de graphite, deux autres matériaux importants pour la même raison et dont l’approvisionnement est actuellement considéré comme critique.

Au niveau des terres rares, un projet retient particulièrement l’attention, en raison notamment des ressources qu’il héberge : 315 millions de tonnes titrant 650 parties par million (ppm) d’oxydes de terres rares totaux.

Au niveau des terres rares, un projet retient particulièrement l’attention, en raison notamment des ressources qu’il héberge : 315 millions de tonnes titrant 650 parties par million (ppm) d’oxydes de terres rares totaux. Il s’agit de Makuutu, pilotée par l’australien Ionic Rare Earths.

3 OugandaMakuutu peut faire entrer l’Ouganda dans le cercle étroit des pays producteurs de terres rares.

Selon une étude exploratoire publiée en mai dernier, Makuutu peut livrer, dans sa première phase d’exploitation, 29 400 tonnes d’oxyde de terres rares total sur 11 ans. Si l’investissement total sur cette période devrait atteindre 300 millions $ environ, il ne faudrait en revanche que 89 millions de dollars pour lancer la production, somme récupérable en cinq ans. De plus, l’EBITDA devrait dépasser 1,2 milliard $ alors que les flux de trésorerie après impôts sont estimés à 766 millions $, soit autant d’indicateurs économiques qui, s’ils sont confirmés par des études plus précises, pourraient faire entrer l’Ouganda dans le cercle restreint des producteurs de terres rares.

La situation est assez similaire avec le graphite ougandais auquel s’intéresse la junior minière Blencowe Resources. Cette dernière, présente sur le projet Orom-Cross, a publié le 29 septembre une évaluation économique préliminaire prévoyant une production moyenne annuelle 75 000 tonnes de concentré de graphite sur 13 ans. Le capital nécessaire à la mise en production est estimé à 80 millions $, pour un EBITDA annuel de 40 millions $.

Assainir le secteur minier pour accroitre sa contribution

Comme dans plusieurs juridictions minières africaines, et plus particulièrement avec celles d’Afrique centrale et de l’est, le secteur minier ougandais souffre de nombreux maux, en particulier la corruption et l’inapplication des lois en la matière. L’ONG britannique Global Witness dénonce d’ailleurs cette situation dans un rapport publié en juin 2017. Par exemple, l’octroi de titres miniers nécessiterait, apprend-on, des pots-de-vin versés aux fonctionnaires de la Direction des études géologiques et des mines. Des allégations que contestait alors Elly Karuhanga, président de la Chambre des Mines.

« Il y a bien eu dans le passé des problèmes avec l’attribution des licences », confirme-t-il auprès du journal français Le Monde, tout en précisant que ces pratiques sont reléguées au passé.

Pourtant, dans son premier rapport sur le pays, publié le mois dernier, la Natural Resource Gouvernance Institute classe l’Ouganda dans la tranche de performance « insuffisant », avec une note de 55 sur 100. L’organisation américaine explique ce score par les « problèmes [qui] existent au niveau du processus d'octroi des permis », comme par hasard. À cela s’ajouterait la corruption généralisée dans le pays puisque l’indice concerné se classe dans la catégorie « défaillante ».

Pour changer la donne, le NRGI invite les autorités à s’en tenir aux normes de l’Industrie pour la transparence des industries extractives, organisation que l’Ouganda a rejoint l’année écoulée. Si elles sont mises en œuvre, le pays pourrait industrialiser réellement son secteur minier en attirant de grandes compagnies minières pour enfin profiter pleinement de ses richesses minérales.

Emiliano Tossou

Emiliano


 
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