(Agence Ecofin) - Les entreprises de l’industrie mondiale du chocolat sont très loin d’avancer dans la lutte contre la déforestation liée au cacao, malgré l’annonce d’une feuille de route (Initiative Cacao et Forêts-ICF) allant dans ce sens en mars 2017. C’est le constat que dresse l’ONG américaine Mighty Earth dans son nouveau rapport publié le 7 décembre dernier.
Intitulé Chocolat : mensonges sous emballage, le document indique que près de 13 748 hectares de forêts ont disparu entre novembre 2017 et septembre 2018, dans la région cacaoyère du Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire. Dans un précédent exercice de comptabilisation mené entre novembre 2016 et novembre 2017, l’ONG avait estimé à 14 827 hectares, la superficie touchée par la déforestation dans la même zone. « Cela signifie que depuis l’Initiative Cacao et Forêts, la destruction des forêts n’a presque pas diminué », pointe l’organisation environnementale.
En plus de mettre en lumière, un statu quo relatif dans les progrès, le rapport s’inquiète de l’avancement des dégradations dans certaines aires protégées de la Côte d’Ivoire.
« Dans la forêt classée de Goin-Débé, que nous avons visitée lors de notre enquête de 2017, les choses n’ont pas beaucoup changé. Une forêt a été défrichée et plantée de cacaoyers deux jours avant l’arrivée de notre équipe — précisément à l’endroit où nous avions enquêté il y a moins d’un an », note le document.
Si elle reconnaît qu’il existe des réussites dans la conservation de certaines zones protégées comme le Parc national de Taï, Mighty Earth indique que globalement, plus de la moitié des aires inspectées affiche une hausse du taux de déforestation depuis l’annonce de l’ICF.
Du côté du Ghana où elle n’a pas mené d’enquêtes de terrain, l’ONG souligne une poursuite des abattages forestiers en dépit des mesures positives adoptées par le gouvernement. « Nous avons constaté, grâce aux images satellites, que la déforestation se poursuivait au Ghana, vraisemblablement pour le cacao. Dans les réserves forestières de Tinte Bepo, Tonton et Tano Ofin, par exemple, nous avons relevé de nouveaux défrichages vraisemblablement liés, pour la plupart des cas, au cacao (bien que toutes les terres récemment défrichées n’aient pas encore été plantées) », souligne le rapport.
Face à cette situation, l’ONG appelle les gouvernements et les acteurs de la filière cacao a une collaboration étroite pour dresser une cartographie nationale de la déforestation et préconise un renforcement des systèmes de surveillance aussi bien par satellite que sur le terrain. « Tous les supermarchés et les fabricants devraient rendre public les noms de leurs négociants en cacao. Afin d’éviter de nouvelles destructions, tous les négociants doivent à leur tour rendre publics les noms des intermédiaires et des coopératives auprès desquels ils achètent leurs produits ainsi que leur adresse », ajoute le document.
Réagissant à cet état des lieux dressé par Mighty Earth, Richard Scobey, président de la Fondation mondiale du cacao (WCF), une des parties prenantes à l’initiative, a confié à Reuters : « Notre priorité immédiate a été de stopper la déforestation dans les régions les plus sensibles d’un point de vue écologique et environnemental, et nous sommes encouragés par les résultats positifs enregistrés en moins d’un an ».
Pour rappel, plus d’une trentaine d’entreprises signataires de l’ICF devraient publier individuellement leur plan d’action visant à respecter leur engagement avant la fin février 2019, selon Mighty Earth.
Espoir Olodo
Lomé, Togo - Organisé par la BIDC.