(Agence Ecofin) - Selon des experts financiers qui suivent le Johannesburg Stock Exchange, l'onde choc du désormais scandale Steinhoff a déjà occasionné, au 12 décembre, une perte de valeur boursière pour les investisseurs, de 295 milliards de rands (21,6 milliards $). Cette somme représente près de 8% du Produit Intérieur Brut de l'Afrique du sud.
Ce tsunami financier dont on ignore encore où il va s'arrêter, a débuté avec l'annonce par le groupe sud-africain, de l'existence de pratiques fiscales peu conformes, en même temps qu'elle a sollicité les services de PricewaterhouseCoopers pour un audit interne.
S'en est suivie le même jour la « démission » ou le renvoi de Mark Jooste, son directeur général qui, depuis 1998 a fait de ce petit vendeur de meubles basé à Cape Town (Afrique du sud), un géant de la grande distribution aussi bien en Europe qu'en Afrique.
Les premiers perdants de cet ultime scandale sur le marché financier sud-africain sont directement des investisseurs de Steinhoff. La valeur de son action s'est effrité de 78,2% entre le 1er et le 12 décembre 2017. En valeur absolue, l'entreprise est passé d'une capitalisation boursière de 240,5 milliards de rands, à seulement 50,7 milliards de rands
En tête des perdants directs, on retrouve Christo Wiese, le milliardaire sud-africain premier actionnaire du groupe, mais aussi la Public Investment Corporation, l'entité qui gère les fonds de pension des retraités de la fonction publique sud-africaine, et dont les responsables se sont dit aujourd'hui consternés par cette affaire.
Les autres pertes sont indirectes, même si les causes sont plus ou moins liées à l'affaire Steinhoff. La filiale africaine récemment créée par le groupe, Steinhoff Africa Retail (STAR), a, elle aussi reculé de manière significative sur le JSE où elle est cotée, cédant 38,7% en 10 jours.
On retrouve aussi des banques qui ont connu des chutes importantes. Il est très difficile de savoir si cette affaire en est entièrement responsable, mais la banque d'affaire sud-africaine Investec, qui est la plus exposée à Steinhoff pour les prêts qu'elle lui a accordés, à perdu 8,5%. Nedbank, le quatrième groupe bancaire sud-africain, a aussi reculé de 7,5%. Au total ce sont 14 sociétés dont la valeur boursière a fortement chuté sur le JSE depuis l’annonce de Steinhoff.
Une autre perte mais qu’on évalue au fur et à mesure, est celle des fonds d'investissement. Ces derniers sont dans le viseur de plusieurs experts, qui se demandent comment ils n'ont pas vu arriver le danger.
Abax Investment, qui gère deux fonds du groupe Nedbank, s’est justifié, en déclarant, qu'il n'est pas restée les bras croisés lorsque l'affaire a éclaté en août 2017 dans un journal Allemand. « Nous avons recruté une firme d'avocat pour mener une enquête indépendante et il est apparu que le partenaire de Steinhoff, à l'origine de ces informations, a la particularité d'être plutôt agressif dans les conflits. En plus de cela nous avons discuté avec un membre du conseil d’administration qui nous a rassurés, ce qui nous a donné plus de confiance », a fait savoir le gestionnaire d'actif à ses investisseurs.
Même si Steinhoff possède une bonne base des actifs, avec de très grosses filiales qui sont des acteurs de poids dans leurs domaines, l'incertitude sur ses comptes fait craindre une évaluation éronnée de ses performances financières et de l'ensemble de ces filiales.
Du coup par prudence, les investisseurs se désalignent et ne veulent perdre davantage. Jusqu’à récemment encore fleuron de la grande distribution sur le JSE, elle, vaut aujourd’hui moins que Shoprite qu’elle voulait racheter, et moins que tous les autres groupes de distribution de ce marché financier.
Idriss Linge
Johannesburg, Afrique du Sud : « Faire place au changement : façonner la prochaine ère de prospérité de l’Afrique »