Mamadou Lamine Loum a présidé le Panel de Haut Niveau chargé de définir le plan stratégique 2011-2020 de l’Union économique et monétaire ouest-africaine africaine qui propose de franchir un palier supérieur de l’intégration par la création d’une confédération ouest-africaine. Quid du Franc CFA dans cette perspective ?
Que deviendrait le CFA dans une confédération ouest-africaine ?
Mamadou Lamine Loum : Nous restons cohérents par rapport au schéma de l’Union africaine. Notre zone devrait déjà être à la monnaie unique depuis longtemps. La monnaie continuera de nous lier. Nous aurions une monnaie commune avec une dénomination consensuelle. Il ne serait plus question de la lier à une seule monnaie avec un compte d’opération dans une autre banque centrale européenne comme actuellement. La nouvelle monnaie serait au service du développement économique, sans laxisme de gestion mais avec les innovations rendues nécessaires par les impératifs du développement.
En utilisant les 4000 milliards de réserves de change ?
MML : Le financement des économies est la fonction principale des banques centrales. En ce qui concerne les réserves qui ont retenu l’attention dernièrement, je pense que le débat est mal posé. Certains s’étonnent d’une couverture à près de 100% en soulignant que les textes prévoient un seuil de 20% de nos engagements monétaires, mais il s’agit d’un plancher qui doit déclencher une série de mesures correctrices .Ces réserves ne constituent pas de l’argent qu’il faut dépenser. Et elles n’appartiennent surtout pas aux gouvernements. Quand une entreprise de la zone achète à l’étranger, elle paye en CFA et la banque centrale effectue le transfert dans la devise demandée par l’entreprise. Idem pour l’Etat qui effectue des paiements à l’extérieur. Idem, sauf que c’est l’inverse pour un particulier émigré qui envoie de l’argent à sa famille. Si ces réserves sont dépensées de façon inconséquente, comment assurer à tout moment ces paiements en devises étrangères ? Avec cette masse d’argent enviable, nous n’assurons dans l’Union que la couverture de quelques mois d’importation. Penser à une redistribution gratuite aux Etats, c’est ne rien comprendre au mécanisme monétaire. Et si au laxisme budgétaire, nous ajoutions le laxisme monétaire, alors là ….
Il est toutefois légitime de se demander, dans des pays où les besoins non satisfaits sont énormes, notamment pour la production, les échanges etc., quels outils utiliser pour ne pas être dépendant tout le temps des financements extérieurs.
Il y a une réflexion en cours dans le monde, et également dans notre zone, pour savoir comment assurer un meilleur financement de l’économie. Utiliser les réserves pour créer des fonds souverains comme certains pays le font déjà ?
Les populations et les pouvoirs publics sont demandeurs de beaucoup plus d’innovations. Et beaucoup d’expériences sont en cours, même dans nos pays.
Mamadou Lamine Loum, Premier ministre du Sénégal de 1998 à 2000.
Propos recueillis par Chérif Elvalide Seye, extraits du grand entretien publié ce mois-ci dans le magazine Le Quorum No 1 : www.lequorum.com
Mamadou Lamine Loum, Premier ministre du Sénégal de 1998 à 2000.
Johannesburg, Afrique du Sud : « Faire place au changement : façonner la prochaine ère de prospérité de l’Afrique »