Un groupe de « touristes » russes arrêtés dans une « zone rouge » au Tchad

(Agence Ecofin) - Aux prises avec les attaques djihadistes et les incursions de groupes rebelles basés en Libye, le Tchad, proche allié de la France, est le théâtre d’autres guerres secrètes.

Neuf ressortissants russes et un Lituanien ont été arrêtés, quelques jours plus tôt, dans la ville-oasis de Faya-Largeau, située dans le Sahara tchadien. Interrogés sur leur présence dans cette « zone rouge », ils ont déclaré être des touristes.

Selon l’agence de presse russe Tass, l’un des « touristes » interpellés, Vitaly Polischuk, a publié sur le réseau social VKontakte des informations sur leur arrestation, « au cours d’un périple en voiture de 3 semaines, à travers le Tchad ».

« Ils ont saisi nos documents, nos clés de voiture, nos téléphones portables, nos appareils photo et vidéo, nos GPS-trackers […] Ils ont cité un ordre de N'Djamena et nous ont mis dans l’avion ».

Une version qui contredit celle du ministère des Affaires étrangères tchadien qui a assuré à la représentation russe à N’Djamena avoir plutôt mis ces individus à l’abri d’un possible kidnapping ou d’un assassinat.

Toutefois, la présence de « touristes » russes dans cette zone à risque du nord tchadien et abritant une base militaire française dans un contexte trouble peut difficilement paraître anodine. En effet, Faya-Largeau est une position stratégique proche de la frontière libyenne, où la France maintient un détachement d’une trentaine d’hommes. Paris, un proche allié du Tchad qui est régulièrement accusé par les autorités centrafricaines, désormais parrainées par la Russie, de déstabiliser leur pays. Début juin, l’attaque meurtrière d’un poste frontalier tchadien par l’armée centrafricaine a exacerbé les tensions entre ces deux pays.

Une mission de renseignement à décrypter à l’aune du duel France-Russie qui se joue dans cette région, ancien pré carré français où Paris voit d’un mauvais œil l’ingérence de Moscou ? Peut-être. Faya-Largeau, point de départ de la campagne victorieuse du colonel Leclerc en 1941, serait alors le symbole d’une nouvelle offensive française…

La Russie a effectué son grand retour en Afrique au début des années 2000. Depuis, la Fédération travaille à renforcer sa présence sur tous les fronts. Accords de coopération militaire, investissements dans le secteur énergétique et des mines, armements, tout y passe. Mais au-delà de cette représentation officielle, un autre ballet d’ombres. Le spectre du groupe Wagner, bras armé officieux du Kremlin qui serait désormais présent au Soudan, en Libye, Guinée, Centrafrique, Mozambique, Angola, Afrique du Sud, Zimbabwe… plane sur les nombreuses zones de tensions qui, pour la plupart, hasard de la géologie, abondent en ressources minières.

Stéphane Alidjinou