(Agence Ecofin) - Lauréat du prix « Rolex à l’esprit d’entreprise 2014 », avec son projet Cardiopad (tablette tactile à usage médical), le camerounais Arthur Zang parle de la vision qu’il a de son projet, des propositions qu’il a reçues et aussi de l’aide que lui a apporté l’Etat camerounais.
Agence Ecofin : Comment avez-vous réagi le 24 juin 2014 après l'annonce officielle de votre sélection parmi les cinq vainqueurs du prix « Rolex Awards for Entreprise » ?
Arthur Zang : J'étais très heureux et je le suis toujours. Mais, je reste très calme, car je suis également très conscient des difficultés qui m'attendent encore.
Expliquez-nous le processus qui a conduit à votre sélection pour ce prix…
AZ : Le "Rolex Award for enterprise" est une compétition d'innovation qui récompense les entrepreneurs, chercheurs et les scientifiques visionnaires du monde entier. Il est organisé tous les deux ans par la société Rolex. Cette compétition se déroule en trois étapes. La première c'est celle de la soumission des projets. Chaque année, environ 2000 projets sont en compétition dans le monde entier. Il y avait 1829 projets cette année. La deuxième étape consiste au premier tamis avec une sélection de 300 projets, un second tamis choisi les 100 meilleurs projets.
L’on contacte ensuite les 100 porteurs de projets et des membres d'un premier jury les auditionnent. Pendant ces auditions, il y a des démonstrations et des exposés. Des questions sont posées par les membres du jury à chaque candidat. De ces 100 candidats sélectionnés, l’on retient 22 pour la finale. Dans la troisième étape, un deuxième jury international se réunit à huis-clos pendant environ une semaine pour sélectionner les 5 gagnants.
Que comptez-vous faire avec les 50 000 francs suisses (environ 27 millions de FCfa) qui accompagnent ce prix ?
Avec cette récompense, je compte lancer une production d'appareils à grande échelle. Ce qui nous permettra de démarrer la commercialisation du Cardio-pad au Cameroun.
Le gouvernement camerounais vous a octroyé 20 millions de francs Cfa pour votre projet il y a deux ans environ. En quoi consistait exactement l'appui de l'Etat camerounais et comment l'avez-vous utilisé ?
Les 20 millions de FCfa ne venaient pas du gouvernement, mais du chef de l'Etat. Je n'ai jamais reçu la moindre subvention du gouvernement. Cet apport du chef de l'Etat, SE Paul Biya, était destiné à m'aider à terminer mes recherches. Grace à cela, j'ai non seulement terminé le développement des appareils avec mon équipe, mais aussi, j'ai également créé une entreprise appelée Himore Medical située à Yaoundé. Nous avons pu fabriquer 30 appareils prêts à être utilisés.
Il était question que vous remettiez 10 exemplaires du Cardiopad au ministère de la Santé publique. Pourquoi cela n'a-t-il pas été fait ?
Cela n'a effectivement pas encore été fait pour le moment, mais nous travaillons d'arrache-pied avec le ministère de la Santé publique pour que cela soit fait dans les plus brefs délais. Néanmoins, mon équipe est prête à livrer ces appareils, mais avant nous devons former des médecins à son utilisation. Pour cela, nous devons travailler avec l'accord et la supervision du ministère de la Santé publique.
Qu'attendez-vous aujourd'hui du gouvernement camerounais ?
AZ : J'attends que le gouvernement continue de m'apporter son appui sur le plan institutionnel pour me permettre de travailler dans de bonnes conditions au Cameroun.
Vous avez été contacté par certains fonds d'investissement et partenaires financiers pour développer votre projet, mais vous avez décliné leurs offres. Pourquoi le refus de leur proposition ?
AZ : J'ai effectivement été contacté par plusieurs investisseurs. Beaucoup d'entre eux n'avaient qu'une vision commerciale du projet. Si j'ai décliné leur offre, c'est par ce que je recherche avant tout une fibre sociale dans l'esprit de mes collaborateurs. Nous sommes une entreprise citoyenne au service du Cameroun et de l'Afrique. Notre objectif principal n'est pas de faire de l'argent, mais plutôt de développer des moyens technologiques qui vont améliorer les conditions de vie de nos concitoyens.
Pour vous, quelle serait la meilleure manière de développer le Cardiopad et de le vulgariser auprès des hôpitaux et cardiologues non seulement du Cameroun, de l'Afrique et même du monde ?
AZ : Dans notre stratégie de déploiement, nous travaillons énormément et étroitement avec les médecins. C’est sur cette relation avec les professionnels de la santé que nous basons notre développement et le succès de nos appareils. Nous sommes proches d'eux. Nous comprenons leurs problèmes et c'est en fonction de leurs besoins que nous concevons des solutions aux problèmes de leurs patients. La vulgarisation du Cardiopad dépend surtout du degré avec lequel celui-ci pourra répondre aux attentes des médecins.
Quels sont les autres projets sur lesquels vous travaillez en ce moment ?
AZ : Je ne peux pas donner plus de détails pour l’instant. Mais, nous travaillons sur un appareil d'échographie avec quelques fonctionnalités innovantes.
Quelle est la place de vos coéquipiers dans le projet Cardiopad et comment travaillez-vous avec eux aujourd'hui ?
AZ : Dans le projet Cardio-pad, il y a beaucoup de développement logiciel. Himore Medical est essentiellement constituée d'une équipe développement dans laquelle chaque membre participe au projet de l'entreprise tant sur le plan technique que sur le plan managérial. Notre entreprise compte de nombreuses personnes parmi lesquelles : Cédric Evina, Ingénieur polytechnicien chargé du développement des applications de stockage d'informations sur les systèmes embarqués et sur les serveurs ; Jean Pierre Anguissa, Développeur logiciel et Designer UI sur les tablettes Cardio-pad ; Serge Boyogueno, Manager et chargé du suivi et de l'élaboration des projets.
Vous avez changé de locaux de travail à Yaoundé. Qu'est-ce qui a justifié ce changement ?
AZ : Nous recherchions simplement des locaux plus grands.
Quel est votre rêve en ce moment ?
AZ : En ce moment mon rêve, c’est que le Cardio-pad devienne l'un des appareils d'électrocardiogramme les plus utilisé dans le monde.
Propos recueillis par Beaugas-Orain Djoyum
Lomé, Togo - Organisé par la BIDC.