L’Afrique dépend fortement des satellites. Il y a peu de temps encore, seules des parties limitées des zones côtières du continent bénéficiaient des liaisons par câble avec le reste du monde. Partout ailleurs, toutes les communications y compris la téléphonie internationale, la télécopie, l’accès Internet et le trafic de données passaient par le satellite.
Dans son rapport annuel publié en 2007, la BAD estimait que 75% du trafic Internet de l’Afrique passe par des satellites. Malgré les tarifs élevés, l’Afrique est encore l’une des régions qui connait la plus forte croissance pour les services fixes par satellite.
Cette croissance est alimentée par la demande en infrastructure essentielle des fournisseurs de communications et des programmeurs de télévision.
Selon Flavien Bachabi, vice-président Afrique chez Intelsat : « les opérateurs de télécom sans fil, les fournisseurs de services à large bande, les fournisseurs de services de réseau d’entreprise et les opérateurs de télévision directement dans les foyers ont vu leurs activités croître de pair avec le développement économique de la région ».
Pour lui, cela signifie que presque toutes les entreprises, y compris les opérateurs de télécom, les FAI, les compagnies minières, les banques, mais aussi les gouvernements et les ONG, dépendent de la connexité satellitaire pour diffuser les données et y avoir accès rapidement. Dans la bataille qui va l'opposer aux technologies terrestres, principalement sans-fil (3G et LTE), la technologie satellitaire devra mettre en avant ses atouts, le principal étant certainement une disponibilité immédiate pour un coût modéré.
Pourquoi le satellite s’impose naturellement à l’Afrique ?
C’est une question qui mérite d’être posée d’autant plus que la croissance de la couverture par satellite s’accélère depuis plusieurs de décennies malgré les coûts très élevés. L’IDATE estime que le très haut débit par satellite devrait croître fortement au cours des prochaines années, notamment via les plans de réduction de fracture numérique, mais aussi via la course au très haut débit qui l’avantage sur les zones rurales par rapport aux technologies LTE et FTTx qui ne sont pas compétitives économiquement.
Compte tenu de l’immensité du continent et de ses spécificités géopolitiques, notamment de la faible télédensité par endroits, il est difficile d’y déployer des réseaux de fibre partout. Cela poserait des problématiques de rentabilité et de retour sur investissement pour les opérateurs. Il est plus facile d’avoir accès à la capacité pour les besoins de communications à partir de réseaux satellitaires, et c’est pourquoi les services fixes par satellite continuent à offrir une solution plus pragmatique pour combler la fracture numérique en Afrique et développer son infrastructure de télécommunications. « On le voit bien l’accès à Internet par satellite est bien adapté aux zones isolées, notamment celles qui sont éloignées des points de raccordement et, contrairement au réseau filaire, il permet d’être connecté en permanence et à haut débit », estime Flavien Bachabi.
Du fait de la demande élevée de services à large bande, les opérateurs satellitaires augmentent leurs engagements en Afrique afin de développer et de fournir des applications étendues, favorisant la propriété et le leadership africains dans les affaires, d’améliorer les possibilités d’emploi et d’augmenter la puissance du réseautage sur tout le continent.
Il ne fait aucun doute que les opérateurs satellitaires constituent un élément essentiel de l’avenir des télécommunications dans toute l’Afrique et qu’ils sont fiers de faire partie de la révolution de la connexité actuellement en marche.
Le large bande à moindre coût
Il y a un an, une nouvelle étape a été franchie dans la connectivité de l’Afrique avec le lancement réussi des satellites de communication Rascom-QAF1R et Nilesat 201.
Pour l’UIT : « ces nouveaux satellites amélioreront considérablement l’accès à toute une gamme de services de technologies de l’information et de la communication (TIC) pour des millions d’habitants de l’Afrique et du Moyen-Orient ». Il s’agit, pour Hamadou Touré, secrétaire général de l’UIT, d’un moyen pour donner accès, non seulement aux services TIC dont les entreprises ont besoin pour se livrer concurrence sur les marchés mondialisés d’aujourd’hui, mais aussi à des services d’actualités et de loisirs. Ils serviront aussi de plateformes à de nouvelles applications, par exemple dans les domaines du téléenseignement et de la télémédecine, vitales pour améliorer les conditions de vie des populations locales et aider les Etats à atteindre les Objectifs du millénaire pour le développement, d’ici à cinq ans à peine.
Le satellite africain vise la connexion de 130 000 villes et villages soit 130 stations en plus des stations principales d’accès et de connexion entre les pays.
Mais le premier objectif assigné au projet Rascom est d’apporter des solutions pérennes pour assurer les connexions internationales pour le continent en réduisant les coûts de communications entre les pays d’Afrique et relier des villages isolés par l’intermédiaire de terminaux à faible coût.
Il s’agira également de fournir des services de radio et de télévision directe et un accès à l’Internet et à des services large bande à valeur ajoutée. C’est le large bande à moindre coût à la portée de tous.
Complémentarité entre satellite et fibre optique
Bien qu'un réseau en fibre optique fournisse, en principe, une capacité en bande passante bien supérieure à celle que peut offrir un satellite, son déploiement nécessite d’importants investissements. La technologie satellitaire offre également une continuité des activités pour des services essentiels comme ceux fournis par les fournisseurs d’accès Internet et les opérateurs de télécommunications. Pour assurer des services de secours critiques en cas de coupure, ce qui revient très souvent au niveau des câbles d’atterrissement qui relient le réseau intérieur à la ligne sous-marine internationale, les opérateurs commutent sur les services de secours satellitaires. Comme partout ailleurs dans le monde, la connexité satellitaire continue à offrir une solution idéale et nécessaire par rapport à la fibre. Cependant, pour faire face à la concurrence des technologies terrestres, qu'elles soient filaires ou sans-fil, quelles sont les perspectives de marché réelles pour la technologie satellitaire ? Par ailleurs, quels scénarios de positionnement s'avéreront les plus pertinents pour un opérateur satellite compte tenu des caractéristiques du marché du haut débit dans les différentes zones géographiques ciblées ? Quelles nouvelles technologies satellitaires sont prévues à long terme ? Autant de questions que soulève l’Idate dans son rapport Digiworld.
Mohamadou Diallo
Article paru dans le magazine Réseau Télécom Network No 49.