(Agence Ecofin) - L'armée burkinabé a annoncé dans la soirée du 30 octobre avoir pris le pouvoir alors que le président Blaise Compaoré a refusé de démissionner malgré des émeutes sanglantes contre un projet de réforme de la Constitution qui devait lui permettre de briguer un nouveau mandat. Les centaines de milliers de manifestants -un million selon l’opposition- qui appelaient à la démission du président ont incendié l’Assemblée nationale et pris d’assaut la télévision publique. Des violences en province ont été également enregistrées.
Au total, les troubles ont fait une trentaine de morts et plus de cent blessés, ce qui a provoqué l'intervention des militaires. Le chef d'état-major des armées Nabéré Honoré Traoré, dans un communiqué lu par un officier, a annoncé la dissolution du gouvernement et de l’Assemblée nationale ainsi que la création d'un "organe de transition", en charge des pouvoirs exécutifs et législatifs, dont l'objectif est un retour à l'ordre constitutionnel «dans un délai de douze mois».
Le président Blaise Compaoré, arrivé au pouvoir par un coup d'Etat en 1987, a déclaré au cours d'une allocution télévisée avoir «compris le message» de la population et pris «la juste mesure des fortes aspirations au changement». Il n'a pas, cependant, évoqué une éventuelle démission, se disant à l'inverse «disponible pour ouvrir des pourparlers pour une période de transition» à l'issue de laquelle il «transmettra le pouvoir au président démocratiquement élu».
Pour l'opposition, ces mesures sont insuffisantes. Ainsi, Zéphirin Diabré, l’un des leaders de l’opposition, a demandé la démission de Blaise Compaoré et renouvelé son appel à la désobéissance civile. Bénéwendé Sankara, un autre ténor de l'opposition, a estimé que le départ du président est «un préalable non négociable». «Pendant 27 ans, Blaise Compaoré a roulé tout le monde dans la farine. Là, il est encore en train de duper, de ruser avec le peuple», a-t-il déploré.
Un couvre-feu a été imposé « sur l'ensemble du territoire de 19h à 6h ». A l'inverse, le président burkinabè a levé jeudi soir l'état de siège qu'il avait lui-même décrété dans l'après-midi. La prise de pouvoir de l'armée est, pour l'instant, assez mal acceptée par les manifestants, qui dénoncent la personnalité du chef d'état-major, qualifié de «pion du pouvoir» par une bonne partie des manifestants qui réclament Kouamé Lougué, un général en retraite au fort capital de sympathie. Cet ancien militaire limogé en 2004, qui a rencontré les plus hauts gradés du pays, s'est aussi entretenu avec une autorité coutumière très respectée dans le pays, le Mogho Naba, le roi des Mossi, l'ethnie la plus nombreuse au Burkina.
Blaise Compaoré est arrivé au pouvoir en 1987. Malgré deux septennats (1992-2005) puis deux quinquennats (2005-2015) et 27 ans de règne, il souhaitait se maintenir aux affaires après 2015.
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