(Agence Ecofin) - L'actualité d'une possible sortie de la Grande Bretagne de l'Union Européenne ne fait pas l'objet d'une attention particulière au niveau des populations et des décideurs économiques en Afrique, et pourtant certains gestionnaires d'actifs et de fonds sonnent déjà l'alerte, en indiquant qu'une telle situation produirait une onde de choc telle que le continent ne serait pas épargné.
Dans une interview accordée à Bloomberg, Sergey Dergachev qui gère un portefeuille d’actifs d'une valeur de 130 millions $ en Afrique, pour le compte de Union Investment Private Fund, a fait savoir, que le Brexit occasionnerait une forte volatilité sur les rendements attendus des obligations, souveraines et privées, dans les pays émergents, dont ceux d’Afrique. « Dans le meilleur des cas, les taux moyens se positionneront à 7%, mais dans le pire des scénarii, ce taux moyen pourrait atteindre les 11% », a fait savoir M. Dergachev.
De son point de vue, on ne vivra pas un effet direct, mais une telle évolution des choses viendra s’ajouter à des indicateurs négatifs, comme une probable hausse des taux de la réserve fédérale américaine ou le goût amer laissé par la dissimulation, par le Mozambique, de certaines de ses dettes. Pour l’instant on est loin de ce danger, et la médiane des taux des principales obligations internationales africaines est à 6,5%.
Union Investment qui a récemment investi sur les obligations du marocain Office Chérifien des Phosphates pense que le Maroc est un des meilleurs risques en Afrique. Il a aussi déclaré avoir évité une position sur le groupe bancaire nigérian Guaranty Trust Bank en raison d'une faible gouvernance et veut désormais éviter l'Afrique du sud du fait d'un faible engagement des politiques publiques à éviter une dégradation de sa note souveraine.
L'Afrique devra donc avoir un regard plus appuyé sur ces différents risques de volatilité que représente le Brexit, car la liquidité qu'elle apporte sur le marché des capitaux est relativement faible (entre 15 et 20 milliards $). Même si le potentiel reste important, les investisseurs ont souvent montré qu’ils n’hésiteraient pas à désinvestir en cas de risque global. Cette liquidité ne devrait pas s'améliorer sur le moyen terme, parce que généralement, le peu de ses actifs qui sont présents sur le marché local et global sont acquis par des institutionnels et des compagnies d'assurances qui, généralement, se positionnent sur le long terme.
Idriss Linge
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