OptiMiam, l’application mobile contre le gaspillage alimentaire

(Agence Ecofin) - 25 ans, une boîte et des rêves plein la tête. À Cotonou où Ecce Africa l’a rencontrée, Raodath Ayinkê-Ola AMINOU mesure le chemin parcouru jusqu’à la création d’OptiMiam, son application mobile innovante contre le gaspillage alimentaire. De Bambinos à l’X, itinéraire d’un astre en orbite ascendante.

Fille de commerçants yoruba du Bénin, Ola Aminou est une jeune startuper franco-béninoise issue d’une fratrie de cinq sœurs, marquées par l’éducation d’un père visionnaire. À Cotonou où elle a grandi et fait une partie de ses études, sans doute ses professeurs de Bambinos, du Cours Secondaire Notre-Dame-Des-Apôtres et du Lycée français Montaigne se souviennent-ils encore de l’élève studieuse qu’elle fut. Mais lorsqu’on se prénomme Ayinkê-Ola (ce qui signifie à peu près « accueille la richesse» en langue yoruba, ndlr), le destin frappe à sa porte en prenant la forme d’une bourse d’excellence après son brillant baccalauréat. Puis outre-Méditerranée, des classes de prépa et quelques années d’ISEP plus loin, l’on devient analyste financière chez Rothschild Banque, où l’on décroche un CDI, avec la perspective d’une belle carrière dans la finance.

Pourtant, en 2013, à 23 ans et après deux années en entreprise, Ola Aminou plaque tout, peut-être perdue dans le tourbillon du mal de vivre universel. « Il fallait que je démissionne », confie-t-elle d’emblée, en ajoutant: « c’est parce que j’en suis arrivée à un stade où je me suis dit que c’était insuffisant ; il fallait que je crée quelque chose ».

Création alors, mais quoi ? Elle l’ignorait elle-même à ce moment-là. Cette époque de sa vie la décidera à se faire diariste via un blog  intitulé Les Aventures d’Ola. Témoignage des tribulations excitantes d’une jeune femme intelligente et ambitieuse, cet écrin de son intimité a décrit finalement toutes les étapes de la création de sa future start-up, OptiMiam.

OptiMiam pour lutter contre le gaspillage alimentaire

En définitive, ce n’est pas un hasard si Ola Aminou a repris ses études après avoir claqué la porte de Rothschild, s’offrant alors un Master en Innovations à Polytech. Et elle fut bien inspirée d’écouter le vendeur du rayon traiteur de cet hypermarché, un certain jour de pluie où elle alla faire ses courses tard le soir. Ce dernier proposant presque à la criée des sushis frais invendus à prix réduits, Ola eut alors le déclic qui allait désormais bouleverser sa vie. La France gaspille environ 10 millions de tonnes de nourriture par an. Pourquoi ne pas contribuer à résorber le mal, se dit-elle dès cet instant.

Ainsi, commença pour elle sa croisade pour l’appli citoyenne contre le gaspillage. Partant de l’idée originelle d’un camion frigorifique au secours des invendus, sa démarche créatrice la conduisit pendant huit mois dans le Tout-Paris, à la rencontre de commerçants,  prospects et partenaires financiers. Entre les concepts d’ECOCOURSES et de Panier futé, son projet chercha ses marques, concourut dans des salons de l’innovation, pour accoucher finalement le 16 octobre 2014 d’OptiMiam, «l’appli gourmande, bonne pour le portefeuille, bonne pour la planète ! » Le procédé de cette application mobile géolocalisée en est simple : des offres flash exclusives émises par les commerçants sur des stocks de produits alimentaires frais invendus. Elles permettant ainsi aux acheteurs, connectés en temps réel, de localiser dans leur entourage immédiat lesdits produits à prix réduits, ainsi que les établissements qui les proposent.

Lancée à l’origine dans le seul 5e arrondissement de Paris chez huit commerçants, OptiMiam est exploitée aujourd’hui par la start-up éponyme employant plus d’une dizaine de personnes. En août 2015, 26.000 utilisateurs au moins avaient déjà adhéré au concept en région parisienne, et l’onde de choc se propage à la vitesse des téléchargements sur iOS et Android (App Store et Google Play, ndlr). Palme d’or du e-commerce en 2014, OptiMiam a depuis conquis la presse spécialisée et la blogosphère.

S’étendre à d’autres villes françaises

Ambitieuse pour son appli au fort potentiel, sa créatrice projette, à terme, une extension dans les autres grandes villes de France (Lyon, Marseille, Toulouse, Lille, etc.), voire une exportation de son bébé quant il sera mûr à point pour la cueillette européenne. En attendant, OptiMiam fait du chiffre, et pas que des cents.

Cependant, même en passant environ douze heures au quotidien à s’investir dans sa start-up, il n’est pas question pour Ola Aminou d’éluder les plaisirs discrets de la vie dont elle se délecte à l’envi. Gourmet sans revendiquer quelque gourmandise, cette jeune prof de pitch (environ 100.000 euros de revenus annuels en pitch, ndlr) pour startupers débutants assume pleinement sa propension pour l’attiéké ivoirien. Et de loin, elle préfère La Vie de David Gale d’Alan Parker au tintamarre médiatique d’un blockbuster.

Volontiers diserte sur les questions qui la passionnent, du haut de son quart de siècle, elle respire avec lucidité l’air prenant de sa mélodie du succès. Citée déjà dans son pays d’origine comme un modèle de réussite entrepreneuriale, celle dont la devise semble être « vers l’infini et au-delà » annonce pour l’avenir d’autres innovations digitales qui cuisent déjà au micro-ondes de son intellect.

Par Nicanor COVI, pour Ecce Africa