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Cameroun : le développement des marchés agricoles passe par un droit foncier pour les femmes

  • Date de création: 30 janvier 2015 15:00

(Agence Ecofin) - Le gouvernement du Cameroun et la Banque mondiale viennent de procéder à la signature officielle et publique, de l’accord de financement du Projet d’investissement et de développement des marchés agricoles (Pidma), dont l’objectif stratégique est d’accroître de manière significative  les volumes de production de certains produits comme le maïs, le sorgho ou encore le manioc, pour les porter à des niveaux et une qualité correspondants aux besoins des agro-industries locales.

Le projet qui rassemble plusieurs agences de développement autour du groupe de la Banque mondiale connait outre la participation de gros acteurs de l’agro-industrie camerounaise à l’instar de Nestlé ou encore Diageo (producteur de Guinness), celle des leaders dans la production de viande de poulet et de provende. D’un autre côté, des banques sont partenaires du projet et soutiendront financièrement les coopératives éligibles au Pidma.

Pourtant, rien ne sera simple dans ce projet, en raison de la contrainte que représente l’accès au foncier. En effet, au Cameroun, l’Etat reste encore le gardien des terres et au-delà d’un certain espace, il faut des accords qui peuvent arriver jusqu’au président de la République et des procédures longues et complexes pour avoir accès à certaines étendues de terres. Selon une source proche du Pidma, cette préoccupation est revenue à l’ordre du jour lors des rencontres avec des bénéficiaires. «Sur le sujet, un chef de village a répondu qu’ils avaient la possibilité de délivrer un document tenant lieu de titre d’exploitation et qui permettront de pouvoir exploiter certains espaces», a confié cette source. Mais, rien n’est sûr, ce d’autant que, sur la question du foncier, les conflits d’autorité entre le pouvoir traditionnel et le pouvoir institutionnel sont assez nombreux au Cameroun. Toujours en matière foncière, le projet n’a pas expliqué comment seront gérés les risques liés au genre.

Dans une grande partie des cas, les produits comme le manioc, le sorgho ou encore le maïs sont cultivés par les femmes rurales, les hommes préférant les cultures de rente. Or, la monétisation de la production que va créer le Pidma risque de voir de nombreux hommes s’investir dans ce segment et expulser des femmes, dans un contexte de tradition africaine où ces dernières n’ont souvent pas de droits réels sur les terres.

«Le risque n’est pas seulement de voir le Cameroun violer ses engagements sur le genre. Il y a un risque de voir le projet lui-même souffrir de manque de main d’œuvre engagée. En général, les femmes, en plus grand nombre dans l’agriculture vivrière, s’appliquent à ce travail parce que cela nourrit directement leurs familles. Si elles savent qu’elles auront de l’argent, elles sont susceptibles de s’appliquer davantage et c’est un atout. Car, cela  garantit une main d’œuvre permanente et respectueuse des standards fixés. Or, pour cela, il faudra régler la question du foncier pour ces femmes rurales», a expliqué un autre expert ayant requis l’anonymat.

Le troisième défi que pose le foncier sera la capacité des producteurs à rendre disponibles les volumes souhaités par le marché. Une solution qui existe serait de transformer, avec le temps, le partenariat des entreprises acquéreuses des produits, en partenariats publics-privés. Dans la législation camerounaise, qui régit ce mécanisme, les entreprises peuvent se voir accorder des droits sur les terrains de leurs opérations. Dans ce cas, ils seront co-managers  du projet, une situation qui risque de ne pas plaire à tout le monde, mais qui pourrait avoir le don de doper l’efficience du projet et de le pérenniser.

Idriss Linge

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