(Agence Ecofin) - Dans sa volonté de mettre fin au «vol à grande échelle» constaté dans l’industrie minière et de tirer plein profit de ses ressources naturelles, la Tanzanie a adopté en début de semaines, plusieurs nouvelles lois, en attente de promulgation. Si ces dernières sont censées probablement avantager l’Etat, on ne peut pas en dire autant des compagnies minières étrangères, qui n’ont pas tardé à réagir.
Point sur les réformes
Les deux premiers projets de loi, adoptés lundi par le parlement, portent sur la renégociation des contrats conclus sur les ressources naturelles (mines et gaz). Un audit réalisé sur les compagnies minières avait révélé que celles-ci fraudaient le fisc en sous-déclarant leurs revenus, et que la plupart des contrats conclus ces deux dernières décennies n’arrangeaient pas la Tanzanie. Ainsi, les nouveaux textes donnent désormais le droit à l’Etat de renégocier les contrats ou de les dissoudre. En outre, ils suppriment le droit des compagnies minières de recourir à un arbitrage international.
Le projet de loi adopté mardi par le parlement, donne au gouvernement le droit de détenir au moins 16% d’intérêts passifs dans les projets miniers. Cette participation est augmentable jusqu’à 50%, proportionnellement aux dettes fiscales des compagnies rapportées par l’audit commandé par le gouvernement. La loi fait également passer de 4 à 6% les redevances d’exportations pour l’or, le cuivre, l’argent et le platine, et de 5 à 6% celles de l’uranium.
Plusieurs compagnies suspendent la cotation de leurs actions sur la bourse ASX
Depuis l’introduction au parlement des premiers projets de loi, jeudi dernier, plusieurs compagnies ont suspendu la cotation de leurs actions à la bourse australienne ASX. Il s’agit notamment de Volt Resources, active sur le graphite de Namangale, Strandline Resources, active sur les sables minéraux lourds à Tanga South et Madimba, Magnis Resources, détenant le projet de graphite de Nachu, Graphex Mining, celui de Chilalo, Black Rock Mining, celui de Mahenge et OreCorp, active sur l’or de Nyanzaga.
Après l’adoption par le parlement des projets de loi, d’autres sociétés s’ajouteront à la liste. Citons notamment Tanga Resources, active sur l’or de Singida et Geita, et Peak Resources, sur les terres rares de Ngualla.
Walkabout Resources veut réviser l’étude de faisabilité de son projet Lindi.
La compagnie minière Walkabout Resources a déclaré à ses actionnaires, jeudi, être en train d’évaluer les impacts des nouvelles lois sur l’économie de son projet de graphite de Lindi. Cela aboutira à une révision de l’étude de faisabilité définitive du projet.
La société pense notamment aux conséquences de la clause d’intérêts libres de 16% sur le projet. En outre, elle cherche également des conseils en ce qui concerne l’interdiction à toute compagnie de recourir à un arbitrage international sur un litige, à propos d’un projet minier en Tanzanie.
Toutefois, Trevor Benson, président exécutif de la compagnie, a noté que le développement de la mine et la réalisation de profit restaient la «priorité», et qu’aucun changement législatif n’entrainerait l’arrêt ou la suspension des investissements dans le projet Lindi.
AngloGold Ashanti étudie les impacts potentiels sur sa mine Geita.
Mercredi, la compagnie sud-africaine AngloGold Ashanti a déclaré être en train d’examiner les nouvelles lois afin d’identifier quels impacts elles auraient sur ses opérations. La société qu’un contrat relie à la Tanzanie sur l’or de Geita, a produit, en 2016, de ses activités dans le pays, 489 000 oz d’or.
Cas Acacia Mining
Si le britannique Acacia Mining n’a pas encore réagi aux nouvelles réformes, il faut noter la particularité de son cas. En effet, la compagnie, plus grand producteur d’or de la Tanzanie, est impliquée depuis mars dernier, dans un bras de fer avec le gouvernement qui imposait alors un embargo sur les exportations de minerais bruts, dont l’or. Cette interdiction a posé de grands problèmes financiers à Acacia Mining, détériorant ses relations avec l’Etat.
La situation est devenue encore plus critique après l’audit commandé par le gouvernement qui indique qu’Acacia déclare dix fois moins d’or qu’il y en a dans ses conteneurs, et évalue à des milliards de dollars, les dettes fiscales de la compagnie.
Ce sera finalement la compagnie mère, Barrick Gold (premier producteur d’or mondial) qui interviendra, en entrant en négociations avec le gouvernement pour le règlement du litige, les discussions étant toujours en cours.
Louis-Nino Kansoun
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