(Agence Ecofin) - Deux semaines après l’inauguration de la station d’atterrissage de la fibre optique à Muanda en République démocratique du Congo le 08 juillet dernier en présence du président de la République Joseph Kabila, les avis divergent encore sur la fiabilité du réseau de fibre optique installé dans le pays. Alors que certains estiment que le réseau fonctionne normalement, d’autres pensent qu’il y a des dysfonctionnements qui ne permettent pas une fluidité optimale du réseau. Tous les six opérateurs du pays n’ont pas encore commencé à utiliser cette fibre optique estimant que seuls 2,5 Go parviennent à Kinshasa sur les 10 giga déployés à la station d’atterrage de Muanda. D’autres pensent que la SCPT n’a pas l’expertise technique, financière et les ressources humaines adéquates pour gérer cette fibre optique. Et ces divergences semblent se poursuivre même au sein du gouvernement.
L’administrateur-délégué général de la Société congolaise des Postes et des Télécommunications (SCPT), Placide Mbatika, contrairement à ce que pense Tryphon Kin-Kiey Mulumba, le ministre des Postes, des Télécommunications et des Ntic, affirme que tout va bien et que le réseau de fibre optique de 600 km installé fonctionne normalement. « Une semaine après le lancement de la fibre optique par le chef de l’Etat, ça va. Le réseau fonctionne très bien », a-t-il déclaré le 19 juillet dernier sur Radio Okapi. A titre illustratif, indique-t-il, « la société Vodacom qui a pignon sur rue sur le plan national et international vient de signer un contrat pour l’allocation des capacités sur le réseau de fibre optique géré par la SCPT. Si le groupe Vodacom a signé un contrat, c’est parce qu’ils l’ont testé et vérifié avec les experts de la SCPT et parce qu’ils font confiance aux infrastructures placés par la SCTP. Donc, l’état de santé du réseau est très bon ».
Ce qui tranche avec les explications données la veille par le ministre au cours d’un point de presse. Tryphon Kin-Kiey Mulumba reconnaît que « la phase I de la fibre optique (axe Muanda- Kinshasa) a été réalisée avec des malfaçons techniques ». « Mais, affirme-t-il, ces installations ont été réceptionnées par un certificat de réception définitive établi en février 2010 par les autorités de la SCPT. Ce document atteste que l’installation a eu lieu sans aucune faille. À la suite de ces failles constatées par mes services, en vue de sauvegarder l’investissement consenti par l’État, j’ai mis en place un bureau conjoint de haut niveau qui a en charge le suivi et l’évaluation du projet. La partie gouvernementale est composée d’experts issus de différents ministères, organismes et services de l’État dont la DGDP, l’ARPTC, les services de police et la SCPT. »
Autre précision du ministre, « alors que l’ouvrage, du point de vue de génie civil, a été réceptionné depuis plusieurs mois, que les équipements étaient installés par l’équipementier officiel de WACS, le Français Alcaltel-Lucent qui avait attesté que l’ouvrage avait été réalisé selon les règles de l’art, que les équipements fonctionnaient parfaitement, que le go ahead opérationnel du consortium WACS était donné (le fameux Ready for Service), que le signal haut débit était envoyé par Londres jusqu’à Kinshasa en passant par Muanda, le gouvernement se devait de tout mettre en œuvre pour réduire ce retard humiliant et inacceptable pour notre pays, et arrêter l’image d’un pays présenté comme un trou noir sur le continent dans le secteur des télécoms ».
Des déclarations que semblent ne pas valider le l’ADG de la SCPT, qui accuse plutôt les actes de vandalisme pour justifier les problèmes de la fibre optique. « Je me sens à l’aise de parler des choses que je maîtrise. Je suis technicien. Avant que je ne vienne au pays, j’ai eu l’avantage de travailler dans une société de pose de fibre optique. Je peux vous dire que techniquement, nous ne déplorons rien. Les gens pensent que c’est un câble métallique, ils vont creuser pour voler et s’accaparer de ce câble. C’est en ce sens qu’il y a des coupures. (…) Côté technique, nous nous sommes attelés, nous avons commencé avec trois gigas. De Muanda à Kinshasha, le réseau est de 10 gigas. Nous y allons progressivement, selon la demande des abonnés. (…) Plus il y aura la demande, plus nous allons augmenter les capacités », promet Placide Mbatika.
Autre problème constaté entravant le bon fonctionnement de la fibre optique, l’énergie électrique. Le ministre explique que « les sources d’énergie étaient bel et bien prévues à la conception du projet, mais la SCPT a signalé au Bureau de suivi-évaluation le vol des batteries des groupes électrogènes et justifié les coupures de courant au fait de manque de carburant suite à des difficultés récurrentes de trésorerie que l’entreprise connaît ». Selon Tryphon Kin Kiey Mulumba, « il est indéniable que la maintenance des infrastructures de haute technologie a un coût auquel la trésorerie actuelle de la SCPT ne saurait faire présentement face ».
Malgré tout cela, la SCPT reste sereine alors qu’un débat sur ses réelles capacités à gérer la fibre optique est en cours. « La SCPT vient de prouver aux yeux de tout le monde qu’elle est capable. Elle vient de construire la meilleure station sur le consortium Wacs. La SCPT l’a construit avec ses ingénieurs. Les ingénieurs de la SCPT, vous les retrouvez chez les opérateurs. Depuis trois ans, la SCPT a formé ses ingénieurs en France et en Afrique du Sud. A tous ceux qui pensent que la SCTP n’est pas capable, nous leur lançons un défi : qu’ils nous laissent gérer notre fibre. Nous la gérerons de manière professionnelle. (…) Nous allons gérer la fibre optique d’une manière responsable et professionnelle », promet-il sur les ondes de Radio Okapi.
Ceci dit, il est possible qu’un consortium incluant l’ensemble des opérateurs télécoms et l’Etat soit mis en place par le chef de l’Etat pour gérer cette fibre optique et le déploiement des futurs 40 000 km de fibre optique annoncés.
Beaugas-Orain Djoyum
33,3 milliards de FCFA pour la fibre optique à Kinshasha
Au sujet des coûts d’installation de la fibre optique en RD Congo et particulièrement à Kinshasha, le ministre en charge des Ntic Tryphon Kin-Kiey Mulumba précise : « Le bel ouvrage de Muanda version DORECO a coûté USD 4,7 millions (2,3 milliards de FCFA, ndlr). Pour mettre en place ce projet, il a fallu liquider les engagements de la République auprès du consortium WACS, soit USD 25 millions (12,4 milliards de F.CFA, ndlr). À cela, il faut ajouter l’investissement de la ligne Muanda-Kinshasa, soit USD 32 millions (15,8 milliards de FCFA, ndlr). Soit USD 61,7 millions (33,3 milliards de FCFA, ndlr) ».
Pour l’instant, tous les six opérateurs du pays n’ont pas encore souscrit à la fibre optique, car certains sont encore réticents, même si l’ADG de la SCPT affirme que les discussions avec les opérateurs sont en cours. D’après le ministre Kin-Kiey Mulumba, « Standard Télécom utilise déjà la fibre optique de Muanda, Vodacom a déjà signé son contrat fibre optique. Restent Airtel, Orange, Tigo et Africell, qui ne peuvent que signer le contrat fibre. Ils n’ont pas le choix: entre la fibre optique et le satellite, le choix est clair. Il faut ajouter l’opérateur MTN qui exploite le réseau en République sœur du Congo sur la liste de ceux qui utilisent déjà la fibre de notre pays ». Une attente majeure, car dit-il, « les efforts du gouvernement, dans le domaine des télécoms et des NTIC ne visent pas à redonner simplement espoir au peuple congolais. Ils tiennent à matérialiser l’émergence du pays au moyen des technologies innovantes selon la vision de la révolution de la modernité prônée par Son Excellence Monsieur le Président de la République, chef de l’État, Joseph Kabila Kabange ».
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