(Agence Ecofin) - La banque centrale au Kenya a récemment annoncé la réalisation en cours, d'une étude visant à évaluer les premiers impacts sur l'économie, de la loi qui encadre les taux applicables aux prêts bancaires, huit mois après son entrée en vigueur. L'étude apprends-on sera menée conjointement avec l'association des acteurs du secteur bancaire kényan.
Cette étude survient, alors que la quasi-totalité des banques cotées sur le Nairobi Securities Exchange, ont annoncé des revenus d'intérêts en baisse au cours de l’exercice 2016. Une situation que ces institutions financières attribuent à cette loi. Rappelons que, cette dernière fixe un taux maximal au-dessus des taux directeurs, à ne pas franchir, en rémunération du risque pris dans l’octroi des crédits à la clientèle.
Les banques blâment la loi sur la limitation des taux
Défendant cette législation plutôt controversée, le gouvernement avait expliqué que son objectif est de faire progresser l'encours des prêts accordés au secteur privé, notamment les individus porteurs de projets et les Petites et Moyennes Entreprises. En réaction, il a eu droit à l'effet inverse, car cette catégorie de clients bancaires a connu une baisse des crédits qu'on leur accordait (4,3% en décembre et le 17e mois consécutif).
Les banques expliquent que la limitation des taux les empêche de rémunérer correctement le risque pris sur certains clients, et préfèrent ainsi effectuer des placements sur les titres publics. L'analyse froide permet de constater cependant que la baisse des crédits aux individus et PME n'a pas débuté avec la loi sur la limitation des taux. Selon des données de la banque centrale, au moment où celle-ci entre en vigueur, cette situation de baisse dure déjà depuis 13 mois, et même le gouvernement pensait lui apporter une solution en contraignant les banques à offrir des taux plus attractifs.
La banque centrale du Kenya reste pour sa part assez positive. Au regard de l'aversion pour cette loi, elle s'était attendue à un repli des crédits à l'économie de l'ordre de 18,5%. Avec une baisse de seulement 4% à la fin du mois de février 2017, ses responsables considèrent qu’une limite a été atteinte et qu’on devrait avoir plus de stabilités dans les volumes de crédits accordés aux privés. Un autre effet que la loi n’avait pas expressément prévu, c'est la décision des banques commerciales de réduire le nombre de leurs employés, afin d'optimiser sur les coûts d'exploitation et de développer davantage les services digitaux.
Des défis structurels
Les banques kényanes sont actuellement dans des arbitrages complexes, car en même temps, elles doivent rémunérer les comptes d'épargne, et aussi continuer de financer l'économie afin de dégager des marges d'intérêts, sur un marché qui devient de plus en étroit. A côté de cela, les banques kényanes doivent faire face à la rude concurrence de la banque Mobile. Safaricom, le leader du secteur, a annoncé pour son année 2016 s'achevant au 31 mars 2017, des transactions financières via le mobile de 6869 milliards de shillings (66 milliards $). Un nouveau record pour l'entreprise, et une croissance moyenne de 27% sur les cinq dernières années.
Dans les milieux économiques kényans, ils sont nombreux à penser que les banques n'auront pas d'autres choix que de fusionner pour devenir plus compétitives et maintenir leurs niveaux de rentabilité. Si la limitation des taux tarde à porter leurs fruits, un système de taux très élevé, n'a pas non plus servi l'inclusion financière. Une situation délicate pour ces banques qui ont des obligations à l'endroit de leurs investisseurs.
Des 11 banques présentes sur le marché financier kényan, seules trois d'entre elles (Kenya Commercial Bank, Equity Bank et Cooperative Bank) ont réalisé au terme de l'année 2016, une marge nette d'intérêt au-dessus de la moyenne (21 milliards de shillings). Par ailleurs, seules trois d'entre elles ont connu une hausse de cet indicateur.
En attendant les résultats de l'étude, Kenya Commercial Bank a déjà publié ses performances financières du premier trimestre 2014. Les principaux indicateurs (revenus par action, marge net d'intérêts) sont en baisse. La hausse de 5,4% des charges d'exploitation bancaire, a plombé le ratio des coûts sur produit d'exploitation bancaire, qui se dégrade de 1 point de base à 58,3%.
Idriss Linge
Lomé, Togo - Organisé par la BIDC.